2 - Back to USSRAF
Le lendemain, j’essaie d’abord de contacter l’URSSAF.
Si nous avons affaire à cette administration au nom évoquant l’Union Soviétique, c’est que nous avons mis en location l’appartement dont nous sommes propriétaires pendant la durée de notre expatriation. A ce titre, nous devons nous acquitter de cotisations sociales auprès de cet organisme. Or, malgré plusieurs courriers pour les informer de notre adresse aux Etats-Unis, l’URSSAF s’obstine à nous envoyer toute correspondance à l’adresse de notre appartement en location. Si bien que ni les avis de paiement, ni les relances, ni les courriers d’huissier ne nous sont jamais parvenus.
Pour s’adresser à l’URSSAF à distance, tout passe par leur plateforme Internet. L’interface me rappelle les débuts de l’Internet.
J’essaie de me connecter sur mon espace personnel. La page ne se charge pas.
Après de multiples tentatives infructueuses, je réalise qu’il est impossible de me connecter à mon espace depuis l’étranger. Les règles de sécurité du site de l’URSSAF l’interdisent. Or impossible d’avoir ne serait-ce qu’un numéro de téléphone pour contacter l’URSSAF sans passer par cet espace Internet.
Situation ubuesque quand on songe qu’avec le décalage horaire il ne me reste à mon réveil plus que trois petites heures avant que les services de l’URSSAF ne baissent le rideau…
Je me connecte à mon VPN pour afficher une adresse IP en France. Quelle absurdité de devoir falsifier mon adresse pour pouvoir me connecter à une administration de mon pays…
Pas de rendez-vous téléphonique disponible avant plusieurs jours. Je bloque le créneau le plus proche et je m’attelle à envoyer un message via la messagerie.
J’ai l’impression de me confronter aux douze travaux d’Hercule.
Les motifs pour contacter l’URSSAF sont strictement limités à une liste préétablie. Impossible d’y déroger. Impossible de faire plus impersonnel. Et tant pis si une famille d’enfants en bas âge n’a plus les moyens de s’acheter de quoi se nourrir : Il faut sélectionner un motif avant de pouvoir rédiger le message.
Dois-je aborder le sujet sous l’angle de l’adresse erronée ? Sous celui de la saisie ? Sous celui des intérêts de retard qui se sont accumulés jusqu’à accoucher d’une créance obèse ?
Aucun motif ne correspond à la situation inextricable dans laquelle je me trouve aujourd’hui. J’ai vaguement l’impression d’être projeté dans l’univers de Kafka.
Je choisis un motif qui me semble le moins éloigné du sujet : obtenir des informations sur une procédure contentieuse en cours. Deux choix s’offrent à moi : « demander un rendez-vous » (c’est déjà fait). Ou « envoyer un message ». J’opte pour la deuxième option.
« Madame, Monsieur,» (je ne peux me résoudre à débuter par « chère Madame, cher Monsieur »).
« Malgré mes nombreux courriers pour vous indiquer mon adresse postale, nous n’avons jamais reçu vos avis de paiement. Vous avez décidé de faire appel à un huissier qui a saisi l’intégralité de mes comptes bancaires. Dans la mesure où ma femme et mes enfants en bas âge n’ont plus de moyens pour subvenir à leurs besoins, je vous prie de m’indiquer au plus vite comment régulariser cette situation et retrouver le plein accès à mon argent. Merci de me joindre à mon numéro américain ci-joint. Cordialement,… »

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