On n'a pas essayé, qu'ils disent...
Comme s’il s’agissait de l’iPhone 15, de traverser la ville à trottinette ou encore de faire un saut à l’élastique. La phrase est bêtement répétée à tout bout de champ et . la tentation est grande de répondre que ce n’est pas parce qu’on n’a jamais essayé de boire de l’alcool à brûler qu’il faut à tout prix essayer ! Ici plus qu’ailleurs, tout le monde est à l’ouest. De cette terre en bordure marine où jusqu’à peu, les esprits tout autant que les vents et les grains d’eau étaient modérés, tempérés. Une météo de l’âme, mer d’Irlande, Yeu, Ouessant, Fisher, Viking, Dogger, Forties et Cromarty, échelle de Beaufort…. Un bout de monde forgé par un syncrétisme né d’un militantisme catho, d’une confluence des luttes paysannes et ouvrières, des usines à la campagne et peut-être, va savoir, d’une frontière d’eau salée. Mais voilà. Ici aussi, de digue, il n’y a plus. Souvenirs… Il y a des années de cela, on nous disait qu'il fallait le comprendre ce vote. Parce qu'à l'époque, il y avait déjà les classes populaires et tous ces laissés pour compte (on disait que le vote était corrélé au niveau d'éducation). On disait ça mais aujourd’hui, les cols blancs, les jeunes éduqués et jusqu’aux retraités choisissent de voter ce que, répètent-ils, nous n’avons pas essayé. Et puis, des années plus tard, il fallait encore les comprendre parce qu'ils habitaient les banlieues et les lisières, comme les décrivait l'écrivain Olivier Adam. Et puis aujourd'hui, il faut encore et toujours les comprendre parce que le pouvoir d'achat, parce que l'élite, parce que l'insécurité... Et demain, faudra les comprendre parce qu’ils ne pouvaient pas savoir, tu comprends, « ils avaient pas essayé ! » Hier comme aujourd'hui, nombreux sont surtout celles et ceux qui grognent sans jeter un seul œil aux programmes, qui résument l’affaire d’un « tous pourris et tous dans le même sac ». Cette inculture politique est désespérante tout autant que cette incapacité (inaptitude si on veut) à appréhender un minimum la vie au-delà de sa cuisine ou de son bout de jardin... Mardi soir 11 juin. La salle est archi-comble. Une heure et demi plus tard, à la sortie, ils sont tous là. Cheveux blancs, prolos, raies sur le côté, baba cool, un peu de couleur, de l’arc-en ciel, la génération Z… La France quoi. Ce petit cinéma associatif fait le plein avec ce p’tit truc en plus. Et sans doute serait-il vain de trouver une note discordante. Quelqu’un qu’aurait pas été touché, ému, émerveillé - désolé, je n’adhère pas à l’écriture inclusive - par cette histoire de grand cœur dans une colo de vacances avec de jeunes adultes handicapés. Un hymne au rire et au vivre ensemble. Bizarrerie ? Début juin, le nombre de spectateurs était proche de celui des votes pour le parti de l’exclusion : 7 millions et quelques… Depuis, la barre des 8 millions a été franchie au box-office. Ne rien faire d’autre qu’ouvrir les yeux, le cœur et nos bras. Preuve que ça, au moins, ça marche ! Peut-être n’avons-nous pas suffisamment essayé.

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