Jonathan

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Je cours, je cours à perdre haleine. Pourquoi j’ai l’impression que ces foutus vestiaires sont si loin ? J’entre dans celui des filles et le spectacle qui s’y déroule me met hors de moi.

Le sac de Nat est au sol, ses affaires éparpillées. Vincent la maintient contre le mur, les bras au-dessus de la tête maintenu par l’une de ses mains et de l’autre il cherche frénétiquement à se débarrasser de son pantalon de sport. Natacha essaye de se libérer, en vain.

Je vois rouge. J’empoigne Vincent par les hanches et l’envoie valser à l’autre bout de la pièce. Sous cette espèce de pourriture, Natacha est à demi nue, meurtrie, les joues baignées de larmes. Cette vision ne fait qu’accroître ma colère. J’enlève mon T-shirt et le lui donne pour qu’elle puisse se couvrir.

  • Tu es mort.

Je me suis retourné vers ce salaud qui a l’audace de me sourire. Je laisse alors libre court à ma haine. Vincent n’arrive même pas à me toucher. J’enchaîne les feintes, les coups de poing et de pied : je sens l’os de son nez se briser sous mes phalanges. Son visage est en sang et des gouttelettes voltigent ici et là. Finalement, Vincent devient complètement amorphe.

Tu as de la chance qu’elle ait besoin de moi…

Je m’accroupis face à Natacha. Elle n’a toujours pas bougé. Prostrée contre le mur, elle n’a même pas pris la peine de se couvrir. Je ramasse mon T-shirt et l’aide à l’enfiler puis je la ramène sur mes genoux et la serre contre moi.

  • Mon dieu Nat… Qu’est-ce qu’il t’a fait ?

Sa douleur et son désarroi sont palpables. Sa tête posée au creux de mon épaule, elle les pleure, elle les crie. La voir ainsi me déchire le cœur, je ne peux que la bercer et attendre qu’elle se calme. J’essaie moi-même de retenir mes larmes mais je n’y arrive pas. Que se serait-il passé si Laura ne nous avait pas prévenus ? Natacha aurait été… Rien que d’y penser me rend malade. Tout ça à cause de Virginie. Cette fille est complètement folle.

  • Je suis là Nat… Je suis là…

Je regarde ce petit bout de femme dans mes bras et mesure tout l’amour que j’ai pour elle. En si peu de temps, elle a pris une énorme place dans ma vie. Pourrais-je vraiment la laisser partir ?

Un mouvement dans mon champ de vision… Le bruit si caractéristique du cran d’arrêt que l’on ouvre. Vincent se lève, le couteau placé devant lui. Il vise Natacha.

NON !

  • Merde !

N’écoutant que mon instinct, je protège Natacha de mon corps. La lame entaille mon flanc gauche. La fureur s’empare de moi à nouveau. Non seulement il voulait la violer mais en plus porter atteinte à sa vie ? La détruire moralement ne suffisait donc pas ? Je ne me contrôle plus. Je lâche Natacha un peu brutalement et fait face à Vincent.

Lorsqu’il croise mon regard, son visage devient encore plus blanc. Il essaie de lever les mains - en signe de reddition ? - mais peu m’importe. Je le désarme aussi facilement que la première fois et le pousse au sol. A califourchon sur lui, je le frappe au visage. Encore. Et encore. Et encore. Ma haine est telle que je ne remarque même pas lorsque Natacha me saute dessus, me faisant perdre l’équilibre. Je tombe à la renverse, Nat sur moi, ses jambes nues passées de part et d’autre de ma taille.

Je n’en ai pas fini avec lui ! Laisse-moi Natacha ! Je vais le… Je vais le…

Je m’assois et essaie de me libérer de son emprise mais elle ne l’entend pas de cette oreille. Elle prend mon visage en coupe et là… Elle m’embrasse. Je suis surpris par son audace. Elle force même le passage de mes lèvres avec sa langue. Je l’accueille avec un plaisir non dissimulé. Ses mains agrippent mes cheveux tandis que les miennes caressent son dos avec avidité. Son corps se cambre contre le mien. Ce baiser est chaud, tumultueux et il exprime dans son intégralité ce que nous n’osons pas nous dire.

Son téléphone se met à sonner. Elle l’ignore. Et moi aussi, seul ce baiser compte.

Il sonne encore une fois.

Et encore une fois.

  • Tu devrais répondre… lui murmurai-je doucement après m’être séparée de ses douces lèvres. C’est sûrement Steven…

Elle hoche la tête et récupère son portable. Ses sourcils se froncent.

  • Allô ?

Son visage se peint de stupeur.

  • Co… Corinne ?
  • ...
  • Mais de quoi Corinne ? Qu’est-ce qui se passe?
  • ...

Natacha devient blanche. Ses lèvres se sont mises à trembler.

  • Nat ?

Elle s’est fermée au monde extérieur. Rapidement, elle enfile un short et remet ses baskets. Ses yeux reflètent une énorme panique.

  • Nat ? Qu’est-ce qui se passe ?
  • Je… Je dois partir. Immédiatement.

Je l’attrape et la serre contre moi. Elle n’arrête pas de trembler et se débat.

  • Nat, dis-moi ce qui se passe.
  • Jonathan… Si tu m’aimes aussi fort que tu l’as dit hier soir… je t’en prie… laisse-moi partir… s’il te plaît…

La profonde tristesse qui empoigne ses jolies prunelles me poignarde plus profondément que ses paroles. Mes bras retombent le long de mon corps. Ses lèvres se posent une dernière fois sur les miennes.

Elle est partie.

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