Une journée seule en forêt. C’est peut-être ça qu’il me fallait. Ça faisait longtemps.
Et je n’ai pas choisi n’importe laquelle. La forêt d’Aokigahara repose au pied du mont Fuji. Elle est calme, si calme, c’en est perturbant. Je trébuche sur le sol en roche volcanique. Et mon regard se perd à travers les arbres, sous les racines à découvert et à l’intérieur des failles dont on ne voit pas le fond. Il n’y a personne d’autre que moi et le bruit du vent le long des feuilles. Pas un chant d’oiseau ne vient perturber ma randonnée.
Parfois, j’ai l’impression de me sentir observer. Je me fige et scrute les alentours. Rien ou peut-être une ombre furtive au loin entre les troncs. La mer d’arbres me surveille et je le lui rends bien.
Ce lieu à un passif particulier. Des centaines d’âmes en peine s’y croisent tous les ans. Souvent, ces âmes déposent leurs chaussures et n’en sortent jamais. Ici, l’ambiance est chargée de ces histoires de pendus au milieu de la forêt sacrée.
Et moi, je déambule comme une de ces âmes. Je n’ai aucune intention de commettre l’irréparable. Je cherche simplement le repos provisoire. J’essaie d’admirer une beauté dont seule mère nature a le secret. J’essaie de mettre de côté ces gens dont l’existence fut assez triste pour s’enfuir à jamais. Mais il semblerait qu’ils font partie de Aokigahara désormais. Leurs larmes à fait pousser la mousse, leurs peines à creuser les failles, leurs cris à fait pencher les arbres. Malgré toutes ces peines, noyées dans cette mer d’arbres, personne ne les entendus. Sûrement que personne ne voulait les écouter.
Quelques rayons de soleil traversent les branches fournies. Aujourd’hui, il fait chaud, mais j’ai des frissons.