Il est 6h20 quand les premiers rayons du soleil font leur apparition. Laissant derrière eux les étoiles, embrasant le ciel nocturne. Certains rêveraient de pouvoir admirer ces billes de lumière le jour tout comme la nuit mais malheureusement pour eux, la présence du soleil couvre totalement leur scintillement. Enfin, c’est ce que tout le monde croit savoir, mais la vérité est tout autre. Les étoiles dépensaient en réalité la totalité de leur énergie la nuit, et le jour venu se trouvaient vidées de leur force. Cependant un être du nom de Koro avait le devoir de leur rendre cette énergie pour que, à la nuit suivante, le monde puisse encore les admirer.

Koro était un être astral de la famille Haskala, chargée d’illuminer les cieux. Il faisait près de trois mètres de haut, ses jambes ressemblaient à d’énormes pics dont les pointes lui servaient de pieds. Une vieille capuche noire ne laissait apparaitre sur son visage que de grands yeux gris, habités d’un éclat semblable à celui du diamant. Sa peau quant à elle était d’un bleu cobalt magnifique. Celle-ci étant translucide, on ne saurait dire si l’univers coulait en lui, ou s’il ne faisait simplement que de le traverser.

Il était à présent temps d’entamer son travail. Koro s’élança dans le vide spatial pour rejoindre les premières constellations. Il commença par la Grande Ourse, de toutes, sa préférée. Sautillant de part en part, l’impact de ses pas laissait s’échapper une onde de cristal, se volatilisant derrière lui. À présent devant la première étoile, il enfonça gracieusement son avant-bras au centre de sa poitrine pour en ressortir un orbe éblouissant qu’il plaça au cœur de celle-ci. Il récitait d’un ton grave et solennel un mantra accompagnant son geste :

« Une pointe de lumière dans les ténèbres,
Éclaire les sages de notre éclat… »

Il répéta ce procédé auprès des différentes étoiles et, à chaque mantra récité, c’est une part de lui-même qu’il laissait derrière lui.

Une fois la nuit tombée, épuisé par sa tâche, il observa un homme contempler le fruit de son travail. Celui-ci avait dans son regard une lueur pleine d’espoir, relative au spectacle qui se déroulait sous ses yeux. Koro s’approcha sans un bruit, tout en sachant que l’inconnu n’avait pas la possibilité de le voir. À présent derrière lui, il engouffra sa main au niveau de la cage thoracique de l’homme ! Dans sa charge, il fit tomber la capuche qui jusqu’ici lui recouvrait le visage et, avec elle, c’est toute la beauté de l’être astral qui disparaissait, laissant apparaître une vision des plus horrifiantes. Sa bouche était complètement déformée par de longs crocs qui entaillaient sa mâchoire. Son regard si étincelant s’était envolé, laissant place à des yeux emplis de hargne.

Koro extirpa un orbe lumineux semblable à celui qu’il déposait plus tôt au sein des étoiles. Comme à son habitude, il récita son mantra :

« Une pointe de lumière dans les ténèbres,
Éclaire les sages de notre éclat,
Dans cette rencontre funèbre,
Tes espoirs vivront en moi. »

L’homme n’émit aucun cri de douleur, mais il émanait de lui la forte impression que tout espoir l’avait quitté pour ne laisser place qu’à une douce mélancolie qui était annonciatrice d’une profonde tristesse. Sur le reste du globe, les admirateurs d’étoiles étaient envahis par un appel d’aventure à la vue de ce spectacle si banal et pourtant si précieux.

Enfin, jusqu’à la prochaine nuit.