Chapitre 4 (4/4)

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— Bien ! Pour commencer, je vais vous poser quelques questions sur ce que vous avez lu, annonça d’une voix vibrante Monsieur Tantum. Toi, avec le bonnet rouge, peux-tu m’expliquer pourquoi l’Âme des Maîtres de La Vie est blanche ?

Mon camarade déglutit, clairement mal à l’aise sous le regard de la salle entière. Le silence pesait lourdement.

— La couleur blanche représente l’effacement, le commencement d’une nouvelle existence pour une âme. Lorsqu’on insère l’âme blanche dans un nouveau corps, elle est encore vierge, sans but, sans forme. C’est une page blanche, prête à être écrite. L’Âme des Maîtres de La Vie est blanche. Elle symbolise toutes les âmes qu’ils remettent en circulation pour de nouvelles vies, expliqua-t-il avec une assurance qui cachait son stress.

— Bien. Et que peux-tu me dire à propos de l'âme rouge des humains ?

— C’est l’âme des personnes prêtes à recevoir l’amour, celles qui sont particulièrement sensibles à l'influence des Cupidons. Cette couleur incarne l'ouverture aux sentiments, l’aptitude à aimer et à se laisser toucher, répondit-il.

— Bien, très bien...

Le professeur prit place sur son bureau et croisa les bras, ses yeux d’aigle balayaient la salle. Ses yeux brillaient d'une intensité presque hypnotique.

— Parfait, poursuivons donc notre exploration des âmes et de leurs couleurs. Lire, c’est bien. Mais comprendre, expliquer, c’est mieux. L’âme des Altruistes est dite fixe ; elle ne varie que dans de rares exceptions. Elle nous définit, raconte notre passé, notre rôle.

Il marqua une pause, et son regard s’assombrit légèrement.

— Celle des humains, en revanche, est changeante. Elle se transforme en fonction de leurs émotions, de leur humeur. Et plus que cela, ils ont deux couleurs. La première, la couleur profonde, celle qui révèle leur nature véritable : sont-ils empathiques ? Cruels ? Bienveillants ? Égoïstes ? Et la seconde, la couleur de surface, qui est plus fugace, plus malléable, et peut changer selon leur état d’esprit ou leurs désirs du moment.

Un silence respectueux s’installa alors qu’il continuait à nous expliquer avec passion.

— C’est simple : si l’âme de surface des humains est rouge, les Cupidons peuvent facilement les influencer. Si elle est bleue, ce sera la Muse qui aura le plus d’impact, etc. Leur nature profonde joue un rôle lors de notre influence. En effet, si cette personne a bon fond, une muse pourra l’inspirer dans les plus beaux poèmes. En revanche, s’ils ont mauvais fond, cette influence aura un mauvais impact. Même si nous essayons de doser, certains humains tournent malheureusement mal.

« Leur humeur varie, et avec elle, leur réceptivité aux influences de ceux qui les entourent. Mais parfois, un humain peut être bloqué dans ses émotions, figé dans une couleur qui l’empêche de s’ouvrir. C’est là que nous intervenons. Nous allons voir ensemble comment guider ces âmes, comment transformer leur couleur pour les amener là où nous le souhaitons.

Les Muses avaient une âme bleue, les Naturels une âme verte, les Cupidons une âme rouge… Chaque membre jouait un rôle crucial dans la vie des humains, mais celui qui avait le plus d'impact était la Mort. Forcément, c’est d’eux que tout commençait. Ou se terminait, en fonction des points de vue.

Durant le reste du cours, il nous expliqua les couleurs de chaque membre ainsi que celles des humains. Ce cours-là me semblait beaucoup plus simple que celui de Madame Brindillovan, sur lequel j’eus la sensation que j’allais avoir du mal.

Au fur et à mesure que les explications se succédaient, une question persistait dans mon esprit : jusqu’où allait notre pouvoir sur les humains ? Et sur nous-mêmes ? Le libre arbitre semblait n’être qu’une illusion, un mirage dans un monde où le destin semblait écrit d’avance. Même mon père, que je savais ne pas être un fervent admirateur du Grand Conseil, ne les avait jamais défiés. Pourquoi ? Pourquoi obéissait-il à des règles qu’il détestait tant ?

Mon regard se perdit dans l’espace un instant. Je n’avais jamais eu le choix. Tout avait été tracé pour moi depuis mon plus jeune âge. « Je t’interdis de créer des liens, fils. N’oublie jamais que tu ne peux pas. Ne te mêle pas aux humains, c’est dangereux… Dangereux. Obéis-moi et tout se passera bien… Tout se passera bien… », les paroles de mon père résonnaient encore dans mon esprit, comme une boucle sans fin.

Au diable tes conseils, Papa !

Je n'avais aucune envie de me laisser engloutir par ces pensées. Après tout, être La Mort, c'était un destin incroyable, non ? Une place d’honneur. Un rôle unique.

— Monsieur Occis, vous rêvassez ? s'écria Monsieur Tantum, frappant violemment sur mon bureau.

Je sursautai. Un rire éclata dans la salle, et je me redressai immédiatement.

— Désolé, Professeur, murmurais-je, embarrassé.

Heureusement, la cloche sonna, marquant la fin du cours. Comme un signal de libération, je me levai à la hâte et évitai le regard scrutateur de Monsieur Tantum.

— Alors, Matt, on écoute plus le cours ? me lança Melvin, sa main se posait sur mon épaule.

— Non, j’étais juste… Distrait, répondis-je, tentant de me redresser et de cacher mon malaise.

— Distrait… répéta Melvin d’un air songeur, lointain.

— Laisse-le respirer un peu, Melvin, tu l’étouffes avec ton gros bras ! s’écria Mirabella, sa voix remplie de vivacité.

Melvin la regarda, amusé, puis pencha la tête de côté avec un sourire malicieux. Célestin arriva à nos côtés, demeurant silencieux.

— Ce que je retiens, c’est que tu trouves que j’ai un bras musclé, répliqua Melvin, sa moue taquine sur les lèvres.

— J’ai dit gros, pas musclé ! protesta-t-elle.

— Oh, mais merci Bella, c’est vraiment gentil, se délecta-t-il, savourant chaque mot.

— Ne m’appelle pas comme ça ! Gronda Mirabella, une lueur de colère dans les yeux.

Melvin leva les mains en signe de paix, et retirait son bras de mes épaules pour me faire face directement.

— Ne t’en fais pas trop, Matt. Si tu as besoin de parler, je suis là.

— S’il cherche de l’empathie, je doute que ce soit vers toi qu’il faille se tourner, lança Mirabella, une pointe de sarcasme dans sa voix.

— Et visiblement, pas vers toi non plus, répondit Melvin, un sourire narquois aux lèvres.

Il me fit un clin d'œil et s’éloigna, laissant derrière lui un air de défi.

— Il y a une tension électrique entre vous, dis donc, se moqua Célestin, un sourire taquin sur les lèvres.

Mirabella lança un regard noir à Célestin.

— Redis ça encore une fois et je te jure que je me débrouille pour trouver une Arracheuse et venir te débusquer ! menaça-t-elle.

Célestin ne put s'empêcher de rire, et je me joignis à lui, emporté par l’atmosphère de camaraderie.

— Franchement, vous trouvez pas qu’il est bizarre ? s’écria Mirabella, l’air soudainement très sérieux.

— Non, répondis-je, bien que je ne sois pas certain de qui elle désignait.

Elle secoua la tête, exaspérée.

— Vous les hommes, vous êtes vraiment aveugles, ma parole.

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