Chapitre 9 (8/9)

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Je me retrouvais à présent dans une manifestation. Je sentais les passants me bousculer. Hurler des mots contre le système. Certaines pancartes évoquaient le groupe des « Anges Noirs ». Marie avançait avec énergie, des larmes coulaient sur ses joues. Mes yeux étaient embués. Mes pieds me faisaient un mal de chien. Marie était sûrement là depuis des heures.

— Les Anges Noirs contre Xander ! Les Anges Noirs contre Xander !

— À bas l’immortalité, déchéance de l’humanité !

Tandis que Marie militait, entourée d’autres âmes, je sentais le creux qu’elle avait en elle. Cette impression de n’être rien. Inexistante. Cela me fit penser à mon père et à toutes ses années de solitude.

Soudain, la scène se figea. Tous les mouvements étaient suspendus, même ceux des oiseaux dans le ciel. Monsieur Rhânlam apparut à mes côtés.

— Alors, ça avance ?

— Oui. Je me sens pas vide d’énergie comme les fois précédentes.

— C’est que ton corps s’habitue. Tu as une petite idée de la manière dont tu dois procéder ?

— Non…

— Viens.

Je le suivis et nous tournions autour de Marie. Je constatais à présent que des larmes avaient séché sur ses joues. Le professeur fit un geste de la main et redonnait vie à la scène. Cette fois-ci, je pus observer librement les alentours, je n’étais plus lié à Marie. Le professeur se plaça derrière son buste et approcha sa bouche de son oreille.

— Tout va bien, respire. Calme-toi, prends une grande respiration. Tu te sens légère désormais. Toute ta peine s’envole.

Ensuite, il se tourna vers moi.

— Notre boulot, c’est ça : soulager les âmes en peine. Nous sommes la petite voix qui murmure dans leur tête, qui les aide à ajuster leurs pensées, à leur donner quelque chose à quoi se raccrocher. La promesse d’un renouveau. Pour rendre l’âme blanche, tu devras effacer toutes les scènes, supprimer les sentiments. Pour cela, tu peux circuler dans le défilé d’images. Mettre sur pause, rembobiner…

— Rembobiner ?

— Oui, pour chercher des indices, pour comprendre d’où vient le traumatisme. Les âmes critiques demandent des recherches plus approfondies, plus minutieuses. Notre rôle est de trouver ce qui coince et de le supprimer. Ainsi, l’âme aura plus de facilité à redevenir blanche. Observe autour de toi, écoute ton cœur, celui de l’âme à qui tu es liée. Ici, vois-tu pourquoi elle est malheureuse ? Pourquoi elle se sent si lourde ?

— Elle est amoureuse de son amie d’enfance, mais elle ne lui a jamais avoué.

— Oh si, elle finira par lui dire. Ce n’est pas ça. Je pense que le traumatisme vient de ses parents. Mais si cette âme est encore dans les cas critiques, c’est que je n’ai pas non plus trouvé la solution.

— Ce sont vos cas qu’on étudie ?

— Tout à fait. Si jamais tu as des idées, je suis preneur. Un regard supplémentaire est toujours bon à prendre.

— On ne travaillera pas sur des âmes simples ?

— Quand vous devrez apprendre d’autres choses, si. Les âmes critiques sont un bon exercice. Ça vous prépare vraiment à ce qui va arriver par la suite. Ce que je vous demande ici, c’est de travailler votre regard, votre sens de l’analyse. Je vais te montrer.

Il fit un geste de la main, les propulsant de nouveau dans la scène du dîner.

— Tu vois la manière dont Marie tient la main de Sybille ? Elle s’accroche à elle comme une bouée de sauvetage ; comme si elle voulait s’échapper de ses sentiments ravageurs. Et regarde Sybille, elle l’agrippe, de peur de la perdre. Au fond d’elle, elle sait que Marie est toujours amoureuse de Sandrine et que ce sentiment ne la quittera jamais. Toutes deux s’aiment, pour des raisons différentes, mais leur relation était belle. C’est dommage que Marie n’ait jamais pu oublier Sandrine.

— Comment voyez-vous tout ça ?

— Tu ne vois pas la vapeur qui s’échappe d’elles ? La couleur de leurs âmes ?

— Non…

— Avec de l’entraînement, tu verras. Sinon, regarde simplement les yeux de Marie. Regarde comme ils brillent, comme ils sont toujours impressionnés, désireux.

J’étais bouche bée. Tout ce que parvenait à voir Monsieur Rhânlam en un seul coup d’œil… C’était impressionnant. J’espérais devenir aussi bon que lui un jour.

Le professeur me ramena à la scène de la manifestation. Je repensais à ce que disaient les pancartes, sur les « Anges Noirs ». Je lui demandais s’il savait ce que c’était.

— C’est un groupe de rebelles qui lutte contre l’oppression humaine. Il paraîtrait même que ce mouvement aurait été repris par les Altruistes, pour lutter contre le Grand Conseil.

Je lui lançai un regard en biais, mais ne réussis pas à capter son regard.

— Bon, c’est terminé pour aujourd’hui, me lança-t-il.

Il claqua dans ses mains et on se retrouva de nouveau dans la salle de classe.

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