Chapitre 20 ~ Le badge (5/5)
Sans m’en apercevoir, je m’étais rapproché d’elle. Au fond de moi, je sentais comme une envie de proximité. Comme une envie de…
Je secouais la tête.
— J’ai fait quelque chose qu'il fallait pas ? me demanda-t-elle soudainement.
— Quoi ? Non, pourquoi tu penses ça ?
— J’sais pas. T’as voulu partir subitement, alors je me demandais…
Mes yeux s’arrêtaient sur sa bouche délicate. J’avais envie d’en connaître le goût… Non, ce ne serait pas correct, je ne devais pas, je ne pouvais pas.
— Non, je suis simplement fatigué de ma journée, mentis-je en détournant les yeux.
C’était étrange ce silence qui s’installait entre nous, comme s’il y avait des choses qu’on voulait se dire, sans pouvoir le faire. Je la raccompagnais à sa chambre pour m’assurer qu’elle fût en sécurité. Parce que, malgré tout, j’avais envie de prolonger cette soirée à ses côtés. Si j’avais pu ne jamais la laisser, je l’aurais probablement fait. Mais la vie était faite ainsi, et je ne pouvais rien y changer.
Sa main frôlait la mienne. Si je bougeais ne serait-ce que d’un millimètre, je pourrais m’en saisir. La caresser du bout du pouce. Sentir sa chaleur. Mais, je n’en fis rien. Je me contentais de marcher sans un mot.
Une fois devant sa porte, elle tourna la poignée puis se tourna vers moi, hésitante.
— Merci pour cette soirée…
— Merci à toi, répondis-je.
Son regard était fixé sur l’ouverture de sa chambre. Comme si un combat intérieur la tourmentait.
— Tu veux entrer ? finit-elle par me demander.
Sa vapeur m’entourait, resserrant son étreinte autour de moi. Même si j’avais envie de poursuivre cette soirée, de rester près d’elle, je ne le pouvais pas. J’avais été trop égoïste avec elle, faisant passer mes envies avant la raison. Avant la normalité. La Mort et une humaine… Qu’est-ce que j’avais pu être stupide ! À quel moment m’étais-je dit que c’était une bonne idée ?
Alice avança vers moi, son regard planté dans le mien. Elle attendait ma réponse. Son corps n’était qu’à quelques millimètres du mien. Sa bouche était entrouverte. Ses cheveux étaient en pagaille, résultat du léger vent extérieur.
Je laissais glisser mes yeux sur son cou, ses clavicules… Puis j’observais la tâche sur son gilet, toujours présente. Qu’est-ce que j’avais envie de la plaquer contre le mur, là, tout de suite. Passer mes mains dans ses cheveux, sentir sa bouche sur la mienne. Ses mains sur mon corps.
Non. Ce n’est pas possible.
— Peut-être une autre fois. Je devrais aller me coucher, je suis vraiment HS.
Je fis semblant de bâiller. J’étais ridicule. Seulement, je n’avais pas d’autre choix. Alice m’attira contre elle et referma ses bras autour de mon buste. Sa chaleur m’envahit, contrastant avec ma froideur légendaire. Je sentais l’odeur de ses cheveux. C’était un supplice.
Pour me donner du courage, je fermais les yeux. Après avoir déposé un baiser sur sa tempe, je défais son étreinte et partis sans un mot de plus. Je sentais son regard se poser sur moi avant d’entendre sa porte se refermer.
Une fois arrivée dans ma chambre, un léger détail me revint en tête.
— Mais quel con !
Le badge. Le. Putain. De. Badge. C’était l’occasion rêvée pour le récupérer. Le lui voler. Mon désir m’avait fait perdre de vue l’élément essentiel : la protéger. Qu’est-ce que je pouvais être stupide ! Comment j’allais faire, maintenant ? Si j’entrais dans sa chambre, je ne tiendrais pas cinq minutes. Pourtant, je n’aurai pas le choix. Il fallait à tout prix que je récupère ce foutu badge avant qu’elle ne mette en action son plan suicide.
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