Chapitre 28 ~ Idylle (3/4)

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— Alice ? Tu dors ?

— Oui, grogna-t-elle.

— Réveille-toi…

Avec la douceur d’une plume, je la secouais.

— Matt… Il est… — De ses yeux plissés de fatigue, elle regarda l’heure sur son Platphone — deux heures du matin.

— Et alors ? On est jeune, on est fou ! Allez, lève-toi.

Sans attendre sa permission, j’allumais ma lampe de chevet tandis qu’Alice se redressait en grognant. Avec la mollesse d’un paresseux, elle enfila son t-shirt.

Les jours étaient passés sans que je puisse me résoudre à la quitter. Nos sentiments étaient si forts, si présents… Je ne pouvais plus m'en passer. Avec elle, je me sentais vivant. Comme une drogue, je n'arrivais plus à arrêter ma consommation. Sa peau, son parfum… Son âme. Qui m’enivrait, chaque fois que nous fusionnions.

Pourtant, je devais agir. Le test avec Madame Brindillovan était dans trois jours, et j’étais le pire élément de l’université. Si je ne faisais rien, je cesserais d’exister. Dans tous les cas, je quitterai Alice. Que ce soit par une rupture ou par la mort.

Comme elle cherchait son pantalon, je l’attrapai sur le bord du lit et le lui tendis.

— Qu’est-ce qui s’passe Matt ?

— Viens, on sort.

— Quoi ? Mais t’as vu l’heure ? T’es fou, j’sors pas moi.

— Allez ! S’il te plaît.

Je lui fis des yeux de biche, auxquels je savais qu'elle ne pourrait pas résister. Elle prit un air exaspéré. Un soupir s’échappa d’entre ses lèvres tandis qu’elle enfilait son pantalon. Elle se vêtit de mon gros sweat gris qui traînait sur ma chaise de bureau.

Avec la grâce d'un félin, nous sortions dans la nuit.

— Ça caille, grogna Alice.

Je lui souris avec amusement, humant l'air frais. Ça faisait tellement de bien de sortir, de s’aérer l’esprit. Ces derniers temps, j’angoissais à tel point que mon sommeil s'était fait rare.

— Tu trouves pas que ça fait du bien ?

— Quoi ?

— De se sentir vivant. De faire ce qu’on veut quand on veut.

— C’que je voudrais faire là, tout de suite, c'est dormir, râla-t-elle de nouveau.

— Mais tu ne pourrais pas admirer cette vue.

Je l’attrapai et la serrai contre moi avant de déposer un baiser sur son front. Le froid la fit frissonner, alors je resserrai mon étreinte, dans l'espoir de lui apporter de la chaleur.

— Ouais, enfin cette vue, on l’a vue mille fois.

— Elle n’a pas la même saveur quand je suis avec toi.

Alice me jeta un coup d’œil en biais, avant de m’adresser un sourire léger. Elle déposa sa tête contre mon épaule.

Le campus était désert. Seul le ronronnement léger de la circulation vibrait entre les bâtiments en contrebas. Le vent émit un léger sifflement, comme pour me rappeler mon dilemme.

Je sentis Alice bouger, et l’observer bâiller à s’en décrocher la mâchoire. Je savais qu’elle était fatiguée, mais je voulais égoïstement passer ces derniers moments avec elle.

— Bon, plus sérieusement, Matt, qu’est-ce qu’on fait là ?

— Demain sera une lourde journée. J’ai une décision à prendre qui changera ma vie. En négatif…

— Qu’est-ce que tu racontes ?

Je gardais le silence, fixant un point imaginaire. Je posais mon menton sur son crâne, sentant son parfum délicat. Puis, je la serrais fort contre moi, pour m’ancrer dans ses bras.

Si seulement je pouvais te garder ainsi toute ma vie… Je t’aime tellement…

— Tu veux pas qu’on rentre ? lança-t-elle, inquiète. C’est pas rassurant, toute cette pénombre.

— T’as confiance en moi ?

— Oui, répondit-elle sans hésitation.

— Alors ne t’en fais pas, je ferai tout pour te protéger, mon amour.

Je lui fis des petits baisers sur le visage.

— En étant là contre toi, j’ai l’impression qu’il ne pourra jamais rien nous arriver…

Elle resserra son étreinte.

— J’aimerais tellement figer le temps, qu’on reste là à tout jamais. Dans cette lumière magnifique. Avec ton visage d’ange. Et que plus rien ne bouge à part nous. J’aimerais vraiment avoir ce pouvoir.

Je laissai un soupir s’échapper. Je relevai ma main, observant ma bague. Depuis quelques jours, mon âme ne faisait que fluctuer. Du gris clair, elle était passée au violet foncé, pour prendre une couleur rouge foncé, couleur du sang. Ou bien, couleur de mon destin. Tout ça parce que j'étais trop faible pour quitter Alice.

Je soufflais de frustration. Pourquoi ne pouvais-je pas avoir les deux ?

Si nous étions mortels, je pense que j’aurais provoqué un infarctus au pauvre Monsieur Rhânlam, qui avait découvert avec stupeur le résultat de mon âme ce matin. Sa peau avait blanchi, au point que j’eus peur un instant qu’il ne tourne de l’œil. Et je vous assure que, faire blanchir une peau hâlée, ce n'était pas si évident. Pourtant, j’avais réussi cet exploit. Son regard s'était durci, et il m’avait pointé du doigt avec fermeté. Chose que j’avais rarement vue chez lui jusque-là. Quand il avait posé ses yeux sur moi, j'y avais senti toute sa détresse. Ça m’avait mis une claque.

Pourtant, j'étais encore là, dans les bras d’Alice, incapable de mettre un terme à notre idylle. Je la tenais de toutes mes forces, comme si elle pouvait m'échapper en un instant d’inattention. Les larmes montaient en moi, je m’efforçais de les contenir.

Alors, j’attirai Alice contre moi, l’embrassant avec urgence. Je caressais son visage du bout des doigts, comme si j’allais la casser.

— Je t’aime… murmura-t-elle, comme si elle avait peur que le monde l’entende.

— Je t’aime aaussi,Alice…

Putain…

Mon cœur se fissurait lentement, sachant que je ne pourrais plus jamais être aussi heureux qu’à cet instant. Que ma vie serait hantée par son souvenir. Que plus rien n’aurait de valeur sans elle à mes côtés.

J’embrassais sa joue, son cou, puis de nouveau sa bouche. Avec toute la tendresse que j’étais capable de lui témoigner. Elle frotta sa joue contre la mienne avant de prendre ma main dans la sienne. Puis, elle déposa un baiser sur mes doigts. J’en voulais encore. D’elle. De nous. Mais je savais que ce ne serait bientôt plus possible.

— On y va ? fit Alice. Faut que je me repose, demain, j'ai un examen que je peux pas louper.

Je soupirai. Bien sûr, elle avait raison. Moi aussi, j’avais besoin d’être en forme. Je l’embrassais encore une fois, profitant de la saveur de ses lèvres tant que je le pouvais encore. Puis, j’accédai à sa requête, et lui fis signe d’avancer.

Quand nous fûmes de retour dans ma chambre, je m’allongeai contre sa peau chaude, la serrant avec force. Profitant une dernière fois de mon bonheur. De son odeur. De sa présence. Avant que la R.D. vienne me chercher.

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