12 juillet, Konya

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Avons-nous changé de pays ? La ville de Konya, plus ostensiblement musulmane, indique un net glissement vers une autre civilisation. Désormais, beaucoup d’hommes ont laissé pousser la barbe et toutes les femmes portent un hijab. L’Europe et l’Asie ne se superposent plus ; le bras long de l’Occident n’atteint pas ces zones, on a basculé du côté de l’Orient.

Corollairement, Konya est envahi par un autre genre de tourisme, une effervescence arabo-musulmane, une foule exaltée qui se presse au cœur de la ville afin d’y faire son pèlerinage. En cause : le mausolée de Rûmî qui trône là depuis huit cents ans. Rûmî, lumière du soufisme, soleil devenu souffle, inspiration mystique et transcendante, miroir de l’Homme de tous les temps, parole aurifère, amour de l’Amour, océan de poésie dans lequel se baigneront des générations de croyants et de non-croyants de tous les coins du monde… Quoi de mieux, pour entourer ce mausolée, que des parterres de roses de couleurs et de variétés multiples ? Afin d’y pénétrer, il convient d’enfiler des couvre-chaussures jetables en plastique bleu, ce qui n’égale en rien le charme bigarré de la roseraie. À l’intérieur, l’affluence est énorme, et l’on avance à tout petits pas jusqu’au sarcophage de Rûmî. C’est le temps qu’il faut pour admirer les calligraphies ottomanes. Brève piété des pèlerins lorsqu’ils s’avancent au plus près du tombeau pour se recueillir, paumes ouvertes, en marmottant toutes sortes de prières. En tant que non-croyant, il m’est très difficile de goûter la puissance de leur joie, mais j’essaie tout de même. Je repense à l’héritage de Rûmî, père de ces derviches tourneurs dont la pratique spirituelle, encore aujourd’hui, consiste à tourbillonner pendant des heures afin de gagner la transe et le divin. Les derviches tourneurs, érigés de nos jours en vedettes des campagnes publicitaires en faveur du tourisme en Turquie, n’en incarnent pas moins le message intime de Rûmî. Parvenir à se confondre au ciel. On tourne, on danse, on virevolte, on s’élève, on fusionne, on ensoleille, on vertige et l’on redescend de son petit nuage – un peu comme ces pèlerins qui sortiront bientôt du mausolée dans un état nouveau, comme rassasiés d’amour et de spiritualité.

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