16 octobre, Schlitz (sixième woofing)

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Pays de cultures et de pâtures, où la présence humaine est paysanne. Ici des céréales, là des plantes fourragères… Marie dit qu’elle a vu des colchiques d’automne en fleur, derrière la colline. Un champ mauve. Une hallucination ? Conduisant notre engin, je ne peux tourner la tête. Au bout du village, une ferme et sa cour intérieure, où je gare Bucéphale. Et ce pied que nous posons par terre, dans ce lieu qui sera pour nous le dernier woofing, la dernière grande escale. Il paraît qu’on y élève des vaches et des chèvres en suivant les enseignements de la biodynamie – nous allons voir ça de plus près. Dörte et Jens, nos deux hôtes, ont de ces airs d’emprunt qui se veulent tranquilles et joyeux, mais qui, si l’on s’y attarde un peu, ne sont que fatigue et soucis. Tous deux sont plutôt petits, peut-être un mètre soixante et un mètre soixante-dix. Mais robustes et gaillards, des bourreaux de travail. Leur tignasse est poivre et sel, et je leur donne environ quarante ans. Dans leur maison, cette odeur de renfermé, légèrement rance. L’odeur de chez mes grands-parents bretons. Leur boutique est attenante au corps de ferme ; à l’intérieur, il n’y a pas de vendeur ou de vendeuse ; un écriteau indique simplement les prix pour la viande, les œufs, les légumes ; le ou la cliente additionne à l’aide d’une calculatrice et met son argent dans une boîte en fer, avant de repartir avec ses courses.

Derrière la longère, une emblavure, un champ de blé tendre appartenant au voisin, qui le pulvérise de glyphosate. Au reste, il refuse d’échanger ses terres contre celles de Dörte et Jens, qui sont pourtant limitrophes à sa ferme, et d’une superficie plus grande ! Au diable la logique, et le poison pour nous.

Notre première tâche, en cette fin d’après-midi, consiste à reconduire le troupeau d’oies dans leur roulotte, afin d’éviter que les renards ne les croquent. À notre approche, elles s’égosillent, ouvrent en grand leur bec jaune, et n’en finissent pas de nous montrer les dents. Leurs longs cous m’effraient quand ils s’allongent, elles peuvent à tout moment vous mordre alors qu’elles semblent hors de portée. Quand le jars déploie ses ailes, on dirait Lucifer en costume blanc. Allez zou, dans la roulotte ! Ces oiseaux-là ne m’avaient pas manqué.

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