Là où je t’attends
Elle s’appelait Liora, un nom doux comme le murmure des feuilles sous la brise. Chaque soir d’hiver, quand la neige étouffait le monde et que le silence couvrait la vallée, elle montait seule sur la colline des vents. Là-haut, entre les sapins figés et les pierres glacées, elle chantait.
Sa voix portait loin, comme si les montagnes elles-mêmes retenaient leur souffle pour l’écouter. Ce n’était pas une chanson joyeuse, ni une complainte de tristesse pure — c’était un mélange des deux. Une prière. Un souvenir.
Elle chantait pour lui. Pour celui qui était parti un soir, avec un sourire aux lèvres et la promesse de revenir. Il s’appelait Ael. Il avait les yeux couleur de l’hiver et le cœur brûlant d’aventure. Il était parti vers le nord, plus loin que les cartes, là où le ciel touche la terre et où les aurores naissent.
Il n’était jamais revenu.
Les autres l’avaient oublié, l’avaient déclaré disparu, l’avaient enterré dans leurs silences. Mais pas elle. Pas Liora. Chaque nuit d’aurores, elle revenait, parce qu’il lui avait dit, une fois :
"Quand tu verras danser les aurores, pense à moi. C’est là que je serai le plus proche."
Alors elle venait, et chantait.
Et ce soir-là, les lumières étaient plus vives. Le ciel s’ouvrit comme un rideau, laissant tomber une cascade de verts, de roses, et d’or. Les aurores semblaient l’écouter aussi, tournoyer lentement au rythme de sa voix.
Et soudain, entre deux ondulations célestes, elle crut le voir. Une silhouette, debout, loin, sur la crête opposée. Il ne bougeait pas, mais il était là.
Elle s’arrêta de chanter, le cœur suspendu.
Le vent souffla doucement. Une bourrasque lui apporta un parfum oublié, celui de la mousse froide et de l’écorce de pin. Le parfum de ses bras.
Elle sourit à travers ses larmes.
Il n’avait peut-être jamais quitté le nord. Il était peut-être devenu une partie du ciel, une brise dans les arbres, une lumière dans les aurores.
Et tant qu’elle chanterait, il reviendrait, un peu, chaque nuit.
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