Chapitre 22 : Un malheur en entraine un autre

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 Je m’assis près de son corps inerte et me mis à crier d’effroi :

– Avorian ! Non ! Je vous en supplie… réveillez-vous ! Vous avez réussi, la tornade est passée !

 Mais aucun de ses membres ne répondait à mon appel. Je me mis à sangloter. Une nouvelle fois, Avorian me sauvait la vie au détriment de la sienne. Sans lui, je ne pouvais rien accomplir sur cette planète étrangère. Quelle injustice ! Il était bien plus utile que moi dans ce monde de magie.

 J’essayais de lui faire boire l’eau de ma gourde, gardant espoir au fond de moi.

 Il ouvrit enfin ses paupières.

– Vous êtes vivant ! claironnai-je en le serrant dans mes bras.

– Eh… doucement, fit-il d’une voix rauque. Évidemment que je suis vivant ! Rappelle-toi : je suis le dernier survivant du peuple des Enchanteurs et le seul à pouvoir t’apprendre notre magie ! J’étais juste épuisé. Nous avons réussi… c’est ce qui compte.

– Non, vous avez réussi, rectifiai-je. Merci pour tout.

– Tu te trompes. Sans ton bouclier, le mien n’aurait jamais tenu. Il était étonnamment solide pour quelqu’un qui ne s’est jamais servi de ses pouvoirs. Bravo !

 Nous nous observâmes un long moment et je lui tendis ma gourde. J’aimais tant contempler l’éclat de ses beaux yeux gris.

 Il but à grosses gorgées et me confia :

– Kiarah… j’ai bien peur que cet ouragan n’ait rien de naturel. L’air était particulièrement calme juste avant. Quelqu’un le dirigeait, c’est certain. Nous sommes encore en danger.

– Je suis sûre que c’est Sèven…

 Je ne pus terminer ma phrase, une violente tempête de sable s’annonçait déjà. Et cela non plus n’avait rien de naturel.

– Non mais je rêve ? m’indignai-je. Un ouragan et maintenant, une tempête ? On est maudit ou quoi ?

– Au moins, nous sommes fixés : quelqu’un s’en prend vraiment à nous !

 Avorian, à peine remis sur pieds, tomba sous la force du vent. J’essayais tant bien que mal de le soutenir, mais la prodigieuse puissance des rafales m’en empêchait. L’Enchanteur se releva enfin avec difficulté. Il était pratiquement impossible d’avancer. Nous faisions du « surplace », les bras repliés devant nos visages pour nous protéger des éclats de sables. Malgré cela, nous en avions partout : dans la bouche, les yeux, sur tout le visage, dans les cheveux. Je n’arrivais presque plus à respirer. Le vent soufflait si fort que j’avais l’impression de m’envoler. Je ne voyais plus rien, pas même où se trouvait Avorian. Heureusement, ce dernier me prit par la main pour ne pas me perdre. Nous luttions ensemble contre le blizzard.

– On ne peut plus avancer ! criai-je avec une main devant ma bouche pour ne pas avaler trop de sable.

 Le bruit infernal des bourrasques me sifflait dans les oreilles. À chaque fois que j’inspirais, j’ingurgitais du sable, que je recrachais en expirant, et cela me piquait horriblement la gorge. J’avais le sentiment d’étouffer.

– Je vais creuser un trou dans le sable, cela nous protégera de la tempête le temps qu’il faudra ! s’égosilla Avorian qui ne parvenait plus à marcher.

 Il prononça des paroles dans la langue des fées et fit un geste de sa main libre – celle qui ne serrait pas ma main. Une cavité bien solide et assez large pour deux personnes apparut alors devant nous.

Décidément, que ferions-nous sans la magie ! remarquai-je intérieurement.

 Je m’installai avec difficulté dans notre caverne de fortune. J’aidai Avorian à s’y mettre, il paraissait extrêmement épuisé. Il usa de ses dernières forces pour créer une sorte de bouclier afin de reboucher le trou et ainsi empêcher le sable d’entrer. Guidée par mon instinct, je consolidai notre porte transparente en créant un deuxième bouclier.

 Je me reposais un peu dans les bras d’Avorian, bien qu’il me fût impossible de m’endormir en de telles circonstances. Nous attendions que la tempête se calme un peu. À mon grand étonnement, je m’assoupis tout de même un instant. Toutes ces mésaventures m’avaient complètement vidée.

 Lorsque je me réveillai, le bruit du vent avait cessé. Avorian dormait encore profondément. J’hésitais à le réveiller pour repartir et quitter au plus vite ce maudit désert, mais je souhaitais qu’il recouvre ses forces. Il avait dépensé tant d’énergie pour nous sauver : je lisais la fatigue sur les traits de son visage.

 Heureusement, le choix me fut épargné, il s’éveilla.

– La tempête s’est calmée, lui annonçai-je.

– Il faut partir, s’enquit Avorian, les idées à peine en place. Nous avons perdu bien trop de temps. Buvons un peu et allons-nous-en.

– Il serait plus sage de vous reposer encore un peu.

– Ici ? Hors de question !

 Je ne pus réprimer un rire nerveux.

  Nous repartîmes dans le désert en quête d’eau. Nous marchions lentement sous l’écrasante chaleur du soleil, le dos courbé. Malgré nos chaussures, le sable nous brûlait les pieds et les chevilles. J’attrapai un châle beige dans mon sac et l’enroulai autour de moi pour me protéger des rayons cuisants. Avorian m’imita en plaçant un turban sur sa tête. Je m’inquiétais pour lui. Il paraissait éreinté.

 J’avais l’impression d'absorber du feu à chaque bouffée d’air. Je ne voyais nulle autre trace de pas hormis les nôtres dans le sable. Pas même une empreinte d’animal. À l’évidence, même si la tempête venait de tout effacer sur son passage, aucune créature n’osait s’aventurer dans cette fournaise. Exceptés nous, les téméraires.

Combien de temps allons-nous tenir ainsi ? déplorai-je. Nous avions beau être plus résistants que des humains, l’eau commençait cruellement à nous manquer. Pourtant, toujours pas d’oasis à l’horizon. La langue et la gorge desséchées, nous progressions péniblement sur ce sol instable qui semblait vouloir avaler nos pieds.

Enfin… un dicton sur Terre affirme tout passe, rien ne demeure. Sauf la soif, quand elle n’est pas étanchée ! maugréai-je intérieurement

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