Chapitre 46 : renaissance.

5 minutes de lecture

 Nous nous mîmes tous les trois autour de l’arbre. Avorian sortit la Pierre des Enchanteurs de sa cachette. Il la tenait toujours contre son cœur, comme le plus précieux des trésors. Sa couleur carmine scintillait et jurait avec ce paysage morbide.

– Kiarah, prends-la dans tes mains. Cette Pierre représente l’histoire de ton peuple, et elle t’a choisie comme héritière, déclara Avorian d’une voix solennelle.

 Intimidée, j’ouvris mes mains et la Pierre de Vie vint s’y poser d’elle-même, lévitant jusqu’à moi. Elle tenait parfaitement dans mes paumes. Lorsqu’elle toucha ma peau, je fus surprise par sa chaleur. Une énergie à la fois vigoureuse mais rassurante m’envahit. Un halo pourpre m’entoura pour tournoyer autour de mon corps. Je respirai profondément. J’avais l’honneur de découvrir un peu plus la Pierre de mon peuple.

 Avorian plaça ses paumes sous mes mains afin que nous puissions tenir ensemble notre joyau, et ainsi unir nos forces. Ce geste m’émut. Je ressentais combien ce moment était important, et même sacré pour lui. Je calmai toutes mes craintes, oubliant l’affreuse vision du Modrack. Orialis nous observait, le visage serein.

 Avorian et la Noyrocienne prononcèrent une incantation sacrée connue de tous les Orfiannais, dans la langue des fées. Comme j’ignorais la signification, l’Enchanteur me traduisit :

    Pierre de Vie, joyau de notre peuple,

    Que ta lumière éclaire nos âmes,

    Que ta puissance répare ce qui a été brisé, et embrase l’ombre

    Puisse ta magie rayonner, telle une flamme

     Et ta pureté sauver notre monde


  À la fin de la prière, Avorian me demanda de me concentrer, et de canaliser mon pouvoir dans mes paumes afin qu’il éveille notre trésor. Je sentis la magie affluer dans mes mains. Une lueur pourpre sortit alors de la Pierre de Vie et se dirigea vers l’arbre. Elle l’entoura complètement puis pénétra son tronc. Je maintenais ma concentration afin de ne pas rompre le sort. Petit à petit, l’aura violette disparut, et la couleur noire du tronc commençait à virer au brun. L’arbre semblait reprendre vie. Ses branches s’animèrent, comme si une brise silencieuse les parcourait. Il renaissait de ses cendres. Émerveillée, je découvris de petits bourgeons en train d’éclore sur ses ramures. La force de notre amour enveloppait cet être majestueux et apportait un peu de sérénité en ce lieu. Je souhaitais au plus profond de mon cœur que notre magie bienveillante inonde toutes les terres des Enchanteurs.

 Une heure plus tard, après cette belle cérémonie, nous décidâmes d’utiliser le pouvoir de la Pierre sur le reste de nos terres. Avorian et moi discutions de la manière de procéder, quant Orialis nous interpella :

– Oh ! Regardez là haut !

Dans le ciel, je distinguai au loin une sorte d’oiseau qui volait à très grande vitesse vers nous. Mais en l’observant de plus près, je compris qu’il s’agissait du lion ailé, celui qui m’avait sauvé la vie dans l’église.

 Le Limosien se posa gracieusement sur ces pattes, juste devant nous. Il secoua avec élégance ses longues ailes argentées.

– Ah ! Tu ne pouvais pas tomber mieux Swèèn, dit Avorian avec un large sourire. Mon vieil ami, je suis tellement heureux de te revoir, et bien plus encore en cet instant : nous venons de réveiller l’arbre sacré !

 J’étais pour ma part soulagée de voir Avorian se remettre si vite de ses émotions, et ravie de pouvoir contempler son visage rayonnant.

– Merveilleux ! Je n’en attendais pas moins de vous ! Bonjour Avorian, bonjour Kiarah. Et… mes salutations, chère inconnue.

 Swèèn regarda Orialis. Il parlait toujours avec cette étrange voix double, au timbre androgyne.

– Mes respects, noble Limosien. Je m’appelle Orialis. Je suis si honorée de vous rencontrer ! Depuis le temps que je rêvais d’en voir un ! C’est incroyable, jamais je n’aurais cru avoir cette chance, quand mon père saura cela !

– Qu’y a-t-il, Orialis ? demandai-je, surprise par la réaction de celle-ci.

– Kiarah, dans ce monde, les Limosiens sont très rares. Ils sont respectés et vénérés tels des dieux. Ce sont de nobles créatures, et c’est un immense privilège de pouvoir en rencontrer un jour, m’expliqua Avorian.

 Orialis se mit à genoux pour se prosterner devant le lion ailé.

– Enfin… voyons, relevez-vous, ma chère ! Vous allez me faire rougir… c’est trop d’honneur ! Vos antennes risquent de se plier et de s’endommager dans cette posture. Déjà qu’elles ont l’air mal en point, remarqua Swèèn.

– Puis-je… pourriez-vous… enfin, j’aimerais…, bredouilla la Noyrocienne.

– Eh bien, que voulez-vous donc, ma chère ? Vous pouvez tout me demander, dit Swèèn avec douceur.

– Puis-je vous câliner ?

– Mais bien-sûr ! Avec joie ! On ne demande que ça, nous, les Limosiens ! Mais les gens s’évertuent à se comporter de manière prévenante, distants, comme s’ils nous craignaient, quel dommage !

 Avorian me souffla à l’oreille que les Limosiens étaient en effet aussi crains que vénérés en raison de leurs immenses pouvoirs. Orialis s’empressa alors d’aller caresser le Limosien, qui poussa une sorte de grognement proche du ronronnement d’un chat. J’éclatai de rire et vint la rejoindre pour câliner notre peluche vivante. Swèèn semblait ravi d’être ainsi choyé. Après cette embrassade, il reprit son sérieux.

– Le Royaume du Cristal m’envoie vous chercher.

– Comment nous avez-vous trouvé ? demandai-je, surprise.

– Ah ! Vive la télépathie ! J’ai senti les pensées d’Avorian. Il faut dire qu’elles étaient particulièrement chargées en émotions ces dernier temps. Un jeu d’enfant !

– C’est incroyable…, soufflai-je, admirative.

– Quelle chance avons-nous de t’avoir, petit porte-bonheur ! Tu nous facilites la tâche ! s’exclama Avorian, satisfait.

– En fait, nous voulions utiliser le pouvoir de la Pierre des Enchanteurs pour redonner vie à nos terres, complétai-je. Nous venons tout juste de réanimer l’arbre sacré avec.

– C’est une excellente initiative ! Je ne supporte pas ces petits êtres aux yeux jaunes et vermeils qui nous épient sans cesse ! Cependant, votre projet est sacrément ambitieux…, nous prévint Swèèn.

– Mais nous voulons essayer, insistai-je.

– Qui ne tente rien n’a rien ! renchérit Avorian.

– Puisqu’on a réussi pour l’arbre, alors pourquoi pas pour le reste ? fit valoir Orialis.

Devant nos visages si enthousiastes, le Limosiens ne pouvait qu’obtempérer.

– Très bien. Je vais vous aider. Mon pouvoir vous sera utile.

 Nous remerciâmes Swèèn en le câlinant de plus belle.

– Cela me donne une idée…, pensai-je tout haut. Swèèn, je vais avoir besoin de votre aide. Est-il possible de monter sur votre dos et nous envoler ?

– Mais bien-sûr ma chère Kiarah, j’allais te le proposer.

– Peut-être qu’en prenant de la hauteur, il sera plus facile d’utiliser la Pierre et de reverdir nos terres sur un plus large périmètre !

– La première fonction de nos Pierres est de donner vie, après tout, ajouta Orialis.

– Effectivement, son action portera à plus grande échelle, confirma Avorian. Kiarah et Swèèn, vous opérerez d’en haut avec la Pierre. Orialis et moi resterons au sol pour canaliser son énergie et répandre son pouvoir le plus loin possible.

 Avorian me lança un coup d’œil et sourit. Il semblait avoir rajeuni d’au moins dix ans !

Annotations

Vous aimez lire Ayunna ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0