L'erreur

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Je ne ferme pas les yeux. Je n'y arriverai pas, de toute façon. Je n'y arriverai jamais. Pas après avoir reçu ce message.

Je ne me posait pas de question, et je n'en demandais la réponse. Je n'arrive pas à me ressaisir, au bord du gouffre interminable du deuil, de la tristesse.

Dans quatre semaine j'allais devenir orphelin, et ma sœur aussi. J'allais devoir vivre sans mon unique mère que j'avais abandonné hier matin.

Il était minuit, pourtant je n'arrivais pas à passer à côté de la nouvelle.

La faucheuse doit sûrement s'apprêter à la faire mourir. Elle aiguisera sa lame pendant quatre semaines. Sera-t-elle généreuse ?

Elle sera peut-être rayée de la liste. Personne dans l'Enfer ne sera qu'elle n'est pas morte.

Aurais-je la chance d'assister à la première erreur commise par la Mort ?

Je devrais faire jouer au loto ma mère, si c'était le cas. Aura-t-elle des séquelle si elle réussit à survivre ?

Elle n'y parviendra pas.

Il me suffit d'une micro-seconde pour retomber dans ma profonde tristesse.

Rien ne changera. Ni le temps,  ni la situation.

Je me réjouis de ne pas avoir quelque-chose de tranchant. Sinon, j'aurais sûrement fait le pire.

J'imagine déjà les coupures, la douleur, le sang emplissant la pièce, les cicatrices cachées. Des douleurs anciennes pour en créer des nouvelles.

Est-ce que je me donnerai la permission ? Non. Je n'ai pas envie de partir avec ma mère en laissant Lyr' de côté.

Je ne peux pas l'infliger ça. Je ne peux pas NOUS infliger ça.

Certaines personnes défaitistes interrompraient en disant que des milliers de personnes meurent par jour, et qu'ils ne voient pas pourquoi ce serait si indifférent.

Je n'aimerais vraiment pas avoir ce putain de défaitiste avec moi.

Je me sentais mieux d'avoir quitté l'enfermement du berceau de ma mère. Son corps décide de la faire disparaitre pour toujours dans quatre semaines.

Je pourrais encore la voir. La voir ? Voir son corps. Sa tombe. Cette pierre dont l'inscription sera disparue elle aussi dans une centaine d'années.

Son argent ? Je m'en fiche de son héritage. Je sais très bien que tout l'argent du monde ne fera pas revenir ma putain de mère.

Si seulement. Si seulement je ne la quitterais pas le jour même où on apprend qu'elle va mourir.

Mais bon. Avec des "si", on refait le monde.

Essayons de rester pour le moins...calme. Prendre des déscisions sur lesquelles j'aurais des séquelles irréversibles serait un acte irréfléchi, et je n'ai pas envie de finir au paradis ou en enfer jusque la fin des temps. Pas si tôt.

Je peux encore rester en vie. Le choix n'existe pas pour ma mère. Je peux donc honorer le mien en vivant le plus longtemps possible. Je dois rester en vie.

00h23

Lyra

Il y a de l'agitation dans la "chambre d'ami" d'Ez, mon petit frère. Il doit sûrement douter à mon amour pour lui.

J'aurais dû lui faire plus de place dans ma vie.

Je reçois une notification : un prank disant que ma mère a une tumeur et qu'elle va mourir dans quatre semaines. Je rigole un peu nerveusement.

Ma mère a toujours eu une excellente santé. Ils auraient dû choisir la bonne personne. Je bloqué et signalé comme spam.

J.ai un étrange pressentiment en cet instant  exact. Comme si j'ai fait le mauvais choix. Impossible !

Elle a trente neuf ans. Elle ne meurt pas.

Je soupire. J'avais l'impression qu'un truc me faisait arrêter de respirer.

Je reçois un message d'Ez. C'est le même que j'ai reçu. Je lui envoie :

00h26                                                                          « Toi aussi tu l'as reçu ?»

Il l'a directement lu. 

—————————···········—————————

Ezren

00h30

Le manque de respect de ma sœur...est tel que je doute d'elle. Je crois qu'elle prend la nouvelle difficilement.

Elle m'a répondu très froidement, tout de même. Peut être pour cacher la peine que ça lui ferait ?

Il faudrait que je lui repose la question. Non, une autre question. Une question plus plausible.

Est-ce qu'elle est triste ? Voilà ma question.  Je n'ai pas envie de définir si elle reste froide devant le compte à rebours de la mort de ma mère.

Je commence à l'écrire, avec hésitation. J' écrit.

"Toi aussi tu es triste ?"

J'attends maintenant. Une minute. Toujours rien. Est-elle vraiment la gentille sœur ? Deux minutes. Enfin une réponse.

"Pas vraiment" La mort de sa mère et elle lâche un "Pas vraiment" ?

Je suis pris d'une tristesse aussi grande que ma colère. Je sors de ma chambre. J'ai peur de rencontrer ce monstre qu'est Lyra.

Je prend mon sac. La lourdeur de cette peine se transcrit dans la lourdeur de mon sac.

Je traverse le couloir me séparant de cette porte. Je le vois comme un couloir sans vraie fin, menant vers une vie meilleure, mais je n'en vois jamais la sortie.

J'arrive à sortir. Je regarde derrière moi. J'espère ne jamais revoir cette porte de cette couleur ternie par le temps.

Je descend les étage, à une vitesse bien supérieure. Je préfère fuir le tout. Je n'aurais plus de maison, mais je serais libre. Libéré de ma sœur. Pas de la mort de ma mère.

Je passe la porte de l'appartement. Je voudrais bien le voir être démoli sous mes yeux.

Je cours sur le trottoir, jusqu'à être assez loin pour maintenant essayer de trouver un refuge. Là où je serais en sécurité.

Je vois une maison. Une maison non mitoyenne. C'est la seule. Je vais voir si je peux rentrer.

Je toque à la porte. Une porte sombre, mais qui évoque la lumière, la libération. Je me réjouis. Encore faut il qu'ils m'ouvrent.

C'est ce qu'ils firent. Ils m'ouvrir, avec un visage désapprobateur.

Je regarde. Je regarde partout. Une femme, sûrement mère d'un fils, je lui donne mon âge.

Ce fils, c'est un fils des plus appréciable. Les traits de son corps se voient comme des lignes de poésie, on voit dans ces lèvres des explosions de rouge coquelicot, dans sa peau je vois sa couleur neutre de partout.

Je commence.

-Bonjour. Je voulais fuir ma vie, ma mère m'inscrivant dans un centre d'activités, où je pouvait me faire torturer des heures, affinant de plus en plus la ligne entre la vie et la mort. J'ai été me réfugier chez ma sœur, et j'ai sûrement eu la pire nouvelle de ma vie. Celle du compte à rebours de quatre semaines de ma mère. Ma sœur est restée insensible à ça et...

C'est bon, je craque. Je pleure dans des chaudes larmes jusqu'à ce que je baigne dans cet océan de pleurs.

-Entre. Mon fils a vécu la même chose que toi dans un centre. Restes aussi longtemps que tu veux.

J'entre. J'espère que je garderais avec moi la compagnie de ce fils.

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