Chapitre 1 - L'épreuve (1.1 Le grand jour)

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Le noir, une odeur âcre. La peur lui donne envie d’uriner. Puis, deux yeux immenses d’un rouge vif comme deux flammes prêtes à la consumer apparaissent dans la pénombre. Face à cette petite fille de tout juste trois ans. Au moment où le regard de braise s’approche de son visage dévoilant une tête monstrueuse de félin à la gueule carnassière, l’envie de l’enfant colore le sol et ses vêtements d'une mare jaunâtre. C’est sûr, c’est elle qui va se faire dévorer.

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Akma se réveille en sursaut, le front couvert de sueur. Encore ce cauchemar… Cela va pourtant faire douze révolutions que cela s’est passé, elle n’est plus la petite fille apeurée.

Aujourd’hui, elle doit devenir une Saïban. Deux jours d’épreuves pour sélectionner ceux qui pourront prétendre à rejoindre les rangs de l’armée ; puis une série de combats pour déterminer la troupe d’affectation. Plus le candidat remporte de victoires, plus sa section sera prestigieuse et Akma souhaite le meilleur pour V’andale. Elle doit donc viser les troupes d’élite si elle veut lui offrir un habitat digne de ce nom.

La jeune fille, qui vient de fêter ses treize printemps, se prépare comme elle le fait depuis plusieurs années déjà : revêtir sa tenue de cuir souple, mettre sa ceinture arborant un Saïban et son felidien, attacher ses cheveux d’ébène formés de petites tresses en une longue natte (aucun cheveu ne doit venir gêner sa vue), prendre contact avec V’andale pour qu’elle soit alerte à son arrivée.

V’andale, prépare-toi, l’épreuve commence bientôt et nous devons être prêtes en avance.

— Mmmh, j’aurais aimé finir de déguster ma proie mais si je suis trop lourde je risque de perdre de mon agilité, je serai prête pour passer l’épreuve.

— Je compte sur toi.

Sur cet échange, Akma sort de sa chambre pour se rendre auprès de V’andale. Elle arrive à l'Antre où les felidiens résident lorsqu'ils ne sont pas en exercice ou partis en chasse. Il s'agit d'une immense caverne creusée directement dans la roche de la montagne attenante où les humains ont excavé des niches pour chaque résident. Les troupes d'élite habitent de vastes niches dans des antres voisins où chaque felidien dispose d'un espace pour lui seul ; les autres partagent souvent leur place avec un frère d'armes.

L'adolescente retrouve sa sœur, c’est comme ça qu’elles ont choisi de s’appeler même si ce n’est pas commun pour un felidien et un humain. Akma ne peut s'empêcher de l'étreindre, enfonçant sa tête dans la dense fourrure fauve, provoquant un ronronnement caverneux de la bête au rythme de la courte queue rayée de noir et de blanc qui virevolte en tous sens. Elle est presque cachée dans cette masse imposante qu'est V'andale avec ses cinq mètres de hauteur au garrot. Lekchi qui passe à cet instant pour se préparer aux sélections ne peut s’empêcher de la railler :

— Encore en train de vous faire des papouilles. Vous feriez mieux de vous préparer au carnage qui nous attend. Votre relation n’est vraiment pas saine, beuark! !

Akma s’est habituée à ses remarques. Elle a appris à contrôler son envie de lui coller son poing dans la figure. Les bagarres répétées n’ayant en rien arrêté les moqueries mais l’ayant trop souvent privée de souper. V’andale la rassure aussitôt :

Ne t’inquiète pas, je n’en ferais qu’une bouchée aux duels. Ça lui passera l’envie de se moquer !

— Si on arrive jusque-là mais je n’en doute pas avec toi à mes côtés.

— Je sens que tu es inquiète malgré tout. Tu t’es dépassée comme personne, moi je n’ai aucun doute, nous irons dans les troupes d’élite.

— Je ne sais pas si je m’habituerais un jour à la confiance que tu as en mes capacités mais oui, je me suis entrainée comme personne, je ne lâcherais rien.

Au début, elles avaient souffert de tout partager ainsi en pensées mais cela faisait si longtemps maintenant. Elles étaient très jeunes lorsque la connexion s'était faite, que désormais elles trouvaient cela tout aussi naturel que de respirer.

Akma vérifie le petit habitacle qui vient se sangler sous le corps de V’andale et où elle prendra place. Son amie est tellement grande, que des escabeaux et plusieurs palefreniers sont nécessaires à son installation. Lorsqu’elle a contrôlé l’état du matériel, deux écuyers la rejoignent pour fixer ensemble la nasse. Puis, Akma prend ses armes, une dague et un gantelet armé de trois griffes rétractables, qu’elle doit toujours porter au cas où l’habitacle viendrait à être arraché. Aux entrainements, cela n’est encore jamais arrivé, mais la prudence est gage de survie. Enfin, elle prend place sous le corps de sa compagne. Elle est dotée de quatre pattes massives pourvues de griffes acérées qu'elle passe plusieurs heures par jour à affuter. Sa large tête est pourvue d’une mâchoire aux dents aiguisées, d’une truffe et de courtes vibrisses noires. V’andale possède un œil rouge vif et un autre bleu azur, tout comme Akma. La fusion entraine toujours l’apparition d'yeux vairons : celui rouge sang du felidien et celui de la couleur de l’élu.

Fin prêtes, la peur émerge en elles mais depuis tant d’années, elle est devenue leur compagne et l’excitation prend rapidement le dessus.

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