CHAPITRE 19 : ET SI DEMAIN EXISTAIT

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Je tourne la clé dans la serrure, pousse la porte et pénètre dans une obscurité épaisse. Le couloir s’étire devant moi, long, étroit, sans fin. Un tunnel noir, où l’espace se déforme, s’allonge, absorbant la réalité, comme une œuvre de Bao Vuong, où le noir n’est pas une absence, mais une matière qui engloutit tout.

Mes pas n'avancent pas, comme si la distance restait figée, suspendue dans une boucle infinie. L’absence de lumière me prive de repères, l'effet de profondeur joue avec ma perception, donnant l’impression d’une échappatoire tout en se dérobant sous mes pas.

Soudain, un frisson me traverse, parcourt ma nuque. Un froid intense né au creux de mon être, s’insinue dans ma chair, s’étire jusqu’à mes os, se répand comme une ombre, reflet du néant. Tel un aveugle, j'avance à tâtons. Mes doigts effleurent un mur impersonnel, rugueux. Il est mon fil conducteur, ses aspérités me rattachent à une réalité tangible. J’appuie plus fort, je vérifie mon existence. Ne serait-ce qu’un mirage ?

Un espace sans frontières, sans fin, où chaque pas mène vers une vacuité qui s'amplife sans cesse. Ma respiration est lourde, hachée. L’air semble se refermer sur moi, comme si la pièce elle-même cherchait à m’étouffer, à me dissoudre dans la perspective infinie du crépuscule.

Lentement, je traverse ce boyau sombre et me dirige vers ma chambre. Ce n’est plus mon refuge, juste une transition vers une autre absence, une pièce qui ne promet rien d’autre qu’un prolongement de cette œuvre silencieuse qui m’engloutit.

Atteignant mon lit, je m’assois en tailleur, le corps lourd. Dans le vide de mes heures consumées, plus aucune substance, seulement une absence cruelle dévorant chaque pensée, chaque sensation, absorbant jusqu’à la moindre trace d’existence. Implacable : je ne suis rien. Je reste là, immobile, jambes croisées, mains posées sur mes genoux. La pièce est muette, l’air y est lourd.

Le vide s’immisce sous ma peau, s'empare de mon ventre,envahit ma poitrine. Plus rien ne bouge. Le temps reste figé. Et pourtant, je suis là… non pas existante, mais corps, enveloppe posée sur un siège. Si rien n’existe, pourquoi cet espace, ce souffle, cette attente ?

Puis soudain, comme un bourdonnement tenace, ce martèlement sourd, cette rumeur intérieure qui s’installe, lancinante, un flot de sons indistincts, des résonances internes frappent contre mes tempes, imposant leur tempo implacable. Des voix, murmures, jugements.

— Maraboutée...

— Plus un poil sur le caillou...

— Sorcellerie.

Un miroir brisé, des mèches éparpillées au sol. Un rire moqueur, une main qui arrache mes barrettes. Puis, au milieu du tumulte, une phrase douce. Un souffle d’enfant.

— Ne pleure pas, Kalia...

Je ne devrais plus être là. Mes doigts glissent sur le drap, le froissant, cherchant désespérément une prise, une attache.

— Pourquoi t’obstiner ?

Ma voix intérieure me répond, furtive, tranchante, Impitoyable.

— Tu n'es qu'un souffle insignifiant. Un grain de poussière dans un univers qui n’a jamais eu besoin de toi.

Je fixe un point invisible sur le mur. Et Dieu alors ? Je redresse la tête, mes yeux fatigués s'égarent sur le plafond, cherchant un signe, une lumière, une réponse qui ne vient pas.

— Tu le sais bien. L’espace respire le manque. Pas de main tendue ici. Pas de pardon. Juste l'abîme.

Mon souffle devenir erratique, un tressaillement parcourt ma nuque.

— Tu l’as toujours ressenti, depuis le début.

MIAOU !!! Douchka saute sur le lit, ses yeux orange braqués sur moi. Je cligne des paupières, décontenancée.

— Tu cherches des réponses là-haut ? Elles sont là, devant toi. Regarde-moi.

Une brûlure enserre ma tête. Rien ne m’appartient et si, en tant qu’être, je n’appartiens à rien, mon existence a-t-elle un sens ?

— Une vie sans poids. Regarde autour de toi. Personne. Pas un souffle. Juste toi et cette nuit qui s’effondre.

Je baisse la tête, mes épaules s’affaissent, mon souffle ralentit. Douchka me frôle, son pelage tiède contre ma peau agressée. Je frissonne.

— Et pourtant, tu es là. Tu respires. Ta main me touche. Je suis réelle, et toi aussi.

Ma main se referme doucement sur son pelage, comme un dernier lien. Des miaulements impatients me renvoient à la réalité.

— Douch’... Que t’arrive-t-il ?

MIAOU ! MIAOU !

REGARDE-MOI

— Mais que fais-tu ? Veux-tu descendre de cette balustrade ?

— Admire l’artiste ! Je suis une chatte acrobate. La classe non ?

Je me dirige vers elle avec milles questions.

— Comment fais-tu pour avoir un tel équilibre ? Être capable de sauter sur un espace aussi restreint ? Est-ce le fait d’avoir sept vies qui te permet une telle arrogance ?

Les deux mains agrippées à la balustrade, je plonge le regard vers l'avant, cherchant un peu d’ancrage. L’air semble plus dense, il glisse le long de mes bras, comme un appel subtil. Je me penche doucement, attirée, aspirée par cette force invisible.

Le gouffre me fascine, m’hypnotise, me happe, son emprise silencieuse s’étire jusqu’à ma poitrine. Une sensation étrange, presque délicieuse dans sa douleur comme un élan il m'entraîne.

Pourquoi cette envie de plonger, ce désir irrépressible de m’abandonner à une chute infinie ? Peut-être est-ce une façon de savoir si je suis vivante.

Je serre un peu plus fort la rampe, mes doigts se crispent sur le métal glacé, s’y accrochant comme une dernière tentative de contrôle, une résistance face à cet appel sourd qui résonne en moi.

Et si c’était une manière de défier mes démons, d’affronter mes angoisses, de mesurer mon courage, de repousser mes limites, d’aller au-delà de mes peurs ?

Mon souffle hésite, ralentit puis s’accélère, mon cœur cogne dans ma cage thoracique, mes jambes vacillent, une brève perte d’équilibre, une inclinaison imperceptible.

— Liberté de l’existence !

— Non, mais regardez-moi ce bipède ! Miaou, miaou… Tu crois pouvoir défier la gravité ou jouer avec l’apesanteur ?

— Laisse-moi tranquille, je réfléchis.

La liste de mes échecs défile, en moi, la faille s’élargit, s’amplifie, chaque mauvais choix est inscrit avec une précision cruelle, un enchaînement inéluctable.

Je n'ai pris que de mauvaises décisions. Ma naissance fut une erreur. Quelle idée saugrenue a eu ce spermatozoïde de franchir la ligne en premier, s’imposant comme une fatalité, devenant malgré lui le messager d’une vie que je n’avais pas demandée.

Neuf mois plus tard, une entrée en scène que j'aurais aimé magistrale, qui n’était qu’une absurdité déguisée en miracle biologique. Dès mon premier souffle, une exigence s’est imposée à moi, un besoin vital qui ne relevait ni du choix ni du désir mais d’une nécessité incontrôlable, et c’est sur son ventre que je me suis laissée porter, comme si dès cet instant, j’avais compris que l’équilibre serait fragile, tout reposait sur des doutes dont je ne serais jamais maîtresse.

N’était-ce pas là déjà un signe contestataire d’un nourrisson face à sa mère ? À moins que cela soit le refus de son image ? Ou plus encore ! Un pur et simple rejet à vouloir enfanter un jour ?

— Tu es en plein délire !

— Et attends, que penser de plus… Une coïncidence étrange, celle de pousser mon premier cri au même moment que la sortie du trente-trois tours de Gainsbourg : L’année érotique. Un titre dont je n’aurais eu que la consonance, sans en saisir ni le sens ni l’essence.

À bien y réfléchir, je pourrais classer cette période dans la catégorie rocambolesque, un instant de vie aussi absurde qu’imprévisible. Mais que devrais-je dire ? Je suis née au fond d’une cave froide et humide avec en guise de couffin du sable sale, au milieu de trois frères et sœurs !

— Certes, mais tu as reçu l’amour…

Moi, celle que l’on a d’abord associée à l’image de son père, j’ai eu le bonheur de recevoir toutes les faveurs et l’amour de mon entourage, et peut-être même celui de ma mère, un amour discret mais bien présent, une chaleur qui m’enveloppait sans que j’aie à la réclamer.

Très vite pourtant, cette douceur s’est envolée, une place devait se libérée à l’arrivée de mon frère, et moi, sans bruit, j’ai glissé vers un territoire inconnu, celui de l’ombre et du silence. Pauvre petit frangin… Bouuuh… Lui qui, à ses yeux, était le mal aimé de tous, celui qu’elle a couvé, cajolé, veillé, favorisé, peut-être même étouffé, dans un excès de protection qui semblait dicté par une seule idée :

— Le rôle d’une mère est de protéger le plus faible.

Une lame invisible effleure ma nuque, descend le long de ma colonne, tandis qu’un picotement amer s’installe dans ma gorge. L’abandon s’insinue, discret, comme une fissure sous la peau — une trace qui ne s’efface pas, une morsure silencieuse. Déjà, l’amour s’efface, et avec lui naît une fragilité que personne ne voit. Une solitude s’installe, tenace, et je n’ai plus la force de la repousser.

— Bon, je te le concède, ce n’est guère enthousiasmant ni encourageant. Mais, regarde, à présent, tu as un magnifique enfant.

— Oui, j’ai un superbe garçon. Mais il fut le fruit d'un choix précipité, une rencontre d'un soir que j’aurais dû éviter. Je ne serais pas tombée bêtement dans les bras d’un homme qui, par lâcheté ou par mépris, avait déjà pris la décision de me tourner le dos, alors que la vie en moi prenait lentement place.

Moi qui ne rêvais que d’amour et de partage… Cinquante ans de sueur, de peur et de pleurs, pour offrir un lendemain plus serein à mon fils avec qui je n’ai eu pratiquement aucune communion, une distance insidieuse qui s’est installée sans qu’on ne puisse la réparer. Encore une option déplorable, qui, jusqu’à présent, m’arrache les tripes. Une mère par procuration ! Chapeau, la mère…

J'ai décidé de mettre de côté ma vie de femme, repoussant mes désirs, oubliant mes besoins, sacrifiant tout, pour, un beau matin, me réveiller, regarder dans le miroir et constater que j’avais vieilli. Comme un appel intérieur, j’ai voulu replonger dans un nouvel amour, après dix-sept ans de solitude, pour en ressortir avec un visage tuméfié, brisée sous les coups d’un homme que je croyais être là pour le reste de ma vie.

Pourquoi continuer ? Pourquoi ne pas simplement stopper ces douleurs, effacer ces blessures ? Ne serais-je pas plus en paix, enfin libérée de toutes mes erreurs, mes noirceurs ? Si je saute, adieu souffrances, frayeurs, terreurs, pleurs.

Qui viendra s’inquiéter d’une pauvre cinquantenaire ?

Et si je me rate ? Non… pas à cette hauteur. Cet échec est inenvisageable, pas un de plus ! Mon choix est fait. Une vie traversée par tant d’erreurs, de doutes, de confusions, une moitié d’existence à se battre seule, à endurer plutôt qu’à vivre.

Je passe une jambe par-dessus la balustrade, une onde glaciale me traverse, longeant ma colonne vertébrale, ma peau réagit sous l’air nocturne, comme un dernier signal d’alarme, un réflexe primal qui tente de me retenir. Je ne regarde pas en bas. Mon corps vacille, un déséquilibre imperceptible qui s’amplifie, mes jambes tremblent, mon souffle se brise, l’air peine à entrer dans mes poumons.

je suffoque légèrement, une pression se referme sur ma poitrine. Moites, mes mains glissent, leur prise sur la rampe devient précaire, je serre mes doigts, mais ils n’accrochent plus rien, ils cherchent un point d’ancrage qui n’existe pas.

Je fixe avec intensité le sol bétonné de mon balcon, sa couleur grisâtre m’étouffe, m'absorbe, m' écrase, il me semble très loin, au fond de tout, audelà de tout.

Une larme roule sur ma joue, une chaleur fugace chassée par le froid, elle tombe lentement, s’écrase quelque part sous moi, un dernier témoin d’une hésitation qui vacille.

Je ne dispose que d'un infime espace pour poser mes pieds, mes orteils à peine posés sur l’arrête métallique, mon équilibre chancelant flirte avec l’inévitable, une danse incontrôlable entre la vie et la chute. Je tiens sur la pointe. Mon chausson dérape. Un battement de cœur suspendu, une seconde d’absence.


— ADIEU MON FILS !!!

À travers le garde-corps, je vois ma Douch’.

— Adieu Douchka.

— Eh bien, vas-y, saute.

— Tu arrives toujours au bon moment, avec les bras chargés de généreux conseils.

— Oui, montre-moi comment tu voles. Allez, vas-y.

Une pause, une attente sibérienne.

— Mais je te préviens… Dans l’éventualité d’un échec, toi seule en assumera les conséquences. Brisée, abîmée, handicapée pour le reste de ta vie.

Je retiens mon souffle.

— Je n'existe pour personne.

Silence.

— Bon, lorsque tu seras sortie de ta confusion mentale, je repasserai. Maintenant, je vais jouer sur ton clavier...

Soudain, un bruit sourd me tire brutalement de mon égarement, une percussion qui résonne comme une mise en garde, un rappel à l’ordre, une secousse qui traverse mon corps. Sans attendre, je franchis à nouveau la balustrade.

— Mon ordinateur Douch’ !

En récupérant mon PC sur le sol, j'aperçois un message.

— Coucou mon cœur. Comment vas-tu ?

Je sens mon souffle légèrement instable, comme si mon corps refusait de retrouver une sérénité totale.

— … Ça va…

Une pause s’étire, comme si le temps ralentissait, chaque seconde qui passe semble lourde d’attente. Puis il reprend :

— Je commençais à m’inquiéter. Que faisais-tu ?

Je plisse les yeux, mon esprit encore trouble, comme si une brume flottait devant mes pensées.

— Euh… Rien de spécial. Et toi ?

— Je pensais à toi.

Je reste silencieuse un instant, mon regard fixé sur l’écran, ressentant dans mon ventre cette tension qui refuse de s'évanouir. La voix de l’autre reprend, douce mais un peu pressée :

— Ah… Raconte.

— Je me disais que j’avais vraiment de la chance de t’avoir rencontré, voilà tout.

Un rire discret, un soupçon d’ironie traverse ma poitrine, comme une vague douce-amère.

— Ouais… Les vérités de La Palisse. Tu dois dire ça à toutes les femmes qui croisent ton chemin, non ?

— Non, ce que je dis est la vérité. Même si mon regard s’attarde parfois sur d’autres, mon cœur a fait son choix.

Un frémissement me parcourt, mon ventre se détend, et mon souffle s’apaise doucement, comme soulagé.

— Arrête, je vais finir par te croire.

— Tu peux. Je regrette de t’avoir demandé ce service hier, mais je n’avais pas d’autre option que de me tourner vers toi. Alla fine, spero che tu non sia arrabbiata ? Enfin, j’espère que tu n’es pas fâchée ?

— Cette langue ! Une merveille de mère nature.

Les mots surgissent avant même que j’aie le temps de les contenir, spontanés, impossibles à retenir. Je cligne des yeux, surprise, et un sourire se dessine face à ma propre étourderie.

— C’est oublié.

Mon esprit se détend, la chaleur revient doucement, douce comme une caresse rassurante.

— Dis-moi, tu aimes la montagne ? Tu sais skier ?

Un léger frémissement parcourt mes épaules, une douceur inattendue qui éveille en moi quelque chose de chaleureux, une vibration de plaisir simple.

— Je l’adore. Oui, j’ai su skier.

— Je vais te réapprendre.

Une lueur d’excitation monte en moi, une sensation nouvelle, presque agréable, qui fait vibrer tout mon être.

— Hein ?

Je réfléchis.

— Puisque l’hiver approche, je pensais qu’on pourrait louer un petit chalet.

L’idée me gagne, comme une tiédeur réconfortante qui dissipe le frisson du début.

— Ce serait génial ! Et si on y passait les fêtes ?

Je souris, déjà emportée par l’image de cette escapade féérique.

— Tu as une idée merveilleuse… Imagine : un chalet niché dans la montagne, lové entre les sapins, isolé du reste du monde. Pas un bruit, juste le murmure apaisant de la neige recouvrant tout, cette vue infinie qui s’étire jusque l’horizon.

Je frémis, captivée par cette image.

— Nous pourrions passer nos journées à explorer ces paysages grandioses, respirer cet air pur, glisser sur les pistes ou simplement marcher, bercés par cette quiétude.

Je regarde l’écran comme une enfant émerveillée devant un sapin de Noël, les yeux brillants.

— Et le soir, au retour, le feu dans la cheminée danserait lentement, diffusant une chaleur enveloppante. On s’y installerait sous un plaid, une tasse de vin chaud à la main, et par la baie vitrée, on observerait les étoiles qui scintilleraient dans le ciel.

Une sensation de bien-être m’envahit, comme si déjà je pouvais me laisser emporter dans cette scène enchantée.

— Rien que nous, une bulle hors du temps, un refuge où tout s’efface sauf nos deux cœurs.

— Ça me paraît si doux, si féérique, mais je n’ai jamais bu de vin chaud.

— Alors je te ferai découvrir.

L’image d’un feu de bois dansant, la chambre accueillante, la soirée paisible, commence déjà à s’insinuer en moi, comme une promesse délicate.

— Un rêve merveilleux.

— Non, tu verras. François a toujours tenu ses promesses. Quand il promet quelque chose, il ne lâche rien. Et puis, tu sais… elle t’aime déjà. Je lui ai longuement parlé de toi. Elle sait combien tu me rends heureuse. Je ne pensais plus pouvoir retrouver l’amour. Et puis tu es arrivé. Quelque chose de vrai, d’inattendu. Je suis heureux.

Une pointe d’émotion serre ma poitrine, et je suis frappée par cette pure vérité.

— Je ne peux pas imaginer ma vie autrement.

J’ai du mal à répondre tout de suite, mon cœur bat fort, une vague d’émotions me submerge, tout à la fois tendre, vive, incontrôlable.

— Oui, je ne te mens pas. Et si tu veux, un jour, on pourra faire une vidéo avec elle.

Je sens ce cocon protecteur qui m’enveloppe lentement, comme une bulle fragile et rassurante.

— J’en serais ravie.

— Elle a hâte de faire ta connaissance.

Je ressens en moi un léger battement, une curiosité mêlée à une tendresse nouvelle, qui s’installe doucement, sans que je m’y attende.

— Tu lui diras que moi aussi. Et que fait-elle en ce moment ?

— Elle est dans sa chambre, elle est déjà venue voir ce que je faisais. Je pense qu’elle commence à avoir faim.

Une scène douce, presque intime, surgit dans mon esprit.

— Alors, je vais te laisser pour que tu puisses lui préparer à manger.

— Puisque l’hiver approche, je pensais qu’on pourrait louer un petit chalet.

L’idée me réchauffe, comme un souffle tiède qui chasse l’ombre du givre.

— Ce serait génial ! Et si on y passait les fêtes ?

Je souris, déjà emportée par l’image de cette escapade féérique.

— Tu as une idée merveilleuse… Imagine : un chalet niché dans la montagne, lové entre les sapins, isolé du reste du monde. Pas un bruit, juste le murmure apaisant de la neige recouvrant tout, cette vue infinie qui s’étire jusque l’horizon.

Je tremble, captivée par cette image.

— Nous pourrions passer nos journées à explorer ces paysages grandioses, respirer cet air pur, glisser sur les pistes ou simplement marcher, bercés par cette quiétude.

Je regarde l’écran comme une enfant émerveillée devant un sapin de Noël, les yeux brillants.

— Et le soir, au retour, une cheminée crépiterait, diffusant une chaleur douce et enveloppante. On s’y installerait sous un plaid, une tasse de vin chaud à la main, et par la baie vitrée, on observerait les étoiles qui scintilleraient dans le ciel.

Une douce chaleur m’envahit, comme si déjà je pouvais me laisser emporter dans cette scène féérique.

— Rien que nous, une bulle hors du temps, un refuge où tout s’efface sauf nos deux cœurs.

— Ça me paraît si doux, si féérique, mais je n’ai jamais bu de vin chaud.

— Alors je te ferai découvrir.

L’image d’un feu de bois crépitant, la chambre chaleureuse, la soirée tranquille, commence déjà à s’insinuer en moi, comme une douce promesse.

— Un rêve merveilleux.

— Non, tu verras. François a toujours tenu ses promesses. Quand il promet quelque chose, il ne lâche rien." Et puis, tu sais… elle t’aime déjà. Je lui ai longuement parlé de toi. Elle sait combien tu me rends heureuse. Je ne pensais plus pouvoir retrouver l’amour. Et puis tu es arrivé. Quelque chose de vrai, d’inattendu. Je suis heureux.

Une pointe d’émotion serre ma poitrine, et je suis frappée par cette pure vérité.

— Je ne peux pas imaginer ma vie autrement.

J’ai du mal à répondre tout de suite, mon cœur bat fort, une vague d’émotions me submerge, tout à la fois douce, forte, incontrôlable.

— Oui, je ne te mens pas. Et si tu veux, un jour, on pourra faire une vidéo avec elle.

Je sens cette chaleur, ce cocon protecteur qui m’enveloppe doucement, comme une bulle fragile et rassurante.

— J’en serais ravie.

— Elle a hâte de faire ta connaissance.

Je ressens en moi un léger battement, une curiosité mêlée à une tendresse nouvelle, qui commence à s’ancrer doucement, sans que je m’y attende.

— Tu lui diras que moi aussi. Et que fait-elle en ce moment ?

— Elle est dans sa chambre, elle est déjà venue voir ce que je faisais. Je pense qu’elle commence à avoir faim.

Une scène douce, presque intime, surgit dans mon esprit.

— Alors, je vais te laisser pour que tu puisses lui préparer à manger.

Je soupire doucement — une retenue, un regret, une envie de rester encore un peu, de prolonger cet instant précieux.

— Oui, tu as raison, mais je n’ai pas envie de te quitter… Moi non plus. C’est comme si ce moment fragile, si délicieux, me faisait prendre conscience à quel point j’ai besoin de cette présence, de cette échappée.

— On se reparle demain.

— Et toi ? Qu’est-ce que tu vas faire ?

— Ben… je vais me coucher. Pourquoi ?

— Rien. Tu vas éteindre ton ordinateur ?

Je souris, surprise par cette question soudaine, et laisse échapper :

— Oui, pourquoi ?

— Parce que je ne veux pas que tu parles avec d’autres hommes. Internet, c’est dangereux.

Une palpitation intérieure m’enflamme, un mélange de possessivité et de tendresse dans ses mots.

— La jalousie de monsieur, hein ? J’adore.

— Oui, tu le sais.

Son ton est léger, caressant même, comme s’il voulait m’envelopper encore davantage, m’apaiser.

— T’inquiète, j’éteins.

— Bacio, mi cuore. Bisou mon cœur.

Je souris malgré moi, une étincelle de bonheur dans le regard.

— Bisou à toi aussi.

— À demain.

— Oui, à demain.

— Bisous.

— Bisous.

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