Début du stage

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Au QG des Space Rangers, le commandeur Rayzen venait de rejoindre son bureau, suivit de Syreene. Les deux agents étaient restés silencieux pendant le trajet et n’avaient échangés que quelques mots en entrant dans le bâtiment. Rayzen s’asseya sans rien dire et posa sa tête sur ses mains croisées. Syreene resta là, attendant patiemment.

Elle connaissait bien son ancien mentor et compagnon de mission. C’était dans ses habitudes de rester ainsi, à réfléchir. Généralement, c’était dans ces moments-là qu’il trouvait la solution à divers problèmes. Cependant, elle lui trouva une mine fatiguée. Il semblait avoir pris dix ans de plus en l'espace d'un mois.

— Est-ce que tu as des nouvelles de ta promotion de scouts ? finit-il par demander.

— Non, si ce n'est qu'ils ont bien reçu leurs armures et qu'ils sont partis pour Alkor. Ils ont dû commencer l'exercice à l'heure qu'il est.

— Je vois…

— Mais dis-moi, tu ne t'inquièterais pas pour ton élève, toi le maître d'arme sans cœur et sans pitié ? taquina Syreene.

— J'ai simplement peur qu'elle ne crée des problèmes…

— Pourquoi poserait-elle soucis ? Ce n'est pas son genre ! Au contraire, c'est même une jeune fille douée, disciplinée et déterminée. Certes, ce qui s'est passé le mois dernier au tournoi de fightball était très inconsidéré de sa part mais en dehors de cela, elle a toutes ses chances de réussir haut la main cet exercice.

— Tu ne la connais pas… elle attire les ennuis comme un aimant. C'est indépendant de sa volonté…

— Tu ne crois pas que tu exagères un peu ? Fais-lui un peu plus confiance à cet enfant ! Elle est capable de te surprendre, j'en suis sûre !

— Puisses-tu avoir raison… Quelles sont les nouvelles du front ?

— Rien de bien nouveau… les sans-lumières ont été repoussés des villes principales de Reygoria, tandis que Jycee est toujours en pourparlers pour que nous y installions une base d'opération. Et nous sommes à deux doigts de perdre Endorine. Nous y avons envoyé encore des effectifs mais au détriment d'autres mondes tout aussi en danger.

— Nous sommes débordés sur tous les fronts…, conclu Rayzen.

— Nous avons établi un ordre d'évacuation mais nous attendons encore l'aval du général. Il espère que nous pourrons arriver à repousser les assauts des sans-lumières mais la situation semble désespérée.

— Je vois…

— Qu’est-ce que tu vas faire, maintenant que tu es revenu ?

— J’ai encore mon enquête à mener. Je dois explorer les sous-sols de la ville.

— Encore au sujet de l’attaque pendant le tournoi ?

— Bien sûr. Je n’ai pas encore découvert ce que je cherche mais j’en suis à deux doigts.

— Et que cherches-tu ?

Rayzen se leva et ouvrit la fenêtre derrière son fauteuil puis alluma une cigarette.

— Je ne sais pas encore…

Galata et sa guide venait de longer une longue corniche rocheuse et légèrement friable, au risque de faire une chute de quinze mètres. Bien que remise de son accident, la jeune scoute ressentait un certain malaise, comme un vertige, dès qu’elle jetait un œil en bas. Le soleil tapait fort sur la paroi de pierre et les deux jeunes filles commençaient à être en nage.

De leur position, l’immense jungle s’étendait à perte de vue, comme une mer d’émeraude. Au loin, seuls les bâtiments du spatioport dépassaient la cime des arbres, ainsi que quelques montagnes rocheuses.

Durant le trajet, Galata comprit que le terrain était difficilement praticable à pied. Karine lui avait expliqué qu’aucun véhicule à roue ne pouvait s’aventurer dans la jungle et qu’après ce qu’il lui était arrivé, il valait mieux ne pas prendre le risque de repartir avec un drone volant. La jeune aventurière semblait dans son élément parmi ces arbres immenses, ces rochers pointus et ce sol dénivelé. Elle était d’une souplesse incroyable et possédait une énergie déconcertante.

Si un jour j’ai besoin de m’entrainer, je saurais où aller, pensa Galata en admirant chaque geste de Karine.

La corniche devint un chemin plus large, puis un sentier qui se mit à descendre en pente douce.

— Enfin ! soupira Karine en s’essuyant le front. Ce passage est toujours un peu difficile à faire, surtout par cette chaleur. Il n’y a plus que trois cents mètres à faire en ligne droite pour atteindre la porte de la zone.

— Super ! J’ai hâte de commencer enfin…

Karine ne la laissa pas finir sa phrase qu'elle se jeta subitement sur elle comme si elle voulait l’enlacer. Déconcertée, Galata ne sut comment réagir avant de tomber en arrière, poussée de force. Choquée par son attitude, elle la regarda faire quelques mouvements avec ses bras, l’un de ses bâtons dans la main avant de le pointer vers le ciel. Galata eut à peine le temps de voir un gros rocher au-dessus de leur tête avant de le voir exploser en morceau lorsqu’il toucha le bâton de Karine, provoquant un éclair éblouissant.

La scoute se protégea des éjections dont certains lui lacérèrent les bras en tombant.

— Pfiou ! soupira Karine en rangeant son bâton. Il s’en est fallu de peu…

— Co… Comment… ?

— Oh, c’est simple ! Il suffit de frapper au bon endroit pour faire éclater le caillou en morceau. Par contre, je ne sais pas comment il a pu se détacher… C’est bizarre ! Ne traînons pas, tu as assez perdu de temps.

Elle aida Galata à se relever, examina ses coupures qui étaient superficielles et se remirent en route. La jeune aventurière était cependant un peu inquiète. La roche par ici était du genre friable mais jamais un morceau aussi gros se serait détaché de cette manière. Il se serait désagrégé au fil du temps petit à petit…

Et si quelqu’un y était pour quelque chose ? L’idée la rendit nerveuse mais cela expliquerait l’incident de Galata. Quelqu’un lui en voulait-il personnellement ou bien était-ce au groupe de scout tout entier ?

Soudainement, ses sens repérèrent des bruits suspects à proximité. Quelqu’un les suivait et ce n’était pas un animal.

— Galata, écoute-moi, chuchota-t-elle. Tu vas continuer toute seule jusqu’à la grande porte, sans te retourner ni t’arrêter. Les gardiens là-bas sont prévenus, ils te laisseront entrer dès que tu y seras.

— Hein ? tu ne viens pas ? Qu’est-ce qui se passe ?

— Je sens qu’on est suivi et qu’on en a après toi. Surtout tu ne t’arrêtes pas et tu cours aussi vite que tu peux. D’accord ?

— Oui, mais… et toi ?

— Ne t’inquiète pas pour moi ! Personne n’a réussi à me battre jusqu’à présent, sauf les Space Rangers. Et ce n’est pas aujourd’hui que ça va commencer !

Elle lui fit un clin d’œil et lui fit signe de partir. Galata n’aimait pas la tournure que prenait la situation mais elle devait accomplir son stage et décida d’obéir sans poser de question. Elle s’élança le plus vite possible, droit devant elle, en priant que rien n’arrive à Karine.

Celle-ci avait dégainé ses bâtons et s’était mise en position de combat. Son ouïe aux aguets, elle savait précisément où se trouvait celui qui les suivait depuis un moment. Et possiblement celui qui avait envoyé ce rocher sur leurs têtes. Lorsque Galata partit en courant, l’inconnu en fit de même. Karine s’élança alors pour lui couper la route en frappant de ses bâtons là où se trouvaient ses jambes. L’inconnu esquiva avec aisance en sautant pour se retrouver sur la route. Karine fit rapidement demi-tour pour faire barrage entre lui et Galata.

Le mystérieux suiveur était habillé de la tête aux pieds d’une combinaison noire et d’un masque démoniaque sur le visage. Ses mouvements étaient souples, précis et calculé. Karine comprit que ce n’était pas un simple touriste et qu’il savait se battre mais ça ne lui faisait pas peur. Au contraire, cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était pas battue pour de vrai.

— Je peux savoir pourquoi tu nous suis ? lança-t-elle pour faire son travail. C’est toi qui as saboté le drone en plein vol ?

L’homme ne répondit pas. Voyant qu’elle s’interposait, il se mit lui aussi en position d’attaque.

— Très bien ! Si tu veux jouer à ça…

Elle s’élança vers lui, assénant plusieurs coups de bâton malheureusement esquivé par son adversaire. Il était d’une souplesse et une vitesse déconcertantes. Elle frappa sur les deux côtés mais il évita de nouveau en sautant en l’air puis la frappa de ses deux pieds joints sur son visage, l’envoyant à terre.

Karine se releva rapidement mais il avait disparu de son champ de vision.

Oh non !

Un bruissement de feuilles se fit entendre derrière elle. Karine eut juste le temps de voir venir son adversaire tenter de l’assommer d’un coup de coude dans la nuque pour l’éviter de justesse. S’ensuivit alors une série de coups de poings, manchettes et genoux de la part des deux combattants qui se contraient à chaque fois. Cependant, Karine dominait en vitesse et prenait le dessus en le faisant reculer. Ce qu'elle trouvait étrange, c'était qu'il parait ses coups de bâton avec ses avant-bras sans en ressentir de douleur. Ce type devait avoir reçu un sérieux entrainement militaire pour être aussi solide.

Ce dernier perdit patience face à ce petit jeu de bras de fer et bloqua ceux de Karine en les tenant fermement par les poignets. Celle-ci ne comprit pas comment il parvenait à réaliser ce tour de force. Il lui était impossible de se défaire, malgré sa technique de dégagement. C'était comme si elle était prisonnière d'un bloc de béton. Elle tenta de le frapper à la tête avec son pied mais il évita facilement et lui bloqua sa cheville entre l'oreille et l'épaule.

Comment il fait ça, lui ?

De toute évidence, il connaissait des techniques de combat très poussées. Réussir à la bloquer de cette manière relevait d'une grande maîtrise des arts martiaux.

Sans crier gare, il tourna trois fois sur lui-même sans lâcher sa prise, l'entrainant dans un tourbillon infernal avant de la lâcher subitement. Elle partit pour s'écraser contre un arbre de grande taille mais elle put se remettre en plein vol, posant ses pieds contre le tronc pour reprendre son élan et repartit en vrille vers son opposant, ses bâtons prêts à briser des os.

Mais le mystérieux combattant para de nouveau ce qu'aucun être humain n'aurait pu contrer. Il répliqua d'un coup de pied dans le ventre de Karine qui en eut le souffle coupé avant de retomber lourdement sur le sol poussiéreux du sentier.

—Argh ! Espèce de… !

Karine n'en revenait pas. C'était une guerrière d'Alkor, membre de la sécurité de la réserve. Une combattante aguerrie qui avait vaincu des tas d'adversaires sans problème jusqu'à aujourd'hui. Seuls des Space Rangers étaient capable de la mettre autant en difficulté. Et cet inconnu y parvenait avec tant de facilité…

Maintenant qu’elle y pensait, il avait une façon de se battre assez similaire mais il y allait avec plus de force et de brutalité. Si tel était le cas, elle n’avait pas le choix…

Karine se releva à l’aide de son bâton. Elle fixa son adversaire et se mit à émettre une sorte de grondement sourd venant du fond de ses entrailles. Ses yeux se révulsèrent, ses cheveux s’hérissèrent et ses muscles se mirent à tressailler. Son opposant écarquilla les yeux à travers son masque, se demandant ce qu’elle était en train de faire. Puis, elle émit un cri d’animal sauvage, fort et enragé, comme un énorme chat sauvage.

Karine partit en courant avec une vitesse accrue, déstabilisant son adversaire. Elle frappa avec plus de force, jonglant entre ses ongles, devenues presque des griffes, et ses bâtons. L’inconnu eut plus de peine à se protéger contre ces assauts répétés, son vêtement se déchirant sous les coups de serres de la sauvageonne.

On aurait dit une fille en pleine crise d’hystérie, n’ayant plus sa conscience humaine et ne laissant exprimer qu’une rage ancestrale, une fureur incontrôlée.

Au bout de quelques instants, elle réussit à frapper son adversaire sans qu’il puisse la contrer, d’un coup de paume sous le menton puis d’un revers de coude dans le ventre avant de finir par un coup de pied sauté. L’inconnu finit à terre, fortement secoué.

Karine émit un dernier feulement de chat enragé avant de reprendre ses esprits.

— Pfiou ! souffla-t-elle. Ça faisait longtemps… je n’aime pas user de cette technique mais devant un type pareil…

Elle appuya sur un bouton situé sur son bracelet et appela la base d’opération :

— Ici Karine ! Je viens de neutraliser un suspect au point K-6 B-8, à proximité de la porte de la zone d’exercice. Je demande des renforts, le suspect est dangereux !

Elle s’approcha ensuite de lui pour tenter de lui passer des menottes mais ce dernier la frappa au visage d’une manière traitre. Karine bascula en arrière, une vive douleur à la joue. Avant qu’elle ne puisse faire quoi que ce soit, l’inconnu était sur elle, une étrange aura démoniaque autour de lui et la frappa d’un seul coup contre la poitrine. La jeune aventurière eut le souffle coupé puis tout devint blanc autour d’elle, sombrant dans l’inconscience.

L’inconnu se releva, enleva son masque, dévoilant le visage d’un ado au visage ténébreux, ses cheveux noirs mi-longs tirés en arrière et ses yeux gris donnant un regard pénétrant et froid. Légèrement essoufflé, il s’en était fallu peu pour que cette fille lui fasse mordre la poussière. Sa technique de Berserker l’avait surpris et sans ses capacités, il n’aurait pas tenu bien longtemps.

Klyne se pencha sur elle, écarta une mèche de cheveux et l’observa un instant.

— Désolé ma jolie, mais je n’ai pas de temps à perdre avec toi…, souffla-t-il avant de se relever.

Il remit son masque et sauta dans les arbres en espérant rattraper Galata avant qu’elle n’atteigne la porte de la zone.

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