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 Une peur s’instille sous mon crane, où suis- je ? Pourquoi j’ai froid, si froid ? L’humidité glaciale plaque mes vêtements contre ma peau. J’ai mal à la tête, je vois flou. Que m’arrive-t ’il ? Mes doigts engourdis tâtent mon cuir chevelu, mes cheveux sont poisseux, collés. Je rapproche mes mains de mes yeux pour les examiner, il fait trop sombre pour distinguer quoi que ce soit.

 Une vague de panique me coupe la respiration. Je n’y comprends plus rien. Où suis-je bon sang ? Comment je suis arrivée là ? Doucement Ava, doucement. Ouvre grand les yeux, regarde autour de toi. Reste calme. Inspire…

 Que fais-je au sol ? Sur du béton froid et moite ? Me relever est douloureux, tous mes membres sont engourdis mais je suis d’une seule pièce. Une belle bosse sur mon crâne, du sang coagulé que j’ai cru deviner… C’est bien Ava, étape par étape encaisse la situation. Je suis vivante mais je suis où ? Allez, regarde autour ! Examine, touche, cherche. A tâtons je cherche à découvrir ce qui m’entoure. A quatre pattes, je parcours le béton et ses aspérités de mes dix doigts. La peur me tenaille. Que vais-je découvrir ou toucher ? Que vais-je rencontrer en chemin ? Pitié, pas de bestioles, rien qui grouille. N’y pense pas Ava, avance, continue. Un mur. Des pierres ? oui, des pierres, de la mousse ? Redresse-toi, cherche une ouverture. Ne t’éparpille pas, reste logique, de haut en bas, et puis balaie le mur vers la droite... Aïe, J’ai dû m’entailler la main sur une pierre. Pas grave, t’auras un beau bandage et tous les pansements Barbie que tu veux quand tu sortiras de là. Allez ma grande, ne perds pas pied. Etape par étape, pierre par pierre, avance.

 La surface sous mes doigts vient de changer. C’est lisse, du métal ? Le bruit que font mes poings en tapant la surface me confirme que c’est du métal. Une porte ! Allez, trouve la poignée, vas-y Ava. Elle est là, enfin je bute contre elle. Mes espoirs sur pause s’accrochent à cette poignée, j’y mets toute ma force, je tire, je pousse. Je tape et me heurte à cette fichue porte qui ne bouge pas. Les sanglots s’étranglent dans ma gorge. Je reste impuissante, sans voix. Je n’arrive même pas à hurler ma peur, à crier à l’aide. Je me retrouve assommée, muette, plus inutile que jamais. Tétanisée, vidée. Merde ! Je ne vais pas me contenter d’être une fois de plus une victime aphone et inerte ? La vague de panique va me submerger. Je sens ma respiration se faire de plus en plus rapide, je ne contrôle plus rien, ma gorge se serre. Je vais étouffer avec ma propre peur. Je me laisse couler le long de la porte, son contact froid me glace jusqu’à l’échine. Les sanglots qui obstruaient ma trachée se décident enfin à franchir mes yeux et mes lèvres. Comme une libération passagère, je reprends mon souffle et laisse mes larmes se répandre. Allez Ava, pleurer n’est pas être faible, tu as le droit de crever de peur, mais ne te résigne pas. Pleure si tu veux, mais continue à chercher, cherche de quoi survivre, tout objet, tout indice, cherche l’histoire ne peut pas se finir comme ça. Allez, ma grande. Tu as le droit à ta belle histoire et à ton happy end, bouge-toi.

 Bien malgré eux, mes doigts reprennent leur exploration du sol. L’espoir d’y trouver mon sac à main, mon portable. Oh, oui ! Mon sac, ma bouée de sauvetage. Ce n’est pas un sac de fille, c’est un sac de survie. Des stylos, des mouchoirs, du maquillage et un tel bric-à-brac, si j’étais MacGyver, avec son contenu, je crochète la porte et je fabrique un moyen de locomotion pour me ramener dans mon lit en un claquement de doigt, avec une ou deux explosions pour faire bien. Une épingle à cheveux et le tour est joué. Mais je ne suis pas MacGyver et mes muscles n’ont pas encore poussé, pas plus que mes seins d’ailleurs … Arrête avec les pensées négatives et incohérentes bordel Ava, ce n’est pas vraiment le moment de divaguer ! T’as des muscles en mousse, ok, mais cherche, tu verras bien ce que tu trouves et ce que tu peux en faire. Allez, on y croit.

 Les mains douloureuses, je palpe, tâte, sillonne les moindres reliefs du sol, d’un mur à l’autre, quelques larmes tombent encore parfois et mon auscultation reste vaine. J’y laisse surement la pulpe de mes doigts et ponce malgré moi mes empreintes sur la chape de ciment, si ça continue il ne restera que mon ADN et mes empreintes dentaires pour identifier mon corps. Oh punaise Ava, tu n’as pas plus gaies comme pensées ? Il faut que je cadenasse mon imagination glauque. Si je sors de là vivante, promis, je renonce aux romans et aux séries policières pendant au moins deux ans.

Allez ma grande, sèche tes larmes avant de te déshydrater. Va savoir combien de temps tu vas devoir rester là ? Combien de temps avant de mourir de faim ou de soif ? Punaise ce que je peux être douée pour me perdre en des pensées positives. Le pire des labyrinthes de l’angoisse : ma tête !

Inspire, expire… écoute ! Tu entends ? Non… le silence, aucun indice, rien. Pourtant… Pourquoi ma peau se couvre de chair de poule ? Quel message m’envoie mon épiderme ? Qu’a donc compris mon corps ? Qu’a-t-il entendu ? Mon cerveau reptilien sent le changement qui s’opère dans l’atmosphère avant moi. Il capte le danger qui arrive. Mon cœur bat plus vite, cette accélération me donne un léger tournis, le temps que mon organisme s’acclimate. Mon cœur bat à tout rompre comme s’il allait briser mes côtes, je le sens battre partout en moi, mes tempes, ma gorge. C’est possible d’imploser ? La peur et l’angoisse vont me disloquer, maintenant je sais ce que mon cortex primaire a compris avant moi. Je les entends. Je les perçois ces pas lourds qui s’approchent. Il est là. Il est tout proche. Derrière la porte. Mais qui ça « il » ? Qu’est-ce qu’il me veut ? Je voudrais me cacher, mais je ne peux que retenir ma respiration.

 J’entends les clefs s’insérer dans la serrure. Je tremble, le poids dans ma poitrine me cloue sur place. Mes membres ne répondent plus à mon cerveau. Et en même temps tu veux aller où bécasse ? La seule sortie c’est cette porte qui va s’ouvrir.

Allez Ava, quand il ouvre, tu fonces, tu cours, tête baissée, droit dans le tas. Façon rugbyman. Ne réfléchis plus, agis. Défends-toi. Bas-toi. Tu n’es pas une putain de victime ! Ça suffit de te laisser faire, de te laisser marcher dessus.

 Le grincement de la porte déchire ma cage thoracique. Mon cœur pulse une dernière fois et impulse à mon corps l’énergie vitale pour sortir de ma tétanie. Comme un coureur quand le bip retentit, mes muscles se contractent, l’adrénaline coule enfin dans mes veines et me propulsent en avant.

 Trop vite, trop fort. Je perds l’équilibre et m’étale de tout mon long.

 Le choc me surprend, mais le tapis a amorti ma chute. J’ouvre les yeux, mon cœur se calme. Je reconnais les lieux. Je suis dans ma chambre, affalée par terre. Tombée du lit, haletante, encore engluée dans mon stress. Mais en sécurité ! Quel affreux cauchemar.

 Je remets doucement mes idées en place en me reglissant sous la couette. J’allume ma lampe de chevet. Oui, comme une enfant qui aurait peur du noir. J’assume, courageuse mais pas téméraire. J’hésite à me replonger dans les bras si peu réconfortants de Morphée Mon portable m’indique qu’il me reste moins de deux heures avant que mon réveil ne se manifeste. Il faut vraiment que je consulte un psy, entre la sensation de malaise qui me colle à la peau depuis notre après-midi filles, la torture de faire face à Raphael presque tous les jours et le mystère du médaillon, voilà, je fais des rêves de psychopathe. Ok le raccourci est facile, j’oublie peut-être un ou deux traumatismes que j’aimerais enfouir encore plus profond et ma passion pour les romans de serial killer… Mais là tout de suite, je n’ai ni envie de disséquer mon cauchemar, ni la liste de mes fêlures et angoisses, je veux juste sortir de ma torpeur, de cette oppression qui me tourmente. Une série de filles sur Netflix ? Pourquoi pas j’ai deux heures à tuer, après tout. 

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