Madame, j’ai tâtonné dans le noir où j’ai fini par trouver mon cœur, et maintenant que je le regarde, j’y vois le corail, le sable tassé sous des litres de mer avide de ciel. Il est tout taché, la confiture coule à flots par les percées.

Vois-tu passer cette silhouette qui gargouille d’épais sanglots ? J’ai vocation à pleurer mon miroir alors je me mets en quête de celui des autres pour ne pas faire peur aux nuages. Une valse d’invisibles au sommet de la crête, bercés par les invincibles vents de l’onde. J’attends le soleil de mi-juin sur la peau déjà calcinée, la bise frêle sur l’épaule feutrée, un arbre une main un essai, un cahier d’école encore vierge où tout serait à décider et l’on me féliciterait pour l’initiative de la conjugaison au futur.

Mais mes mains ne savent pas s’y faire, siphonner l’intensité du sucre et la glaise dans la bouche qui gicle entre les lèvres, le sourire boueux un verre en paume. Les autres sont loquaces et carrément buvards, aspirant mes miettes qui sont mon tout, une géante d’argile friable qu’on balade. Iels s’attachent quand on les tartine, et voilà ces fantoches de l’émoi troués bavassants imbibés d’une sirupeuse tendresse. On leur a pas dit de se méfier des faux-amours, alors ils s’entassent dans les grondoirs du temps. Mais je serai pas là au bon moment.

Madame,

Quand je n'arrive pas à comprendre le jeu des autres où l’on abat ses cartes, je fais semblant de dormir dans ma tête. Je vous donne le regard mou, ça fait le travail quelques heures. Vous vous cachez toustes bien, pudiques enfants. Moi j’ai toujours ces croûtes sur mes genoux, des bleus de méthylène maladroits, le temps qui s’efface pas, stratège j’étais reine à six ans, mais plus tellement à présent.

Il faudrait savoir quel train prendre, mais la montre ne donne pas l’arrêt.