31Ω : séquence soirées 

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1/

Stroboscopes qui transpirent, elle danse le dos nu en colonne de bambou et les poignets relevés, frappe la basse avant qu’elle n’arrive comme pour s’en protéger. Paupières closes, rejetant sa tête vers les confins de l’humeur violacée des murs et des autres corps qui balancent, j’imagine qu’elle s’agitera jusqu’à la mort et que seule sa peau liquide lui suivra comme une mue de liqueur, la surface d’un génépi trop fermenté.

2/

Vicieux, tu m’esquives et tu le sais et tu me joues comme si j’étais la marguerite, la mignonne du bouquet. Simple : un véritable mauvais jour, les trapèzes arc-boutés, les mains qui chouchoutent tes genoux mais, joli cœur, ils ne vont pas s’enfuir, pas comme moi au lendemain de l’ivresse, rends à ces rotules quelque instant de liberté. Vicieux, mais tu te penches la bouche en sueur, tendue vers d’autres femmes qui n’aiment que le soir de leurs pensées ; vicieux, voûté sur cette chaise haute, les cuisses semi-écartées car tu doutes de la place qu’occupe ta charogne, qui crois-tu pouvoir goûter ? T’es vraiment pas le plus joli sur le parquet cette nuit, pas le genre de chair avec qui aimer alors, baise donc le sol avec ton pas glissant, luisant de bien-penseur en guenilles. Vicieux, tu m’esquives et je le sais et tu me joues comme si j’étais une petite âme grêle, dans la boîte de parures, un de tes multiples petits colliers de terne.

3/

Il est cinq heures, Strasbourg s’éveille. À l’aride mois de juillet je souffle de la rougeur, un rien d’amer, un ton sanglant car, en ces heures ensommeillées de ses habitants, la ville se penche sur une plaie soûle qui suinte de pus.

//

Elle est assise contre la taule torride, jambes fléchies, cuisses écartées. Coudes posés sur les genoux en un geste nonchalant qu’elle aura travaillé des années durant car il permet tant : une épaule glissée contre l’homme, le sourire faussement timide masqué par les boucles qui dégoulinent sur ses joues, un corps que l’on veut déloger de l’angle dans lequel il feint de se cacher. Elle connaît bien ce frôlement de peau qui les hérisse, la chaleur d’un matin quand on les amène au bord d’une falaise de draps en taisant l’avoir voulu, rien qu’une légère rose sur le cœur et les pétales se répandent sur les joues pour avouer : c’était doux, tout ce que j’espérais lors de ces soirs d’ivresse où je ferrais tes mots avec les miens jusqu’à ce que ta voix épouse mon sein. Elle est adossée à la taule torride et je ne lui inventerai pas de fière bataille qui ne serait pas sienne, je vous décrirai simplement la toile que j’observais avant que l’étoile ne salue Strasbourg : crever pour des bouches de femmes contre ses lèvres pourvu que ça anime l’autre, que ça le capture, que la canine de l’homme croque sa peau et qu’il l’aime libre. Tout de même, vissée à son côté droit, la pupille en sueur, la voix sourde quand elles l’approchent et la débusquent de ce mirage d’amants de Vérone du secteur industriel, ne serait-elle pas tout le contraire ?

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