Le ciel perle sur les Caraïbes, une mousson courte picorant les corps que l’océan ramène à la rive comme autant d’algues brunies par le soleil, ma larme s’y perçoit à peine, elle a d’ailleurs moins goût de sel sur le sol d’ici que sur les plages de mes ailleurs. Mes aïeux en panne de miel, je les fuis à l’autre bout du monde sur les monts qui se pèlent la tête dans les nuages et n’y trouve guère de réponse, simplement ma guerre à moi, toutes mes violences dont je rêve me défaire pour lacer enfin seule mes chaussures et qu’on dise de ces souliers qu’ils sont miens, à ma pointure… les monstres dans ses cernes me hantent, tes yeux vides plus encore, les abysses dans le puits de vos pupilles m’agonisent, jamais je n’aurais cru trouver l’Autre sous sa paupière, que tu l’accompagnes alors dans ses excès, ses bavures, quelques marches de trop jusqu’à ces jours, dûs des enfers, peureux de vivre avec la mort au col sur tout le pourtour des cous-légumes, la taxe foncière d’habiter quelques fois le paradis.

Quand je serai grande, je n’aimerai pas, promis. J’irai tuer les chimères qui habitent les pages raturées enfouies sous les sargasses, je sacrifierai mes prières pour qu’elles appartiennent à celleux qui me ressemblent, j’écrirai sur le souffre qui dégouline de vos photos et de ce que j’en fais ; une croix, une larme, une cicatrice, une plaie sur laquelle pullulent les nuisibles. Quand je serai grande, je te souhaiterai le plus beau de l’univers à la date qui te vit naître comme l’an de grâce, d’un coup de fil invisible qui s’échappe aussitôt le vent noie-t-il les ondes.

Là, les frégates plient la mer en quatre. J’ai soif de sucre, faim de mangroves où me faire bouffer mais possède toujours ton collier, tout au fond des gosiers de silures, ils m’attendent.

Joyeux anniversaire maman, bientôt, l’océan me ramène.