Chapitre 13

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Le bonheur est parfois caché dans l'inconnu. -Victor Hugo

 Nos pas nous mènent au pied de la montagne peu avant minuit si l'on en croit la montre de Victoria. Le soleil est toujours haut. Il nous aura donc fallu une demi-journée pour arriver ici, j'imagine que nous mettrons au minimum le même temps pour grimper. Nous nous arrêtons pour ce soir, l'ombre du mont et la fine couche blanche qui recouvre son sommet rafraîchissent l'air, je frissonne rapidement sous mon T-shirt.

"Nous passerons la nuit ici, la lumière est encore bien présente mais il va falloir s'en contenter et faire avec."

 Sur ses mots, Harcogne déplie déjà une couverture à l'aide de Victoria avant de s'y enrouler pour s'allonger à même le sol. J'échange un regard avec Tyler qui hausse les épaules avant de fouiller dans son sac, je l'imite et Vickie nous rejoint. Nous trouvons un coin plus ombragé que les autres, la roche forme un auvent, nous protégeant du soleil. Alors que je sors seulement mon plaid, les filles sont presque endormies. Je tente de l'étaler sur le sol avec difficulté.

"Tu vas y arriver tu penses ?"

Il rigole en m'observant galérer, son petit sourire me fait craquer mais je n'en montre rien et lui lance :

"Soit un homme et aide moi un peu au lieu de te moquer !"

Une fois nos couvertures côte à côte, il s'allonge et me lance un sweat que j'enfile sans rechigner. Je me couche à mon tour et enfouis mon visage tout contre son torse. C'est pour cacher le plus de lumière possible, enfin ça, c'est surtout l'excuse que je lui sers alors qu'il rigole doucement, en vérité, j'en profite un peu. Beaucoup. Je ne me sens pas partir et m'endors rapidement, toute cette marche sous le soleil m'a épuisé...

*****

 Nous avons repris notre route. Ce matin, à peine avions nous posé un pied sur ce petit chemin pentu, menant au sommet du mont, que le paysage changea. Nous pûmes voir le soleil dans sa véritable position mais seulement le temps de quelques pas, puisque désormais, l'astre n'est plus visible, couvert par de nombreux nuages gris. Le vent souffle à nos oreilles, me rendant presque sourd aux paroles de mes amis. Bien qu'emmitouflé dans le plus de vêtements possible, le froid me fait claquer des mâchoires. Je tente de me soustraire au vent glacial qui s'infiltre partout où il le peut en me blotissant contre Tyler. Devant nous, Victoria a adopté la même technique et se cale tout contre Harcogne. Depuis quatre heures déjà, nous marchons dans la poudreuse et je n'en vois toujours pas la fin. J'aperçois la passeuse, qui, d'un signe de tête, nous intimes de nous arrêter à l'abri d'une cavité dans la roche. Elle nous lance :

Nous ne devrions pas tarder à arriver, c'est une simple pause, le sommet n'est plus très loin."

Je soupire, je serais certainement soulagé si elle ne nous avait pas dit la même chose deux heures auparavant, lors de notre dernier arrêt.

Je détaille le profil de mon copain et malgré moi, je le revois ce soir là, encore. Je repense au cauchemars que j'ai fait cette nuit, il n'était pas bien différent de la réalité. Son corps étendu là, ses yeux pâles délaissés par la vie, puis je revois son corps, seulement habillé par ses cicatrices...

"A quoi est-ce que tu penses ?"

Sa voix me ramène à la réalité, si tenté que ce soit la vrai réalité.

"Oh rien d'important."

Il me regarde en plissant les yeux, d'un air faussement soupçonneux, je ris par le nez et il retrouve son petit sourire.

*****

 Nous y voilà. Au sommet. Mais il n'y a rien, rien d'autre que la neige à perte de vue, j'ai l'impression que si je tendais le bras vers le ciel, je pourrais toucher les nuages mais c'est tout. Ce n'est qu'un simple plateau blanc. La magicienne dont on a parlé, n'est-elle pas sensée résider ici ? Pourtant, je ne vois aucune maison, aucune porte camouflée, pas même une espèce de grotte qui pourrait servir d'abri. Le vent souffle encore plus fort ici. Je sursaute et me retourne brusquement alors qu'un hurlement retentit, me glaçant le sang encore davantage que la température ambiante. Je croise le regard alerté de Tyler, ça n'avait rien d'un cri de détresse ou de surprise. Non... c'était plus comme... Je ne sais pas vraiment en fait. Je m'agrippe au bras de mon petit ami alors que ce cri rauque et menaçant résonne encore une fois. Je sens tout mon corps se couvrir de chair de poule. Qu'est ce qui peut bien faire un son pareil ? Sincèrement quel genre de monstre serait capable de faire trembler le diable d'un simple rugissement ? Et si, finalement, tout ça n'était qu'un piège destiné à me punir pour ma présence dans le monde des morts. Si, effectivement c'est le cas, je suis tombé dedans la tête la première. Seulement, j'entends la passeuse nous lancer, par dessus le bruit des bourrasques et les hurlements :

"Ce n'est rien !! Ces rugissements sont l'œuvre d'un enchantement, visant à faire fuir les personnes indésirables !"

Je décide d'être naïf une fois de plus et de la croire. Je n'ai pas beaucoup d'autres options dans tous les cas. C'est certainement pour ça que les montagnes sont appelées "montagnes hurlantes". Je l'observe gratter le sol sans pour autant lâcher Tyler, jusqu'à ce qu'une bourrasque plus forte que les autres balaye la neige juste devant nos pieds, sans même nous toucher, laissant apparaître une trappe en bois abîmé orné de symbole qui me sont inconnus. Vicoria s'avance et sous les indications d'Harcogne, elle ouvre la trappe, révélant un escalier en pierre brute, s'enfonçant dans l'obscurité.

 La passeuse s'y engage sans aucune hésitation et Tyler la suit après m'avoir jeté un regard incertain. Je l'imite. La lumière de dehors ne nous permet pas de voir bien loin et lorsque Vickie referme derrière elle, c'est le noir complet. Les marches sont glissantes et irrégulières sous mes pieds, j'avance lentement. Je laisse glisser mes mains sur les parois froides et humides. C'est la seule chose qui me permet de suivre un peu la trajectoire des escaliers. Nous nous enfonçons sous terre en silence, parfois le bruit d'un petit caillou dévalant les marches résonne autour de nous, je n'ai aucune conscience du temps qui passe ici. Parfois, je tends une main devant moi, jusqu'à toucher le dos de Tyler afin d'être sur qu'il est toujours devant moi, Victoria à le même reflex, de temps en temps, je sens sa main froide se poser sur mon épaule avant de repartir vers elle. Ils sont tous les deux là et ça me rassure même si je ne sais pas si la passeuse marche toujours en tête.

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