Chapitre 3

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Une fois repêchée et séchée, Isadora fut conduite devant le capitaine. Si tous les marins connaissaient le Nordique - la langue commune des marins car l'Empire du Nord était la plus grande puissance navale de Silisisma - ils avaient le fort accent des Ouestae... Or, elle était persuadée de se diriger vers le Sud ! Où était-elle donc ?

Si elle se trouvait à l’ouest… Cela voudrait dire qu’elle n’avait pas bougé depuis plus d’un an… Pourtant, le second du gos Jo était doué en cartographie… Perdue dans ses pensées elle manqua la marche menant au pont supérieur et s’étale sur le sol.

Grimaçant sous la douleur, elle saisit la main qui se tendait vers elle.

一 Alors, l'accueillit joyeusement le capitaine, on joue à la sirène ?

La petite lui offrit un petit sourire las en guise de réponse.

Le capitaine était un homme immense qui dépassait de deux têtes les plus grands des matelots. Brun, il possédait un œil bleu et un œil noir... mais cela ne l'enlaidissait pas, au contraire. Il était pourvu d'une certaine aura charismatique qui poussa la noyée à lui faire confiance.

一 Nous avons coulé à la suite d' une attaque de pirates... je me suis laissée porter par le courant.

Le sourire chaleureux du capitaine était contagieux. Il l'emmena dans sa cabine richement décorée et lui demanda ce qu'une pauvre enfant comme elle faisait sur un navire.

一 Mon père était un grand marin, et je souhaitait devenir comme lui... Comme ils n'engagent que les garçons, je me suis déguisée... Avec le temps, mes cheveux ont repoussé et voilà...

Isadora aimait raconter cette histoire, elle aimait ce père qui n'existait pas, ce bon marin courageux et loyal. Elle aimait aussi la petite fille courageuse qu'elle devenait, la fille simple qui donnait tout pour ressembler à son père... Cela lui permettait d'oublier son véritable passé, celui de la petite fille qui était passée de l'amie du Prince au monstre, celle qui avait été abandonnée, celle qui avait failli mourir trop souvent, la petite fille brisée qui rêvait de vengeance tout en sachant que cela ne réparerait pas le passé... Oui, elle aimait cette double identité.

一 Je vois... Eh bien, je ne vais pas pouvoir te laisser te travestir de nouveau, puisque tout l'équipage t'as vue ainsi... Mais une fois que nous arriverons à destination, rien ne t'empêchera de reprendre la mer.

Isadora leva ses yeux pleins d'espoir vers le capitaine.

一 Où débarquez-vous ?

一 Dans le Pays du Sud.

Elle l'observa, surprise et dubitative.

一 Pourtant, Ouestae et Sudae sont ennemis depuis toujours, non ?

一 Certes, mais une alliance vient d'être conclue : notre présidente, Lillyah, va épouser leur roi, Shu. Aussi, nous l'escortons.

Avant que l'enfant puisse lui poser une seule question concernant l'illogique de cette alliance entre une démocratie et une monarchie et ses remarques politiques, il l'attrapa par les épaules et l'accompagna sur le pont.

Un fois l'équipage au grand complet, formant un cercle autour d'eux, il déclara :

一 Cette demoiselle aura besoin d'un cabine, je demande donc à tous ceux en possédant une de faire chambre commune avec d'autres afin de lui libérer une place et une chambre décente. Puis il se tourna vers elle :

一 Il y a une majorité d'hommes, ici, les femmes sont sur une frégate qui a un jour de retard par rapport à nous.

Puis il partit, la laissant seule.

La petite s'approcha de l'océan, observant dans l'eau claire les animaux marins. Dans la mer, l'eau était plus sombre, plus brune. Laide, triste. ici, cela grouillait de vie, de joie de vivre, aussi bien sous l'eau qu'à bord du navire : pas d'ivrogne ici, non, elle voyait des gens de bonne humeur, qui chantaient en travaillant, des amis de longue date qui travaillaient tout en s'amusant, des matelots rieurs, des mousses bien traités.

Elle s'approcha des canons, sa spécialité... Ils étaient propres et la poudre d'excellente qualité. Le sol était lavé et aucun coquillage ou algue n'ornait la coque.

Du coin de l'œil, elle repéra les trappes menant aux sous-sols.

Elle savait désormais que les plus beau navires pouvaient cacher des occupations bien plus sombres.

Doucement, silencieuse, elle souleva l'une d'entre elle. Odeur de poisson et de légumes vieillit. Il s'agissait des cuisines. Une voix rauque lui criant que " C'est pas l'heure !" lui confirma l'hypothèse.

Un autre se révéla être la réserve d'eau douce, une troisième les dortoirs des mousses, un quatrième les reserves des armes.

La cinquième était forcément celle qui attesterait de l'honnêteté du capitaine... Ou du contraire. Il s'avéra que l'endroit était remplis de caisses. Elle s'approcha doucement et reconnu un bois de son pays : l'ébène.

Doucement, elle souleva le couvercle de l'une d'entre elle à l'aide de son canif... Parchemin. Puis une autre. Parchemin.

La totalité des trois-cent-treize caisses étaient remplies de parchemin.

一 Tu es bien curieuse...

Le capitaine l'avait visiblement observée dans tout son excursion...

一 Et bien soigneuse, aussi. Que cherchais-tu ?

一 Le navire dans lequel j'ai été engagée transportait des esclaves, bien que la plupart d'entre-nous l'ignoraient. Je suis devenue quelque peu méfiante.

一 Je vois ça ! pouffa le capitaine...

Elle était réellement stupéfaite par la bonhomie de ce capitaine.

一 A vrai dire, je souhaitais te demander ton prénom, puis je t'ai vue fouiner...

一 Oh... Isadora, répondit-elle simplement, ne cherchant pas à mentir sur ce point.

一 Enchanté, moi c'est Herbert, ou Cap, Cap'taine, Capitaine ou Chéri - mais ça, c'est réservé à mon épouse -

Éclatant franchement de rire, la petite se rendit alors compte qu'elle n'avait pas ri. Pas une seule fois. Même avec Will. Trois années sans rire. Elle n'avait même pas pensé que ce sont ressortirait un jour de sa gorge... Elle n'avait jamais pensé à ce son tout court, d'ailleurs.

C'était une sensation étrange, à onze ans, que de redécouvrir le rire.

Herbert, lui, était complètement ailleurs, il la regardait différemment.

一 C'est amusant, dit-il, lorsque tu souris, tu ressemble beaucoup à ma fille...

一 Votre fille ?

一 Oui... Elle s'est enfuie l'année de ses quinze ans avec un idiot de Nordestae...

Un Nordestae ? Idiot ?

一 Hé ! Nous ne sommes pas idiots !

一 Toi, peut-être pas, mais lui... Une cruche ! Vide et avec des trous !

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