Chapitre 2

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L'eau s'agitait sous la pluie de boulets. Rapidement, le navire adverse se rapprocha de leur bateau. Il était évident que les canons n'appartenaient pas au navire, il avait été aménagé pour servir d'arme de mer. A elle toute seule, la nef aurait pu anéantir dix fois leur bâtiment. Ils n'avaient certainement aucune chance. Mais Isadora restait persuadée qu'ils pouvaient prendre le dessus. Ce dont l'équipage doutait, visiblement.

C'était un bateau deux fois plus grand et plus gros que le leur, ils avaient le double de leurs canons et le triple de leurs effectifs d'armes et de vies humaines... s'ils ne comptaient pas les enfants dans la cale... Ils avaient six mâts et sept-cent canons, ainsi qu'un nombre impressionnant de matelots. Même si leur navire survivait aux attaques des canons, ils ne tiendraient pas face à un abordage.

Les deux navires se rapprochaient dangereusement l'un de l'autre. L'abordage était imminent. L'équipage s'agitait, nombreux étaient ceux qui protestaient, qui criaient sur l'enfant qui les dirigeait à la mort. Isadora semblait deviner la suite, à chaque mouvement de l'adversaire, elle ordonnait les mouvements des canons et des voiles de manière à prendre facilement la fuite, si le combat tournait mal. Car avec un tel monstre face à eux, il lui était impossible d’imaginer la moindre victoire.

Le premier tir atteignit la coque adverse... Et rebondit vers eux.

Isadora pâlit.

Les tirs suivants eurent le même effet.

En quelques mouvements la petite fille fit signe à l'équipage d'amorcer la fuite. Mais le mouvement tourna court lorsqu'une planche joignit les deux bords.

Blanche comme un linge, elle observa l'équipage adverse envahir peu à peu leur navire, guidés par une femme qui semblait faite de granite autour d'elle, l'eau s'élevait, formant une sorte d'arcade.

Une Déesse Maléfique.

Alors que la plupart des marins reculaient d'effroi, Isadora s'approcha d'elle.

一 Isadora… fit la femme d’une voix doucereuse.

一 Isidore. claqua l’enfant, la mâchoire serrée.

一 Qu'importe. Tu crois réellement pouvoir nous vaincre ? Crois-tu sincèrement avoir la moindre chance ?

Un air de défi se peignit sur le visage de la fillette.

一 Non, je ne crois pas. Je sais.

Et dégaina son épée et fonça sur la Déesse.

Celle-ci ne bougea pas d'un pouce. Son corps entier devenant pierre, chaque coup de l'enfant se heurtèrent au granite, et ne laissaient aucune marque, au contraire, l'arme rebondissait sur l'enfant.

Isadora finit par reculer, en nage.

一 Battez-vous ! Lâches !

La statue reprit vie et la Déesse leva lentement les bras : l'eau s'éleva, plus haut encore et s'abattit sur le navire.

L'eau ne brisa pas la nef, mais jeta la plupart de ses occupants à la mer.

Transportée par la vague, la petite s'était retrouvée contre le mât, agrippée au bois uniquement par la force de ses bras. Son poids pesait sur ses bras et sa force diminuait. Dans le camp adverse, la Déesse riait, démente.

一 Cela t'apprendra à défier Eilinie !

一 Eilinie ?

一 Tu ne me connais pas ? Je suis la puissante Maîtresse des Combats !

Prise d'un accès de rage, Isadora dégaina son épée et... avait oublié qu'elle se trouvait suspendue à plus de quatre mètres de hauteur.

La chute fut des plus brutales. Le sol trempé et la poudre à canon renversée un peu partout lui collait à la peau.

Ses habits étaient devenus transparents, ses cheveux, qui avaient repoussés et qu'elle cachait sous son bonnet, retombant dans dos, épars.

一 Je vais vous détruire, grogna-t-elle.

Son visage ensanglanté et son air déterminé effrayèrent tous les survivants.

La petite se releva péniblement et traversa le ponton menant au navire adverse.

Elle remarqua que celui-ci n'était pas soumis à la houle, et que ce qu'elle croyait être du bois, était un métal inconnu. C'était pour cette raison que ce navire était aussi puissant, le métal repoussait les boulets et le rendait léger et rapide.

Quel qu'en soit le constructeur, c'était un génie.

Arrivée face à la Déesse, elle se planta sur les pieds avant de clamer :

一 Tu n'as pas ta place ici. Retourne d'où tu viens et répare les dégâts. Maintenant.

La Déesse, sans que cela ne la surprenne vraiment, éclata de rire. Un rire démoniaque, froid, rocailleux. Inhumain.

Dans les deux camps, tous retenaient leur souffle : la gamine n'avait aucune chance ! Pourtant, Isadora avait compté les mâts. Le camp adverse en avait six. Le sien aussi.

"Tu as le Don de nous contacter, mais seulement avec ces paroles : "viens à moi!", dites trois fois. Et avec une circonstance similaire à celle-ci avec douze élément identiques déposés en cercles par Nuit."

Ce n'était pas un véritable cercle, mais la forme n'en était pas loin...

Isadora leva les bras. Elle n'avait plus rien à perdre, désormais. Certes, il lui était interdit de révéler sa nature mais la fin justifie les moyens.

一 Viens à moi ! Viens à moi ! Viens à moi !

Les mâts se mirent à trembler, puis à s'élever doucement... Ils tourbillonnèrent sur eux-mêmes et se métamorphosèrent en les douze Dieux Entravés. Eilinie recula brusquement. Elle fit monter une énorme vague qui engloutit et brisa les deux navires et leurs équipages.

一 Entravés vous resterez à jamais ! clama-t-elle avant de disparaître doucement dans un nuage de poussière.

Isadora coula avec les autres, tout en voyant les Dieux lui sourire. Nuit avait bien placé ces mâts. Épuisée, elle ferma les yeux et se laissa porter par le courant, sans lutter. Il lui suffisait de garder les bras et les jambes écartés, dans la position de l'étoile de mer, comme disait Wyll... Wyll... Au moins, il n'y avait plus personne pour la dénoncer et personne d'autre pour l'empêcher d'accéder au trône...

Elle laissa le vent la porter. Elle savait que la terre n'était pas très loin, le Royaume de l'Est était un endroit accueillant, selon Williams, elle n'aurait probablement pas trop de mal à se faire accepter...

一 Capitaine ! Il y a une fille qui flotte !

Sortie de sa rêverie par l'exclamation, elle leva, au prix d'un effort considérable, la tête : un voilier avançait non loin d'elle…

一 Qu'est-ce qu'on fait, capitaine ?

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