Chapitre 5

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Ainsi, elle marchait toute la journée, volant sur les étals des marchés, puis dormait sous les porches.

Le matin, le propriétaire de la maison la poussait dans la rue et le schéma recommençait.

Marcher. Voler. Marcher. Dormir. Être rejetée.

Plus d'une fois, elle avait songé à vendre sa médaille... Mais une telle distinction ne pouvait être montrée sans que l'on l'accuse de vol.

Et il n'en était pas question. Un meutre, une petite centaine de vol, trois années passées en habits d’homme et une fuite étaient déjà suffisants, elle n’avait guère envie d'ajouter une fausse condamnation à la liste.

En y réfléchissant, pensait-elle, j’aurais pu finir pendue une bonne dizaine de fois…

Chaque jour était accompagné d'un festival de s'insultes et de coups... Mais elle ne s'en faisait pas.

Elle avait tué.

Elle le méritait.

Avec le temps, elle avait découvert que la vie du peuple était parfois bien plus heureuse et qu'ils semblaient avoir moins de soucis que la noblesse. Elle se rappelait alors de la petite fille qu'elle avait été... Son père et sa mère, commerçants aisés...

Oui, elle n'avait pas un seul souci à cette époque.

Époque révolue depuis plus de trois ans.

Mais sa mission était plus importante que son passé.

Les marchés étaient de véritables machines à rumeurs. On entendait beaucoup de choses...

Le roi coucherait avec son jardinier;

La poissonnière aurait tué le boucher;

Le prix du pain avait encore augmenté;

Le lait du fromager serait infect.

Et tant d'autres...

Isadora passait son temps près des menuisiers. C'était son seul indice.

Elle connaissait désormais les adresses de tous les menuisiers... Sauf celle de celui qui fournissait le roi.

Et elle avait l'étrange impression que tous les Élus auraient un rapport plus ou moins flagrant avec les dirigeants de leur pays.

Flamme était forcément le fils de celui qui fournissait Shu.

Mais autre chose inquiétait la jeune fille. Elle avait appris la construction de douze obélisques sur le point traversant le Grand Canyon reliant la capitale et le Palais d'été du roi...

Douze...Ce chiffre n'était pas anodin.

Elle était persuadée que Nuit lui faisait signe... Qu'elle lui indiquait qu'elle était si la bonne voie.Son plan se mit rapidement en place. Dès la construction terminée, elle irait voir si il était bien possible de communiquer avec les Dieux.

Pour elle, aucun doute possible, c'était un signe divin.

Mais un doute planait.

Et si c'était un piège ?

Elle avait déjà subi l'attaque d'une Déesse Maléfique et ne tenait pas à renouveler l'expérience. Elle en gardait une immense cicatrice blanche le long du côté droit, du cou à l'orteil.

Piège ou pas, les travaux seraient finis dans la semaine... Et il lui faudra alors vérifier si le nombre est un hasard ou pas.

一 Et le plus tôt sera le mieux... marmonna-t-elle pour elle-même en se promenant sur une place bondée de marchands ambulants.

Elle ne regardait pas vraiment où elle allait, désormais capable de se repérer sans réfléchir...Brusquement, elle se heurta à un mur... plutôt bien rembourré.

一 Eh bien, on ne regarde pas où on va ? fit une voix amusée qu'elle aurait reconnue entre mille malgré un an de solitude.

一 Sire ?

Elle leva les yeux pour rencontrer ceux, souriants, du souverain.

Le monarque déposa un doigt sur ses lèvres en signe de silence.

一 Tu ne me connais pas. D'accord ?

Isadora eu un sourire tordu. Elle l'attrapa par le poignet et le tira dans une ruelle peu fréquentée. Là, elle sorti de sa poche la Médaille de Service Rendu à la Couronne.

一 Avec ça sur moi, j'en doute, majesté.

一 Je voulais dire que tu dois faire comme si on ne se connaissait pas ! Evidemment que je t'ai reconnue !

一 Où alliez-vous ? demanda-t-elle sans s'occuper de son erreur.

Shu rougit brusquement.

一 C'est qui ? s'exclama aussitôt la jeune fille, qui, avec le temps, était devenue aussi commère que la poissonnière.

一 Quelqu'un.

一 Qui ? insista-t-telle.

一 Un ami.

Le sourire amusé de la brunette lui fit comprendre qu'elle n'était pas dupe.

一 Tu ne vas pas me lâcher, n'est-ce pas ?

一 Pas du tout !

一 Le Jardinier de la Cour d'Été.

Isadora éclata de rire en se remémorant les nombreuses rumeurs qui couraient sur la vie privée du roi.

一 Sire, vous devriez surveiller votre intimité, tout le peuple sait que vous aimez le jardinier... Comment s'appelle-t-il ? On ne connaît que son nom...

一 Tim... Mais... Cela ne dérange personne, que... ?

Il avait l'air si inquiet de l'avis de son peuple qu'Isadora ne put s'empêcher de lui offrir un sourire rassurant.

一 Il y aura bien des imbéciles qui râleront... Mais le peuple vous aime, si vous êtes heureux, il est heureux.

一 Tu parles comme un ministre... Et ils sont bien souvent loin de la réalité.

一 Vous oubliez que je vis et j'ai toujours vécu avec le peuple. C'est de là que je tiens ma débrouillardise.

一 J'ai eu vent de ton histoire, oui... Brutus tenait un carnet dans lequel j'ai tout appris.

一 Du moment que vous ne me faites pas subir ce que j'ai subit à cause de lui...

Ils marchèrent côte à côte jusqu'au pont au-dessus de Grand Canyon. De l'autre côté se trouvait le palais d'Été, qui, contrairement à ce qu'elle avait imaginé, était construit avec des pierres grises et sombres et ressemblait à un forteresse plutôt qu'à un palais.

Le roi et ses bizarreries... pensa-t-elle, amusée.

一 Pourquoi ces obélisques ?

一 Oh ! Figure-toi qu'une excellente amie à moi me l'a suggéré, elle trouvait que ce pont ressemblait trop à une pauvre petite passerelle... Et que personne n'y avait encore pensé.

一 Et comme vous aimez ce qui sort de l'ordinaire, vous avez trouvé l'idée géniale ! compléta la brunette, hilare.

一 Entre autres, oui... Il faut avouer que chez nous, l'économie fonctionne tellement bien qu'on a de l'argent en trop... Alors je me suis dit : pourquoi pas ?

Le pont de pierre était pourtant impressionnant, mais en comparaison avec les autres présents dans le pays, il était plus que banal.

Le Jardin d'Été était un chef d'œuvre. On y trouvait un nombre incalculable de bosquets et bois miniatures où trouver de l'ombre sans compter les étangs, mares et fontaine où chantaient grenouilles et cigales ainsi que nageaient des poissons multicolores....

一 Monsieur Olda ! Comment avance cette cabane ? s'enquit le roi à un homme penché sur des planches.

一 Bientôt finie, sire !

一 Qui est-ce ? s'enquit la jeune fille, qui n'imaginait pas le jardinier ainsi.

一 Mon menuisier attitré.

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