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Quand les gars sont arrivés sur la place, le géant était très raide et ne nous regardait pas. C’était visible malgré les RayBan, car son regard était sur l’horizon plutôt que sur nous. Et comme il est très grand, ça se voit très bien.

Lin n’a rien dit, elle a positionné les frères derrière elle, un de chaque côté, un pas en arrière, comme on les avait vu chez nous le jour où ils sont arrivés. Connaissant notre Viking, je me suis placé à ses côtés. Je me disais qu’il allait sentir ma blessure et que ça le sortirait de son état second.

Lin devait attendre aussi, parce qu’elle ne disait rien. Mais comme elle nous tournait le dos, comment pouvait-elle savoir ? Ah, peut-être l’odeur de mon sang ? Durrani était toujours dans sa cellule, en attente. Donc ce qui nous retardait, c’était Erk.

Difficile pour l’un de nous de nous tourner vers lui et de le secouer, ça risquait de nous décrédibiliser. Mais moi, je commençais à avoir la tête qui tournait un peu, alors tomber dans les pommes devant des mecs qui n’attendaient qu’un signe de faiblesse pour nous sauter dessus, c’était pire que de secouer le géant. Je l’ai donc fait. J’ai tendu ma main blessée vers lui et je l’ai tapoté. Rien. J’ai regardé Kris, espérant qu’il allait m’aider, mais il avait l’air toujours dans les choux.

Merdouille.

Les deux frangins out, ça n’allait pas du tout. Lin avait besoin de ses deux lieutenants d’équerre… Bon, Tudic, c’est l’heure de te remonter les manches et de secouer la montagne qu’est le Viking.

Alors j’ai murmuré à Lin que je m’occupais d’Erk, je me suis tourné vers lui et, utilisant mon dos pour cacher ce que je faisais, j’ai saisi son pare-balles par les attentes et j’ai tiré vers le bas.

- Erk, il faut que tu te réveilles. On a besoin de toi.

J’ai secoué encore un peu puis le géant a baissé la tête.

- Hmm… oh merde, l’Archer, je suis désolé… Pardon, Lin.

Elle a incliné sa tête vers lui, acceptant son pardon. Erk a remonté ma manche et m’a Soigné. Puis il s’est redressé et s’est remis en position de garde derrière Lin.

- Frisé, tu peux amener Durrani.

Le Pachtoune a été sorti de sa cellule et quand il a vu les hommes et femmes qui le regardaient, il s’est tellement débattu, échappant presque à Frisé et Rocky, qu’Erk a quitté sa place et est allé le prendre par le col pour le porter – par le col, à moitié étranglé – et le poser devant nous, un peu sur le côté. Il l’a déposé avec beaucoup de délicatesse, à genou et comme l’autre essayait de se relever, il est resté derrière lui, une gigantesque paluche sur son épaule.

Lin a attendu.

La femme qui avait été attaquée par l’un des hommes du Pachtoune s’est avancée vers nous et, à distance respectable mais d’où on pouvait l’entendre correctement, a demandé qui on était.

- La Compagnie du Lys de Sang.

- Je reconnais votre écusson. Mais qui êtes-vous ?

- Nous sommes des mercenaires. Notre commanditaire est la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Notre mission est de mettre fin aux exactions de trois groupes ici. Les Fils de l’Enfer des Roumis ont cessé d’exister il y a un an et demi. Durrani cessera d’exister aujourd’hui, si c’est ce que vous voulez. Le Vieux sur la Montagne est le prochain. Quand notre mission sera achevée, l’armée française nous remplacera, avec des instructions vous concernant tous.

- Donc, une fois qu’il n’y a plus de chef, vous partez ? Vous nous laissez nous démerder ?

- Si vous le voulez, nous vous aiderons à mettre en place un mode de gouvernement qui vous convienne à tous. Les trois villages qui sont sur le territoire que nous avons arraché aux FER ont l’air de bien se porter. Vous pourrez leur parler après le jugement.

- Le jugement ?

- Oui. Vous êtes acteur de votre futur. Vous décidez de ce qu’il advient de Durrani. Si vous choisissez de le laisser en vie, il ira dans une prison en Europe répondre de ses actes. Si vous choisissez sa mort, elle sera rapide et sans douleur.

- Vous allez faire preuve de mansuétude alors qu’il a torturé, tué, donné des ordres pires encore que ça ?

- Oui. Si nous le torturons, si nous le faisons souffrir avant de le tuer, alors nous ne vaudrons pas mieux que lui.

Elle s’est tournée vers Aryana, debout à côté de nous. Celle-ci a hoché la tête à la question muette de l’Afghane, qui s’est de nouveau tournée vers nous.

- Je vois. Et les hommes qui ont suivi Durrani, qui lui ont obéi, qu’allez-vous en faire ?

- Lorsqu’ils ont approché ce village, nous leur avons donné la possibilité de se rendre et de vivre, ou de refuser et de mourir. Ceux qui sont ici, à vos côtés, face à la tombe des victimes de Durrani, sont ceux qui lui ont tourné le dos et à ce qu’il voulait faire ou représentait.

- Et comment puis-je savoir qu’aucun de ces hommes n’a participé au massacre de ce village ?

- Quand mes hommes sont arrivés ici la première fois, les coupables n’étaient pas encore partis, profitant des rares survivants.

La femme a pâli puis fait un geste à Lin de continuer.

- Mes hommes ont été pris dans une fusillade et ont anéanti ceux qui leur tiraient dessus. Et quand je dis anéanti, cela veut dire qu’il n’y a eu aucun survivant.

- Je vois.

Elle s’est tue, semblant réfléchir. Puis, d’un air décidé, elle est allée vers les villageois, ignorant soigneusement les hommes de Durrani. Les villageois se sont écartés puis rassemblés autour d’elle. Ils ont discuté tous ensemble, en pashto ou en dari, à toute vitesse.

Des mains se sont levées, en masse, à une de ses questions. Elle est revenue vers nous.

- La mort.

Lin a levé un sourcil.

- Vous ne voulez pas savoir ce dont il est accusé ?

- Ses crimes, nous les avons vécus, subis, encaissés. La mort.

- Très bien. Kitty ?

L’interpellée s’est approchée, tendant à Lin un objet long et fin, dans une pochette en tissu déjà ouverte à un bout. Plongeant la main dedans, elle en a tiré une longue épée ! J’ai halluciné. Et ça devait se voir parce que Kris a eu un petit sourire en coin, en me regardant de derrière ses lunettes, en coulisses.

Je me suis secoué. Ça attendrait. Les frangins me diraient plus tard que Lin était une fan du Moyen-Âge et qu’elle s’était fait faire, un jour, une épée bâtarde. C’était une vraie, qu’elle gardait aiguisée et graissée, dans son fourreau en bois, comme autrefois. Décidément, j’en découvrais tous les jours, sur cette femme qui m’avait choisi un soir où elle était bien seule.

Elle a dégainé l’épée en un seul mouvement fluide, sans faire de bruit. Parce que le bruit qu’on entend dans les films est ajouté en post-production, pour l’effet. Et parce que son fourreau est en bois, pas en métal.

Erk a mis un genou à terre près de Durrani, lui a retiré son bâillon, par humanité je suppose, et a murmuré :

- Avez-vous quelque chose à dire, Ashraf Abdâlî Durrani ?

J’imagine qu’il espérait des excuses.

- Allez tous en enfer, roumis, et vous autres, qui m’avez trahi, que Shaïtan vous dé….

Erk lui a vite remis sa chaussette dans la bouche. Lin s’est approchée. Se plaçant sur sa gauche, elle a pris l’épée à deux mains

- Ashraf Abdâlî Durrani, La Cour Européenne des Droits de l’Homme vous a condamné par contumace suite à une plainte déposée par l’ONG Afghanistan libre. Le peuple qui était sur les terres que vous vous êtes arrogées et qui a souffert de vos exactions vous a condamné à mort. Par les pouvoirs que m’a conférés la CEDH, et par le verdict prononcé par le peuple afghan, moi, Capitaine Lineik, je vais exécuter la sentence.

Elle s’est penchée sur lui et a murmuré très doucement dans l’oreille du Pashtoune : « Et comme je suis une salope vindicative, n’est-ce pas, Durrani, je vais être un peu moins clémente que ne le voudrait mon géant ».

Et on a tout entendu via nos oreillettes, nous autres mercenaires. Faudra que je lui demande quand Durrani l’avait insultée… Ou pas.

- Lin, a dit le géant doucement, les enfants…

Je l’ai vue hésiter. Elle s’est redressée, s’est tournée vers la porte-parole, l’appelant à ses côtés d’un coup de tête.

- Madame…

- Raya.

- Raya, nous allons décapiter Durrani. Je ne suis pas sûre que ce soit un spectacle pour les enfants.

- Capitaine, les enfants aussi ont souffert. Presque tous ont perdu un père, un frère, voire une mère ou une sœur. Et les plus âgés ont peut-être aussi souffert personnellement. Je sais bien que montrer la violence des adultes à des enfants n’est pas une bonne idée, mais ça peut servir de leçon.

- De leçon ? Que les vilains mercenaires les tueront s’ils sont méchants ?

- Non. Que toute action a sa récompense, quelle qu’elle soit. Que vous en soyez les instruments n’est qu’un à-côté.

- Très bien. Je vous laisserai gérer les traumas de vos enfants, alors, a dit Lin, un sourire en coin.

- Si je lis bien la dynamique de votre petite armée, je dirais que vous avez à gérer quelques traumas chez vos enfants, vous aussi.

Elles ont échangé un sourire de connivence puis Lin est revenue près de Durrani et s’est remise en position, la lame de son épée sur la nuque du Pashtoune.

Erk a fait preuve d’une grande confiance en tenant la tête de Durrani immobile : une main sur le front, une main derrière. Si Lin ratait son coup, elle pouvait le blesser sérieusement. Mais je commençais à connaître mes Islandais et je ne me suis pas inquiété.

Lin et Erk m’ont dit plus tard qu’ils avaient vu une terreur abjecte dans les yeux du Pashtoune quand Lin a posé sa lame sur sa nuque.

Notre capitaine a regardé le géant qui a hoché la tête. Elle a armé son bras, son épée à hauteur d’épaule puis son arme est redescendue en un arc parfait qui a tranché le cou du condamné. Il s’est affaissé en avant, sa tête restant entre les mains du Viking à genou.

Celui-ci a levé les yeux vers Lin puis a posé la tête de Durrani sur le corps. Sortant un de ses couteaux, il a tranché les liens du mort. Puis il a repris la tête, a retourné le mort sur le dos et posé la tête dessus.

Je ne me suis pas demandé ce qu’il voulait faire quand il a soulevé le mort mais je l’ai escorté jusqu’à la rivière, laissant le reste de mes camarades escorter les villageois à sa suite. Kris me suivait et Lin fermait la marche avec Raya et nos maliks.

Une fois au bord de la rivière, Erk est allé vers le tas de bois que nous avions préparé le matin même et sur lequel il a déposé, avec beaucoup de délicatesse, le corps et la tête de Durrani. J’ai pris le jerrican d’essence et j’ai arrosé le bois et le corps. Puis j’ai gardé les dernières gouttes pour la torche faite rapidement avec un bout de bois et une manche du Pashtoune.

Erk s’est placé face à la rivière, Kris l’a rejoint et je me suis mis de l’autre côté. Je me doutais de ce qui allait arriver. Et, oui, une fois tous les villageois – j’y ajoute les ex-hommes de Durrani – rassemblés sur la rive, Erk a dit un Notre Père en islandais.

J’ai mis le feu au bûcher à la fin.

Notre gentil géant a enchaîné avec son magnifique chant funèbre, celui qui m’avait tant marqué lors de l’attaque de nuit. Kris, bien sûr, a joint sa voix, son ténor un peu rauque, au baryton de velours du Viking.

Encore une fois, ce chant magnifique, avec le déchant de Kris, m’a secoué jusqu’au tréfonds de mon âme. J’ai senti des larmes sur mon visage. Et je me suis demandé si Durrani les méritait, ces larmes. J’ai jeté un coup d’œil au géant… Ouais, il y avait des larmes aussi sur son visage. Et je pense que, pour lui, Durrani méritait ses larmes, car Erk aime toute l’humanité, même les salopards.

A la fin du chant, il est resté pensif devant le bûcher jusqu’à ce que Kris lui prenne la main et le secoue gentiment. Il s’est tourné vers Lin qui a hoché la tête.

Autour d’elle, il y avait les représentants de nos trois villages et Raya, un peu à l’écart. On les a rejoints. Les villageois ne savaient pas trop quoi faire, ils tournaient en rond. Lin ne disait rien.

Sur un signe de sa tête, la patrouille de Frisé est retournée là où on avait dormi. Ils sont revenus chargés de gamelles, de jerricans de flotte et accompagnés d’Alex qui disparaissait derrière une pile d’assiettes en terre cuite, sans aucun doute trouvées dans les maisons. Doc suivait, les mains dans les poches.

Raya a tout de suite donné l’ordre aux hommes, ex-soldats de Durrani, de venir nous aider à servir le ragoût de mouton aux lentilles et oignons qu’Alex surveillait depuis son arrivée, en attendant de devoir jouer son rôle de médecin.

Ils ont à peine rechigné, encore sous le coup de la mort de leur chef. Ils devaient s’estimer heureux de s’en sortir à bon compte. Une fois leur gamelle en main, les gens se sont assis et ont mangé, sortant leurs propres provisions et partageant avec leurs voisins. Raya et nos maliks étaient à mi-chemin entre nous et les villageois.

On a bouffé nous aussi, laissant le ragoût aux villageois et mangeant nos rations.

- Erik, a dit Lin entre deux bouchées, y a-t-il des cas médicaux qui demandent ton attention immédiate ?

- Non, pas vraiment, a répondu le Viking après un moment. Ah, attends… il y a un nourrisson avec des coliques, mais je peux m’en occuper en arrière-plan de ce que tu veux faire.

- Très bien. Finis ton plat et occupe-toi des enfants. Nous, on va s’occuper des adultes.

Elle a soupiré.

- Je m’y attendais, mais je n’ai vraiment pas la fibre politique, moi. Régler un problème par la manière militaire, je sais faire, mais monter un gouvernement… C’est au-delà de ce que je sais faire.

- Heureusement que tu ne seras pas le chef de ce gouvernement.

- Dieu merci.

Erk s’est levé, a passé une main sur l’épaule de Kris qui s’est appuyé sur le contact un instant et a dit quelques mots en islandais. Le géant a hoché la tête et souri. J’ai souri aussi. Voir Kris sourire, heureux parce qu’Erk était à l’aise avec lui et avec les sentiments qu’il avait pour lui, était un vrai plaisir pour moi. J’étais très investi dans le bonheur de ces deux mecs avec lesquels je n’avais pourtant aucun autre lien que celui forgé par le temps passé ensemble et les angoisses ou souffrances vécues ensemble.

Le géant m’a donné son EMA 7 et a planqué son Behemoth sous son gilet puis s’est dirigé vers une famille en particulier. Il s’est agenouillé, avec son sourire d’enfant heureux, et a discuté avec eux. Le nourrisson se tordait et pleurait et dès qu’Erk l’a pris dans ses bras… Non, dans ses mains, parce que ses paluches sont gigantesques et que le bébé tenait dans sa main gauche seulement. Bref, le bébé a cessé de pleurer dès que le Viking l’a touché. Erk a souri en lui parlant et Kris, dont les yeux gris bleu étaient fixés sur son amour, a fondu devant le tableau. Ça m’a rappelé cette impression de Madone dans la petite grotte.

Le géant a continué sa tournée des familles, récoltant les enfants et les emmenant à l’écart pour les occuper pendant que les adultes allaient discuter du sujet barbant qu’était l’établissement d’un gouvernement. L’endroit où il les a emmenés était au vent du bûcher et à l’autre bout de l’espace où nous avions déjeuné. JD a envoyé Yaka le rejoindre.

J’ai commencé à me diriger vers lui, je voulais entendre ses histoires mais Lin m’a rappelé. J’ai surtout pas grimacé, pour ne pas miner notre crédibilité, mais j’avais vraiment pas envie de me farcir une discussion politique. Kris était là aussi, un peu mieux réveillé, on aurait dit.

- Ça va aller, Kris ? j’ai demandé.

- Je pense que oui. Si je reste assis, ça ira mieux. Tant que je ne dois pas courir ou tirer, ça devrait aller.

- Tant mieux. Comme ça on s’emmerdera tous les deux avec les discussions.

Il a souri.

- Moi aussi je préfèrerais être à ses côtés, il a ajouté, toujours souriant. Mais allons soutenir notre capitaine, c’est plus important.

On a rejoint Lin puis on est allés auprès des villageois, les nôtres nous suivant, jusqu’à Raya, puisqu’elle avait déjà discuté avec Lin et qu’elle avait servi de porte-parole.

- Raya, pourriez-vous rassembler les chefs de village ? Je voudrais discuter avec tous pour le futur.

- Oui, bien sûr. Je reviens.

Elle est effectivement revenue avec les chefs en remorque et ils se sont tous assis en rond. Kris, JD sans Yaka, Quenotte, Bear, Tito, Kitty, Baby Jane et moi nous sommes installés autour en sentinelle. Les patrouilles de Frisé et Mac faisaient les sentinelles un peu plus loin, Mac et ses hommes à moto, Frisé et les siens perchés.

- Bon, a dit Lin en dari après avoir présenté « nos » chefs. Nous, le Lys de Sang, ne sommes pas là pour remplacer Durrani. Nous vous aiderons à établir un gouvernement qui vous convienne à tous. Il est évident que tout mode de gouvernement se rapprochant de celui de Durrani risque de… disparaître aussi.

Il y a eu quelques sourires crispés chez les anciens sujets de Durrani.

- Je vous invite à discuter avec nos trois maliks ou leurs représentants, qui vous parleront de comment nous fonctionnons ensemble. Je vous laisse, mais je ne suis pas loin, bien sûr. Et avant de commencer les discussions, si vous avez des malades, des… blessés, envoyez-les dans le village, mes médecins ont préparé une infirmerie.

Elle s’est levée, on l’a suivi, allant un peu à l’écart.

- Brrr, la politique…

- Pourtant, tu en as fait un peu, depuis que tu es arrivée, j’ai remarqué.

- A peine. Juste de la police, on va dire. Mais c’était parce que nos villages étaient indépendants. Maintenant, pour survivre, il va falloir qu’ils travaillent ensemble.

- Heureusement pour les survivants, il y a de la place, maintenant, a dit Quenotte. Quoi ? Me regardez pas comme ça ! Durrani a perdu trois villages, donc trois zones agricoles ou minières. Son ancien territoire est riche, tant pour l’agriculture que pour les ressources minières.

Je me suis souvenu du gisement de lithium que les R&R cherchaient près de ce village anéanti quand Durrani était venu les en chasser. J’espérais que les villageois avaient pu en partir avant que ça parte en couille. Et…

- Lin !

- Oui ?

- Est-on sûr d’avoir tous les hommes de Durrani ici ?

- Bonne remarque, Tugdual. Tito, trouve-moi, parmi les anciens hommes de Durrani, un qui serait vaguement chef et tu nous le ramènes.

- A tes ordres.

- Et il faudrait demander à Raya si on a tous les villages, aussi, tu ne crois pas ?

- Dis donc, ça t’arrive souvent d’avoir de bonnes idées comme ça, Tugdual ?

- Que veux-tu que je te dise, Lin, tu m’inspires.

- Vilain flatteur, elle a dit avec un sourire. Tu me paieras ça.

- Je n’en doute pas un instant.

- Bon, a dit Tito qui était revenu, quand vous aurez fini de flirter, on pourra passer à la suite.

- Comme si vous étiez mieux, ton ours et toi. Bon, vous avez trouvé quelqu’un ?

- Oui, je te présente Ahmed. Il prétend en savoir beaucoup.

Lin s’est tourné vers un type très moyen, en tout, à part ses yeux verts amande au regard aussi incisif que celui de notre Viking. Lin a eu un sourire un peu tordu et lui a souhaité la bienvenue.

- Il paraît que tu en sais beaucoup, Ahmed ?

- Oui… comment je dois vous appeler ?

- Lin, ça ira. Je vous écoute.

- Vous vouliez savoir si tous les gens de Durrani étaient là aujourd’hui, n’est-ce pas ?

- En effet. Alors ?

- Alors, de tous les gardes et combattants, ceux qui sont là sont les seuls survivants. Les autres ont croisé vos hommes une fois de trop.

Lin a souri en coin, plutôt fière de nous, je dirais.

- Et pour les villages ?

- Ils sont tous au moins représentés ici. Sauf…

Il s’est tu un moment, pendant que Lin me regardait. J’ai presque pu deviner ce qu’elle pensait. Les R&R avaient causé la disparition d’un village entier, Durrani en avait effacé deux… Nous n’avions tué que des combattants, au final, respectant le code moral du Viking et celui que les Islandais avaient essayé de nous inculquer. Mais ne nous voilons pas la face, nous avions été indirectement, par nos actions de guérilla et de harcèlement, la cause de la mort des innocents. Pas responsables, car Durrani n’était pas obligé de réagir comme il l’a fait. Mais ce sont bien nos actions qui l’ont poussé à massacrer ses sujets. C’est lui qui a choisi de les tuer, mais l’aurait-il fait si nous ne l’avions pas harcelé ?

Lin me dira plus tard qu’il ne fallait pas que je tourne en rond comme ça, à revenir sans cesse sur les motifs et les raisons d’un homme devenu fou. Elle a fini en me disant que si je continuais à chercher des excuses à un salopard, j’allais finir par ressembler à ce paladin d’Erk. Elle appréciait, a-t-elle ajouté, mais elle avait besoin de soldats pragmatiques pour contrer le mysticisme et l’absolu idéalisme du Viking.

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