Jour 2 (partie 2)

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Journal Jour 2 :

 Quelle journée ! L’inquiétude au réveil déjà. Pas de nouvelle d’Henri. Aucune. Zéro. Le mec doit venir chez moi à 20h30 pour bosser, sur un projet qu’il veut LUI-MÊME monter, et il se pointe pas. Et non seulement il se pointe pas mais en plus il prévient pas. Pour un type supposé être un bourreau de travail et une machine j’étais déçu. Ou surpris je sais pas. On va plutôt dire surpris. Mais bon, rien de comparable avec la suite.

 Henri s’est pointé aux bureaux à midi ! Midi punaise ! Il est arrivé comme une fleur. Comme si c’était normal. Et avec les mêmes vêtements que la veille. Évidemment. Une histoire de nana. Y a que ça qui peut faire dévier de la route qu’on s’est soi même tracée. Enfin j’imagine. Ça a jamais trop été un sujet les femmes pour moi. Plutôt un passe-temps. Et encore. Je crois pas qu’une nana pourrait changer quoi que ce soit dans mes journées. Surtout, j’ai pas du tout prévu que ça arrive. Le projet de bouquin d’Henri c’est une bonne chose hein je dis pas, mais j’ai mes projets dans mon coin, et je vois pas trop la place que je pourrais accorder à une femme. Enfin si, je sais. Un petit rectangle de canapé pour y poser son cul le temps d’une baise et puis basta. Je vais pas m’encombrer.

 Non là Henri qui se pointe dépeigné à l’heure du déjeuner c’est pas possible. Et c’est pas respectueux. J’ai attendu moi ! Le pire c’est que quand je suis allé le voir, il m’a dit qu’il avait perdu son téléphone dans la soirée et qu’il avait vu aucun de mes messages. Même celui auquel il avait répondu ! Le culot du gars !

 Il m’a dit qu’il était désolé, qu’on pourrait se retrouver demain pour qu’il m’explique ce qu’il avait en tête. J’ai accepté bien sûr. J’aime pas le conflit. Mais il a pas intérêt à me refaire le coup ! Bon il m’a dit rapidement qu’il voulait faire une histoire avec deux types qui se mettent à écrire sur ce qu’ils voient à l’intérieur de leur journal. Les arrangements, les papiers qui se font détruire, les articles qu’on censure, les coucheries. La vie quoi !

 Enfin bref, là ce soir je suis tout seul et je vais m’en rouler un petit en m’écoutant un bon album. Je sais que c’est plus l’époque, mais qu’est ce que j’aime sortir mes CD de leurs étagères. Avoir les couvertures et les livrets c’est quand même autre chose que de simplement payer sur une plateforme pour avoir un titre. Parce que faut pas se leurrer hein, plus personne écoute d’album entier. La musique c’est comme le reste. C’est devenu un produit de consommation. Et comme les auditeurs ont les oreilles pourries, bah c’est comme pour l’alimentaire, ça achète de la merde sans s’en rendre compte.

 Bon ce sera Groundation. Young Tree. Leur premier album. 1999. Une bonne année pour la musique. En tout cas pour certains styles. Eminem sortait The Slim Shady, Dr. Dre son premier album et La Brigade accouchait du Testament, un album de rap français exceptionnel. Pour ceux qui aiment le genre évidemment. Mais bon là, j’ai besoin d’un truc posé et Groundation fera très bien l’affaire. Il y a quelque chose dans ce groupe, à la limite entre le reggae et le jazz, qui me parle énormément. Sans compter la voix d’Harrison Stafford qui est tout simplement exceptionnelle. Même quelqu’un qui ne supporte pas le reggae ne serait pas indifférent à sa musique.

 - Et donc là ça va c’est pas chiant ?

 - De quoi ?

 - Comment ça « de quoi » ? Tu me dis ce matin que tu me trouves chiant avec mes textes, et là tu me ponds une page entière sur un mec qui fait rien et qui pense qu’on a envie d’un cours sur la musique dans le monde. Parce que là pardon hein, mais concrètement la seule différence avec tout à l’heure, c’est que c’est plus moi qui écris.

 - Ah ! Le récit avance pas hein ?

 - Bah clairement pas non.

 - Peut être qu’on est simplement trop exigeant tu crois pas ?

 - Ou peut être que tu vas me lâcher le cul et que tu vas me laisser écrire comme je veux !

 - Ça te gène que je te fasse des remarques sur ce qu’on écrit ? J’avais l’impression que c’était ça aussi le truc d’écrire à quatre mains. Laisser un peu de place à l’autre quoi !

 - T’as raison. Tu peux écrire sur ce que tu veux. Et autant que tu veux surtout ! On a un objectif de mots bordels ! Et ça avance vraiment pas rapidement.

 - Alors on clôture le deuxième jour. Vas-y je t’en pris. On se retrouve demain.

 Francis s’était endormi devant son écran d’ordinateur, le visage contre le clavier, son joint à la main, l’album de reggae tournant en boucle dans l’appartement. Il s’était réveillé en sursaut au milieu de la nuit, avait un instant porté sur regard à l’extérieur puis avait rallumé le cône pour finir de le calciner avant d’aller s’écrouler dans son lit. Il aimait décidemment cette manière de s’endormir.

 - Et voilà le travail. Bon on se dit à demain ?

 - Ouais à demain. On essaie de se foutre un peu la paix ?

 - Oui. On va se faire confiance.

 - Oui c’est ça. Se faire confiance. C’est une bonne idée. Allez à demain.

 - À demain.

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