Le château de Sasse

4 minutes de lecture

En fin de journée, Aure, Enguerran et leur escorte arrivèrent enfin au château de Sasse.

C’était un château fort classique à deux enceintes, érigé au sommet d’une petite colline qui rendait les assauts plus difficiles. Certainement la raison pour laquelle les wendigos en noir avaient préféré attaquer le château de Dual.

En revanche, il ne comportait ni douve ni pont-levis pour accéder à l’enceinte extérieure, juste une lourde porte en bois à deux battants.


— Qui va là ? Annoncez-vous ! cria l’homme de garde sur le rempart au-dessus de la porte.

— La fille du marquis de Dual vient rendre visite au comte, répondit Enguerran.

— Il se dit que tous les Dual sont morts et que le château a été rasé !


Aure fondit en larme. Enguerran, tentant de masquer son émotion, reprit :


— Mademoiselle de Dual était en voyage pendant l’attaque et demande justement l’hospitalité du comte de Sasse.

— Malheureusement le comte est très malade, mais je vais faire chercher son conseiller, répondit celui qui devait être le chef de la garde tout en faisant signe à l’un de ses hommes.


Enguerran se tourna vers Aure en fronçant les sourcils. Il ne connaissait visiblement pas l’état de santé du Comte.

Aure continuait à sangloter le regard vide.

Quelques instants plus tard, la lourde porte en bois s’entrouvrit et le garde leur fit signe d’avancer.

Ils découvrirent la grande cour intérieure qui était entourée de nombreux bâtiments.

Le conseiller du comte les attendait :


— Milady, toutes mes sincères condoléances pour le drame qui touche votre famille. Cette tragédie nous a tous bouleversés. Et depuis que le mal rôde, nous gardons les portes constamment fermées. Venez vous restaurer, je vous en prie.


Ils le suivirent d’abord en direction de l’étable, de l’autre côté de la cour.

Aure et ses compagnons laissèrent leurs chevaux au palefrenier et suivirent le conseiller.


— Le garde nous a dit que le comte était très malade, tenta Enguerran.

— Hélas, oui, il est vieux, en très mauvaise santé et la querelle avec son fils finit de l’achever.

— Quelle querelle ?

— Le jeune comte Malthor ne veut pas gérer le comté et ses terres et il préfère aller guerroyer. Mon maître se désole qu’il n’y ait bientôt plus de Sasse présent au château.


Ils franchirent ensuite une petite porte en fer qui menait à l’enceinte intérieure avec le donjon et les appartements du comte.

Ce dernier était alité avec un médecin à son chevet en train de réaliser une saignée tandis que la comtesse lui tenait la main tout en lui épongeant le front :


— Oh Aure, c’est donc vraiment toi ? Je suis content que tu aies survécu. Approche-toi, je ne vois plus bien. Ce que tu as grandi, tu es une femme maintenant ! Sais-tu ce qui est arrivé à ton père et à son château ?


Aure avait gardé l’image du comte de Sasse chevauchant dignement à côté de son père revenant de la grande bataille du Nord il y a quelques années. Un homme imposant à la longue barbe blanche.

Elle avait du mal à imaginer que ce soit la même frêle personne qui gémissait maintenant du fond de son lit.


— On nous a parlés de wendigos tout de noir vêtus qui se sont répandus comme la peste, murmura-t-elle, secouée par l’émotion.

— Oui, c’est ce qu’ont dit les paysans qui se sont réfugiés chez nous. Le mal, ma pauvre Aure, le mal qui vient de l’Ouest. C’est un miracle que tu sois encore en vie, souffla le comte avec des trémolos dans la voix.

— Je ne sais pas si ce mal vient vraiment de l’Ouest. Savez-vous où nous pouvons les trouver maintenant ? questionna Enguerran.

— Et que comptez-vous faire ? Seuls contre des milliers d’hommes ! s’emporta le seigneur mourant.


La comtesse se tourna alors affectueusement vers Aure :


— Restez quelques jours ici pour vous reposer. Nous aviserons tranquillement de la suite.

— Peut-être devons-nous demander audience au Prince Karavec pour qu’il nous aide ? tenta naïvement Aure.

— C’est un bon rien, tu perds ton temps ! s’époumona le comte alors que la comtesse et le médecin essayaient de le calmer.


Enguerran ne s’imaginait pas tourner en rond au château de Sasse en attendant des éventuels renforts qui ne viendraient sans doute jamais.


— Je dois venger le marquis de Dual, tel est mon serment, asséna-t-il en regardant le malade dans les yeux.

— Malheureusement, je ne peux pas vous aider, gémit le comte plus calmement. A part vous donner le gite et le couvert, j’ai à peine de quoi assurer notre défense. Il paraît que ces wendigos sont repartis se cacher au Nord, non loin de la ville de Thugdul.


Enguerran fixait maintenant Aure, espérant recueillir son approbation pour repartir sur la route. Mais ses yeux rouges restaient vides. Elle semblait perdue.

Le comte se redressa alors dans son lit sous le regard inquiet de son épouse et du praticien.


— Mais, plutôt que de vous jeter dans la gueule du loup, j’ai quelque chose à vous proposer.


Aure et Enguerran se tournèrent vers lui et répondirent par un signe de tête l’incitant à continuer :


— Allez d’abord vers la frontière Sud et trouvez-y mon fils Malthor. Aure, prends cette chevalière pour qu’il honore à ma place le serment fait à ton père et qu’il mette son épée à ton service. C’est un très valeureux combattant.

— Et ramenez-le nous, je vous en prie, implora la comtesse.

— Où pouvons-nous le trouver ? La frontière Sud est vaste, s’inquiéta Enguerran tandis qu’Aure faisait tourner la chevalière entre ses doigts.

— Il est parti combattre les Jötunn avec le prince Balthar près de Molslo. Vous ne pouvez pas le manquer, il est presque aussi grand que les géants.


Aure se souvenait avoir joué avec Malthor autrefois. C’est vrai qu’il avait déjà la stature d’un homme alors qu’il était encore enfant.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Nicolasm59 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0