aujourd'hui - mercredi 16 octobre - 8h

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- MAMAN ! JE SUIS RÉVEILLÉE !

- PAS LA PEINE DE LE PRÉCISER, JE CROIS QU’ELLE A COMPRIS.

- LAISSE-MOI TRANQUILLE THÉO, MAMAN, ELLE AIME BIEN QUE JE LA PRÉVIENNE !

- AH D’ACCORD : MAMAN, JE SUIS RÉVEILLÉ AUSSI !

Bon, ça ne va pas être facile mais la séparation me parait inéluctable : au revoir tendre oreiller, on se retrouve ce soir.

Le réveil en fanfare a le mérite de me faire croire que ce mercredi débute comme tous les autres mercredis : surpression des tympans, tachycardie, décoinçage des paupières, connexion du cerveau. En à peine dix minutes, c’est fait. Waouh, je deviens de plus en plus rapide.

Ce jour pourrait être une pause dans la semaine, d’ailleurs c’est ça dans l’esprit de mes proches. Mais non, il y a lessive, ménage, activités sportives de Théo et Mina, devoirs, rendez-vous médicaux parfois, désamorçage de disputes souvent, et mes préparations scolaires au milieu de tout ça. Je le sais, une fois debout, le mercredi s’attaque comme un marathon.

Aujourd’hui quand j’ai posé mon deuxième pied en bas du lit, je ne sais plus où j’habite. J’ai un poids sur l’estomac comme si j’avais mal digéré quelque chose. Quand mon rubik’s cube de cerveau remet toutes les faces sur les bonnes couleurs, je réalise. Mes cauchemars de cette nuit n’étaient que l’assimilation des informations d’hier : en juillet, je quitte ma jolie petite école.

Même si je ne perds pas totalement espoir, les responsables des affaires scolaires ont été clairs lors de la réunion. Ils ont même anticipé le futur lieu de scolarité des élèves. Et moi, je vais me retrouver orpheline, baladée dans un autre endroit et ce ne sera plus chez moi.

Et je n’ai rien vu venir, j’ai préparé ma rentrée de septembre comme toutes les autres, sans imaginer qu’une épée de Damoclès se balançait au-dessus de nos têtes. Personne n’avait soumis l’idée d’une fermeture jusque là. Tout le monde savait que le vilain bâtiment de la classe maternelle était trop vieux. Tu m’étonnes, un préfabriqué de plus de quarante ans ! On m’avait même rapporté qu’il était provisoire depuis le début.

Pourtant à mon arrivée il y a dix ans, il ne m’avait pas plus gênée que ça. Cette verrue, comme certains le nomme, n’était qu’un élément d’un ensemble dont le charme m’avait immédiatement touchée. C’était le lieu que la fillette en moi recherchait pour se poser : de vieilles pierres, un escalier aux marches usées par la multitudes de petits et grands pieds qui l’avait gravi, une cour arborée, verdoyante, immense, et surtout, un pré. Un pré que les champs et les bois surplombaient. Le paradis des élèves, le nirvana des récréations.

La plus belle école du monde ! Même avec son vilain préfa.

Que va-t-elle devenir sans enfants ? sans cri ? sans rire ? Plus de vie à lui insuffler, privée d’air, elle va s’éteindre, elle va mourir. Je ne veux pas être là pour voir ça, vider les armoires, classer le matériel pour l’envoyer ailleurs, j’aurais l’impression de lui prélever ses organes vitaux. Je ne veux pas lui tenir la porte pour ses derniers instants…

- MAMAN ! THÉO, IL A PRIS TOUTE LA BRIOCHE ET J’EN AI MÊME PAS EU !

- MENTEUSE !

C’est mercredi, c’est marathon, la vie continue et le planning est chargé. Gulli donne-moi ta force, j’en ai besoin ce matin.

Bonjour mes chéris ! Allez, p’tit déj-télé ce matin, c’est maman qui invite !

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