Chapitre 3

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4 h 57. L’alarme hurle comme trois réveils en même temps. Toute la maison grogne. « Un jour on casse ton téléphone, Wilfried ! » marmonne Kiki, la tête dans l’oreiller. Il sourit dans le noir. C’est exactement le bruit qu’il lui faut pour se lever.

Même parcours. 5 h pile, les rues de Treichville sont vides, on n’entend que les oiseaux et les premiers coqs. À 500 mètres, il la voit. Robe moulante, décolleté assassin, démarche qui tue. Son cœur fait un bond. Puis se glace.

_Réaction chimique. Dopamine. Rien de plus._ Il tourne à gauche, prend le chemin le plus long, enfile ses AirPods. _Loving you is a losing game_ en boucle. Il ne la regarde même pas en passant. Elle, si. Elle fronce les sourcils. Tant pis pour elle.

À l’école, il monte les escaliers deux à deux. Orianne est là, robe rouge sang, sac à main chic. Leurs regards se croisent.

« Bonjour Wilf— — Bonjour. J’ai envie. »

Il file aux toilettes sans attendre sa réponse.

Cours d’anglais, cours d’électronique. À la pause, elle l’appelle. Mamadou ricane : « La friendzone porte ses fruits, bro. » Wilfried le fixe. Un regard qui fait taire même Mamadou. « C’est un service. Rien d’autre. »

Elle lui demande des cours particuliers. Il répond « peut-être le week-end » sans émotion. Elle insiste : « Tous les deux ? » Il hoche la tête et s’éloigne. Seul avec elle ? Autrefois c’était un rêve. Aujourd’hui c’est une bombe qu’il refuse de toucher.

17 h 10. Tout le monde est parti. Wilfried reste recopier les corrections à la main. Orianne revient en courant, essoufflée. « J’ai oublié mon téléphone ! Tu es encore là ? »

Il range ses cahiers sans la regarder. Elle s’approche. Trop près.

« Wilfried… Comment tu me trouves ? Vraiment ? »

Il recule d’un pas. « T’es belle. Intelligente. Tu mérites mieux que ce que ce campus peut t’offrir. »

Elle avance encore. Trébuche sur un stylo. Il la rattrape par réflexe. Ses mains sur sa taille une demi-seconde. Le temps s’arrête.

Puis il la repousse doucement mais fermement.

« Donner de l’amitié à celui qui veut l’amour, c’est donner du pain à celui qui meurt de soif. Le problème n’est pas toi. C’est moi. »

Il tourne les talons. La laisse là, debout, au milieu de la salle vide.

Elle reste figée. Les larmes montent. Mais il ne se retourne pas.

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