Chapitre 42 : Tout s’accélère (Attrape rêve)

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Assise dans ma cellule, qui me semble bien trop grande et silencieuse, j’attends. J'en profite pour passer en revue la semaine précédant mon enlèvement. Je savais que les choses ne tournaient pas rond. Je recevais des lettres de menaces. Je sentais ces ombres qui me suivaient. J'avais repéré ce 4x4 qui stationnait régulièrement au coin de la rue. J'ai tout d'abord pensé à un service de gardes du corps des Nations Réunies. Enfin, pour le coup, ils ne se montraient pas discrets. J'avais également découvert que mon appartement avait été mis sur écoute. J'ai compris, hélas bien trop tard que je ne m'en sortirais pas seule Les volutes qui maintenaient mon esprit embrumé, semblent s'évaporer. Comme si on avait réduit les doses de la Datura. Je me sens plus légère reprenant conscience des douleurs qui irradient mon corps. Je suis toujours attachée. Dehors, il fait jour. Les rayons de soleil qui se reflètent sur le mur opposé me font un bien fou. Je pose ma respiration. Je vais peut-être pouvoir entrer en méditation. Juste une dizaine de minutes me suffiraient pour envoyer un petit rien à Tom. J'espère que de son côté il sera prêt afin que nous tissions un lien invisible entre nos deux auras. J'inspire et expire librement, mon esprit ressent les énergies qui m'entourent, aussi infimes soient-elles. Une image se matérialise peu à peu, un fantôme surgit de mon passé. Pourquoi est-ce mon père que j'entrevois ? Pourquoi semble-t-il me crier de m'enfuir ? Le cliquetis d'une clé qui s'agite dans la serrure, me ramène rapidement à la réalité Je ne me sens pas bien. Tout devient confus. Des voix résonnent dans le couloir. Je les reconnais. La première, caverneuse est celle de mon ravisseur, ses mots sont tranchants comme des lames qu'il dépose sur mon être. La seconde m'est familière, éraillée avec un accent allemand. Non, ce n'est pas possible. Pourquoi est-il là ? A-t-il été fait prisonnier ? Les échanges ressemblent à une dispute. Je rampe pour venir me caler dans un coin, la tête sur mes genoux. Des éclats de voix se rapprochent. La porte s'ouvre.

  • Qu'est-ce que tu as fait ? T'as vu dans quel état elle est ?
  • Baisse d'un ton. Des égratignures. Rien de plus.
  • Comment veux- tu qu'elle apparaisse ce soir en public ?
  • Démerde-toi.
  • Tu aurais pu te contenter de lui faire peur.
  • Elle avait besoin que je la remette à sa place. Comme toi, quand tu l'ouvres alors que je ne t'ai pas demandé ton avis.
  • Si tu le dis. Enfin pour l'instant, elle n'est pas en forme.
  • C'est ton problème. D'ailleurs, où est ta pouffe de Sofia , tu as aucun goût. ? Elle ne va pas s'évaporer ?
  • Occupe-toi de tes affaires, je m'en charge.
  • T'as intérêt, c'est sa dernière chance. Tu sais ce qui arrive à ceux qui ne me sont plus utiles.
  • Lâche-moi.
  • Non.
  • Arrêeeete.
  • Juste une petite piqûre de rappel.
  • C'est bon j'ai compris.
  • Pas sûr.
  • Rassure-toi, Sophia va refaire une beauté à ton ambassadrice. Par contre si je peux te donner un conseil : arrête de fantasmer sur notre prisonnière. Elle te fait perdre tes repères. Je le sens bien.
  • Connard, tais-toi. Elle sera bientôt mienne je n'aurai plus qu'à donner le coup de grâce et elle me mangera dans la main comme toi.
  • Tu te trompes.
  • Ferme-la !
  • Je veux juste t'alerter. C'est elle qui va te mettre la tête à l'envers. Je me demande si ce n'est pas déjà fait.
  • Fais pas chier Karl, et tiens-toi au plan.
  • Je t'aurai prévenu. Les gars m'ont averti que c'était chasse gardée. Enfin ce soir, c'est dans mon lit qu'elle sera.
  • Et tu feras quoi ?
  • Tu devrais le savoir personne ne me résiste, une fois qu'on a goûté à mon corps on ne peut plus s'en passer.
  • Prétentieux, apparemment Mike et Tom n'ont pas succombé à ton charme.
  • Non. Mais si nous n'avions pas été dérangés, ils ne seraient même plus là pour en parler. Dommage, ce n'est que partie remise.
  • J’espère que tu n’as rien laissé au hasard. Ils deviennent un peu trop envahissants ces deux-là.
  • Tout est calé. Personne ne va rien comprendre. Et tu auras ce que tu voulais, l’ambassadrice et le monde à tes pieds. Enfin plutôt aux siens.
  • Ta gueule. N’insiste pas trop, ma patience à des limites. Ou tu pourrais le regretter à ton tour. Je ne dois rien à personne, tu n’es qu’un pion sur mon échiquier. J'ai un rendez-vous. Tu as intérêt à ne pas te louper.

Je ne sais quoi penser de cette joute verbale dont le sens reste flou. Il est clair maintenant qu'ils se connaissent. Même pire, Karl joue sur les deux tableaux. Je sens son ombre qui approche, des frissons parcourent mon corps. Qu'est-ce qu'il entend par ce soir, elle sera dans mon lit ? À quoi jouent-ils tous les deux ? Je ne suis pas un lot qu'on se dispute à la foire. Il va devoir me rendre des comptes. Mais avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, il me souleve de terre. Peut-être qu'il joue la comédie pour me sortir d'affaires ? Les chaînes tombent au sol, dégageant enfin mon corps de ce poids bien trop lourd. J'entends des talons qui claquent sur les carreaux et une voix perchée que je reconnaîtrais au milieu de vendeurs à la criée.

  • Sophia, tu penses que tu vas pouvoir donner un peu de consistance à notre Céline.
  • En si peu de temps. Tu me demandes un miracle.
  • Alors sors ta boîte magique.
  • Il aurait pu juste l'enfermer. Pourquoi tous ces bleus ?
  • Trop tard pour changer quoi que ce soit. Tu sais qu'il est incontrôlable.
  • Il est complètement fou, tu veux dire. Pourquoi as-tu accepté son deal ?
  • Tu penses que j'avais le choix. Tu le sais bien.
  • Tu ne pourras pas tromper Céline encore longtemps.
  • C'est mon affaire. Et toi, tu dois assurer. Sinon je ne donne pas chère de ta peau.
  • Qu'est-ce que tu racontes ?
  • Il a été clair. Si elle ne fait pas présentable pour le discours, c'est toi qui devra rendre des comptes.
  • Pourquoi? Je peux prendre sa place sinon.
  • Tu plaisantes. Elle est la seule qui peut remplir cette mission.
  • Alors parle-lui, elle pourra peut-être changer les choses.
  • Tu as perdu la tête. Il nous le fera payer à tous les deux. Tu n'as pas vu son regard.
  • Je pensais que tu contrôlais la situation.
  • Je ne maîtrise plus rien depuis longtemps.
  • Je vais voir ce que je peux faire. Tu me devras une fois de plus la vie.
  • Alors après cette soirée nous serons quitte.
  • Pourquoi tu la veux dans ton lit ? Je te suffis plus.
  • On peut mêler plaisir et boulot.
  • Si tu le dis. J'ai le sentiment que je ne suis qu'un simple accessoire.
  • Peut-être, d'ailleurs Tom avait l'air d'apprécier, je te le laisse si tu veux.
  • J'aurai dû tout lui balancer.
  • Excellente d'idée, une de plus.
  • Toujours mieux que ce qui m'attend.
  • Arrête de bavarder. Au boulot.

Que racontent-ils ? Ce que j'entends me chamboule. Pourquoi Tom aurait couché avec Sophia ? Comment ont-ils fait connaissance ? Pourquoi Karl et Sophia sont-ils tous les deux là ? Suis-je si bête ? Naïve ? Pourquoi n'ai-je pas vu avant la vérité ? Maître Xing avait raison quand cela me concerne, je suis aveugle. Ils m'ont trahie, mentie. Mais depuis combien de temps jouent-ils à ce petit jeu ? Alors que nous avançons dans le couloir, un air frais s'engouffre dans mes poumons. J'ai le sentiment de revivre. Je suis toujours dans les bras du Duc. Je pourrais me débattre mais je n'en ai pas la force. Je voudrais crier, les mots se perdent dans ma gorge. Je voudrais ouvrir les yeux pour le défier du regard, c'est tout simplement impossible la lumière est trop vive.

  • Sophia, ouvre la porte et va faire couler un bain . Il est temps pour Céline de se préparer.

Karl me pose délicatement sur le lit. C'est la première fois depuis que je suis prisonnière que l'on m'accorde un minimum d'humanité. Chaque parcelle de ma peau apprécie le soyeux du tissu. Mes mains libérées de leurs entraves paressent sur ma peau pour s'assurer que mes blessures ne sont que superficielles. J'ouvre doucement mes yeux, je peux enfin scruter le monde qui m'entoure. La lueur d'une chandelle abandonnée sur une petite table diffuse un petit rien qui me rassure. Une odeur agréable de miel et de rose s'échappe de derrière un paravent. Mon corps se relâche dans ce nid douillet.

  • Karl, c'est bon. Tout est prêt.
  • Attends un instant, que je profite.
  • De quoi, c'est pas le moment.
  • Tu ne vas pas me dire ce que j'ai à faire ou pas. T'es pas mon boss.
  • Déconne pas.
  • Ok je te la laisse pour l'instant.

Pourquoi continuent-ils à parler comme si je ne les entendais pas ? Pourquoi est-ce que je reste muette ? J'ai l'impression d'être une poupée avec laquelle tout le monde peut s'amuser. Je ne suis pas une chose, leur chose.Allez Céline, ressaisis-toi, fini les plaisanteries. Profitant de l'absence de Karl, je tente de m'asseoir au bord du lit. Ma tête tourne, mes bras tremblent. Je ne sais pas si mes jambes pourront supporter mon corps une fois qu'il sera debout. J'avance à tâtons dans la pièce, lever mes pieds est un vrai supplice. J'ai l'impression de réapprendre à marcher comme une enfant. Je m'appuie sur le rebord de la chaise. Mes doigts se rapprochent de la bougie qui scintille, j'ai besoin de sentir sa chaleur.. Cette petite étincelle sera suffisante pour me reconnecter au monde. L'énergie qu'elle m'apporte va m'offrir une opportunité. Vite, je dois en profiter pour leur envoyer un message. Je sens leur présence, mes amis sont tout prêts. J'approche le halo de lumière pour qu'il se reflète sur mon dos, mes pensées se concentrent sur mon tatouage : mes amis .... quand je sens une main me saisir.

  • Céline, qu'est-ce que tu fais ?
  • Lâche-moi Karl.
  • C'est l'heure.
  • Pourquoi ?
  • Pour te préparer. Tout le monde n'attend plus que l'Ambassadrice.
  • Ne raconte pas n'importe quoi ? Pourquoi m'avoir enlevé si c'est pour que je fasse mon discours.
  • T'inquiète pas, tout va bien se passer. Tu me connais.
  • Arrête ton cinéma. À quoi tu joues ?
  • Pas maintenant. Nous devons nous hâter.
  • Non. Fiche moi la paix.
  • Allez ma belle, t'as pas le choix. C'est comme ça.

Pas le temps de répondre quoi que ce soit, qu'il me prend, me jette sur son épaule comme un tapis. Je me débats en essayant de lui faire lâcher prise. Derrière le paravent se trouve une baignoire avec deux bougies. Il me jette dans l'eau, et se tourne vers Sophia

  • Maintenant, à toi de faire le nécessaire. Elle se tiendra à carreaux. Amusez-vous bien les filles.

Qu'est-ce qu'il entend par là ? Il attache mes mains au robinet. Avant de disparaître, Il dépose un bandeau sur mes yeux. Je sens les doigts de Sophia qui shampouine mes cheveux. Lentement, elle démêle les nœuds. Délicatement, elle les rince. Chacune de mes mèches libérées s'étalent sur mes épaules. Mon corps se détend peu à peu dans ce liquide qui m'apaise. Mon esprit s'échappe vers mes cascades. Une caresse insistante sur le contour de mes tétons me fait sursauter. Ses mains s'attardent sur le galbe de mes seins, descendent le long de mes hanches. Elles s'aventurent sur chaque parcelle de ma peau sans que je ne puisse l'empêcher. Mes sens sont en alerte. Elle remonte le long de mon dos, ses doigts se posent sur mon tatouage, effleurant chaque trait. Je suis prise de panique et essaie de m'extraire de son étreinte. Que veut-elle ?

  • Détends-toi Céline.
  • Mais qu'est-ce qu'il vous arrive à tous les deux ? Vous vous êtes bien foutus de moi.
  • Pas maintenant. Tu as besoin de reprendre consistance. Et on sera plus à même de prendre soin de ton joli minoi.
  • Mais putain, arrête ça tout de suite.
  • Dis pas de bêtise, t'en meurs d'envie et ça fait tellement longtemps que ton corps m'attire.
  • Même pas en rêve.
  • Alors laisse-moi faire.
  • Enlève tes sales pattes.
  • OK tant pis. Tom était moins farouche. De toute façon on n'a plus le temps. Bouge pas.
  • Je suis attachée, tu voudrais que j'aille où ?

Pourquoi parle-t-elle de Tom encore une fois ? Que se passe-t-il vraiment ? La situation m'échappe totalement. Elle me détache pour que je puisse enfiler un peignoir. Peut-être que je dois voir là ma seule occasion de m'enfuir. J'en profite pour oter mon bandeau et plonger mon regard dans le sien. Ce que je découvre me térorise et avant de pouvoir faire quoi que ce soit, deux mains fermes me saisississent par la taille et m'emprissonnent.

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