Tabou

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Steve se sentait souvent trop jeune, trop jeune pour ses propres envies, ses propres fantasmes, ses propres besoins. Cela faisait-il de lui un plus grand pervers encore ? Seul dans sa chambre d’étudiant, observant le plafond, il se demandait ce que cela ferait de passer concrètement à l’acte. Il le faisait déjà partiellement, mais ça ne lui suffisait pas. Il avait envie de plus.

Faute d’y avoir accès, il finit par se redresser partiellement pour tirer la caisse qu’il avait dissimulé sous son lit, un peu honteusement. Il l’observa un moment, mal à l’aise et pourtant, il serait mieux une fois qu’il l’aurait fait. Sa tenue n’était pas aussi complexe que celles qu’il avait pu observer en faisant des recherches, il n’y avait pas tout ce qu’il aurait aimé… Dans sa sélection idéale, il aurait ajouté bien des produits différents. Néanmoins, il caressa le cuir du bout des doigts, avec une déférence qui n’avait rien de feinte. Quand il observait ces objets, il n’y pensait pas comme à un costume qu’il allait enfiler, c’était plus que ça. C’étaient des habits qui allaient l’aider à rejoindre la partie enfouie en lui-même qui avait besoin de sortir.

Doucement, il sortit le licol qu’il allait poser le long de son nez, le mors qui passerait la barrière de ses lèvres, le corset qui viendrait enserrer sa taille et la contraindre jusqu’à le faire légèrement suffoquer et enfin, les quelques bijoux qui viendraient agrémenter sa tenue, ajoutant une queue magnifique à son arrière-train. Il posa chaque objet sur le lit avec des gestes emplies de douceur, puis, il se dénuda lentement. Son corps lui était indifférent, ce n’était qu’un corps humain, une coquille qui ne ressemblait pas à celui qu’il était vraiment à l’intérieur. Ce moi profond allait être exploré d’un moment à l’autre, simplement en se glissant dans ces vêtements. Il ne se sentait jamais aussi calme, aussi zen, aussi tranquille que lorsqu’il était totalement habillé et la procédure en elle-même l’aidait à s’apaiser.

Steve commençait toujours par enfiler le corset. C’était une pièce assez lourde qui le comprimait fortement. Pour le mettre seul, il fallait qu’il torde ses bras vers l’arrière. Il n’était jamais pleinement satisfait de la manière dont il liait cet objet. Un partenaire aurait fait bien mieux. Une fois mit, son ventre lui paraissait chaud et contracté mais ça lui semblait soulageant. Maintenant que c’était fait, l’étape suivante était un jouet anal. Ça avait paru le plus adapté. De longs crins s’étendaient jusqu’au creux de ses genoux, ils lui chatouilleraient la peau, si pendant les séances il y avait une distraction qui lui plaisait, c’était bien celle-là. Il grimaça un peu à cause de l’absence de lubrifiant, mais réussi à l’enfiler.

Il se sentait déjà mieux mais ce n’était pas fini. Il manquait une dernière chose pour qu’il se sente lui-même. Lentement, il ferma les yeux et rejeta son visage en arrière pour y déposer le licol, qu’il avait commandé sur le web des mois auparavant, le glissant sur son nez pour chasser ce qui lui restait d’humanité, ankylosant cette partie de lui-même qui ne le représentait pas et enfin, il put savourer ce moment unique. Steve flottait à présent. Il bougea le menton, lentement, pour sentir le cuir sur sa peau. Les rênes bougèrent dans son dos, le caressant. A titre d’essai, il bougea davantage, renouant avec sa partie animale. Il ne réfléchissait plus. Il ne pensait plus non plus. Il descendit du lit, à quatre pattes et fit un cercle en paradant aussi fièrement que possible. Il était cheval à présent. Un cheval sans maître, sans cowboy, sans dresseur, sans cavalier, sans partenaire alors qu’il en avait réellement besoin pour son équilibre personnel… mais tout de même un cheval.

Il caracola un moment en se laissant envahir par l’esprit animal, se laissant aller à cette étrange disparition de son humanité. Il coula sans chercher à se retenir, sans prendre la moindre précaution tout en sachant pertinemment que personne n’était là ni pour l’emmener plus loin, ni pour l’aider à sortir de cet état second.

Au bout d’un long, un très long moment même, la fatigue vint le prendre et il fit de son mieux pour trouver une posture de repos. Il ne se sentait pas assez en confiance pour s’endormir couché dans un profond abandon. Un dresseur aurait peut-être pu l’aider à atteindre ce degré de sérénité. Faute de mieux, il tanguait, debout. Pourtant lorsqu’il se réveilla, il était dans son lit. Visiblement, l’état de fatigue extrême l’y avait ramené. Contre son corset, son sexe s’était tendu et soudain, d’animal assexué il devenait autre chose. Sans vraiment réfléchir, il ferma les yeux et se frotta contre les draps balançant de grands coups de reins tout en mâchonnant le mors qui blessait les commissures de ses lèvres. Il s’imagina tenu par son dresseur, mené vers une saillie désirée et consentie mais organisée dans la soumission. Le dresseur le tiendrait court, le forcerait à parader un moment avant d’accepter qu’il n’approche l’autre soumis ou peut-être l’autre soumise pour ce que cela changerait. Et là, sans se permettre de tâtonner, sans douceur mais surtout sans hésitation, il ruerait dans l’intimité de l’autre. Peut-être que son dresseur le tiendrait par les reins, le forçant à rester bien au fond un moment ou peut-être lui permettrait-il de donner quelques coups de hanches avant… Mais dans tous les cas ce serait bon et juste.

La sonnerie de son réveil l’arracha à ses pensées, mais ses draps étaient déjà maculés de spermes. Le bruit ne s’arrêterait qu’après qu’il ait manipulé son téléphone, mais il ne bougea pas… Comme à chaque fois, le retour était des plus brutal. Qu’est-ce que de tels fantasmes faisaient de lui ? Il se vit clairement, affalé dans sa propre semence, un mors dans la bouche, des enrênements glissant le long de son dos, cette longue queue de cheval partant de son anus… Il se sentit ridicule, sale et surtout honteux. Comment pouvait-il vouloir de telles choses ? Car il les voulait, il les voulait vraiment, il voulait passer le cap du fantasme, trouver un partenaire et faire toutes ces choses avec lui et plus encore. Il déglutit autour du mors et tout en fermant les yeux, il le retira, redevenant cette coquille vide qui ne pouvait pas décemment être lui-même… Simplement enlever les équipements étaient si durs qu’il ne se promit pas de ne pas recommencer. C’était un mensonge, c’était certain et entre temps, il espérait juste qu’il arriverait à s’accepter un peu plus…

Note : les mots du jour étaient « coquille » et « pony play » et à cela c’est ajouté un défi d’écriture : inclure un pangramme (une phrase qui contient toutes les lettres de l’alphabet). Et bien c’était pas de la tarte ! J’ai fait plusieurs essais d’ailleurs…

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