Ascension

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Ça fait maintenant quelques mois qu'Eikichi s'est réveillé. L'entraînement à repris de plus belle. Si ma notion du temps n'est pas complètement morte, on doit être proche des deux ans sur cette montagne... J'ai mal de partout, mais les résultats sont présents. Les règles de sécurité ici, ça n'existe pas, je pensais que vivre dans la forêt par nous-même était dur... Quel idiot, Yokko ne m'a jamais autant manqué que depuis que je suis l'entraînement de ces foutus bonzes. Mais malgré tout, je ne me suis jamais senti aussi bien. J'ai mal de partout ! Mais j'ai l'impression d'être un nouvel homme, je ne me suis jamais senti aussi fort, et autant en forme. Ici, on bouffe jusqu'à vingt-trois heures, on se réveille à cinq heures. Et pourtant, pas la moindre fatigue, pas le moindre bâillement, j'ai l'impression d'être drogué, mais non, on bosse simplement comme des damnés. Notre régime chez les bonzes est composé entièrement de viande, aucun sucres, aucun légume, pas la moindre graine ou fruits, de la viande, tous les jours. Viande, sel, eau, rien d'autre.

- Bon ! Les merdeux ! Vous êtes ici depuis, aujourd'hui, exactement deux ans ! Et franchement, même si vos sales tronches me pètent les burnes, je dois reconnaître que vous vous êtes tous sortis les doigts ! Et c'est aujourd'hui que tout ça s'arrête. Si, et seulement, si, vous passez ce dernier test ! Ceux qui réussissent, auront droit à un ultime test, un test qui ne sera pas physique, mais psychologique, puis, vous serez libéré. Ceux qui ne réussiront pas, auront droit à... Une surprise.

Un dernier test avant un ultime test ? Ça n'a aucun sens... Mais bon, passons.

- Suivez-moi.

Suivant le bonze, nous voilà traversant les bois, ce type marche vite, en général, mais aujourd'hui, soit il est au ralenti, soit nous avons tous tellement grandis, physiquement, que ce rythme nous semble normal... Aucune idée. Nous traversons la forêt, les bêtes me semblent étrangement inoffensives, les bois bien moins dangereux, les falaises, moins traîtresses, et la rivière sur notre droite, drôlement chaleureuse.

- STOP ! On est arrivé !

Arrivé ? J'vois que dalle. C'est quand même vachement joli comme coins en revanche. Je ne savais pas qu'on avait une cascade par ici, c'est vraiment bucolique comme coins, j'aime énormément. Si ce n'était pas censé être super méga secret et dangereux, j'y aurais emmené Yokko pour un petit pique-nique ou un truc comme ça. Ceci étant dit, je doute qu'ils nous emmènent ici pour faire un pique-nique, ce n'est pas tout à fait le genre de la maison.

- Bien, maintenant, vous allez balancer vos fringues, parce qu'elles vous serviront à rien, et vous allez remonter cette cascade.

Pardon ? Remonter la cascade ? Il nous a pris pour des saumons l'enculé ?!

- Comment ça l'escalader ? On n'est pas des poissons, on ne peut pas remonter la cascade. On n'est pas des saumons ou des carpes ! On ne se transformera pas en dragon en haut ! À moins que vous ne parliez d'escalader le côté de la cascade ? Mais si c'est ça, vous admettrez que ça parait simple.

- Haru, Haru, Haru, tu m'as mal compris mon grand. Vous allez escalader la roche, sous la cascade. Et n'espérais pas échapper au flot ininterrompu, ici, l'espace entre la roche, et l'eau, est de trois centimètres cinq. Vous allez escalader cette cascade de cent-trente-trois mètres de haut, sous le poids écrasant de la chute d'eau. Ici, pas la place pour les humains, vous sortirez de cette épreuve en tant que dieu, ou vous en crèverez.

Pardon ?

- Attendez, cent-trente-trois mètres de haut, sans protection, c'est déjà interdit en dehors d'ici c'est pratiquement du suicide, et c'est sans l'eau. C'est ridicule ce " test ", c'est du meurtre ! On reste des putains d'être hum-

- La ferme Haru. On va l'faire.

- Pardon ?

- La ferme, je t'ai dit, on va le faire, après toutes les merdes qu'on a endurées, je ne m'arrêterais pas là, et aucun d'entre vous ne s'arrêtera ! Suivez-moi ! Montrons leurs ce que c'est de vivre avec panache ! Montrons-leur à quel point on est flamboyant !

Qu'est-ce qu'il branle putain ? Il s'avance vers la cascade ce psychopathe !

- Arrête tes conneries putain Eikichi, t'es un putain d'hum-

- La ferme j't'ai dit ! Suivez-moi ! J'vous ouvre la voie !

Il traverse ce fou furieux, il traverse l'eau, ou en tout cas essaie, il force, je peux le voir facilement, il force rien que pour traverser le poids ridicule de cette chute d'eau... Pourquoi tu fais ça putain ?

- Aller les gars ! Derrière moi !

Il commence à escalader... Et à chaque fois qu'il avance un peu, il se démerde pour nous ouvrir la voie, en dessous de lui, le courant s'affaiblit, à le voir ainsi, c'est comme s'il séparait la chute en deux...

- Bougez-vous !

                   ****

Bordel, je douille... Et j'ai fait que deux mètres, j'ai l'impression que chacun de mes os se font écraser par des centaines de tonnes d'acier, et pourtant, c'est rien d'autre que de la flotte ! Je sens la peau au bout de mes doigts qui s'arrache sous la pression et à cause de la roche. La friction sur mes genoux me fait souffrir le martyre, et à chaque nouveau mouvement, j'ai le sentiment que j'me vide de ma force. Encore cent-trente mètres à grimper... Putain de bonze !
Arrête de réfléchir Eikichi, grimpe, et serre les d-
Déchirant, plus bruyant même que la cascade qui m'entoure, un cri de douleur, je n'avais jamais eu aussi mal de toute ma vie. Le sang coule et disparaît dans l'eau, mais je reste accrocher à la roche, continuant de grimper. Accroché à l'une des roches, l'ongle de mon index s'est arraché, et la chair à nu est maintenant battue par la fureur des éléments.
Bordel, arrête d'y penser, respir, serre les dents... Ou ils en sont les autres ? Qu'est qu'ils branlent putain ? !
Mes camarades, ensemble, ont commencé l'ascension à leurs tours, tous à un mètre de distance les uns des autres, ne suivant pas dans la traînée que je leur laisse.
- T'as cru qu'on te laisserait être seul à douiller enflure ? À partir d'aujourd'hui, je jure de te dépasser Eikichi ! Toi et moi, on est rivaux maintenant !
Heh, Akio espèce de connard, tu piges vraiment que dalle, pas vrai ? Rien à foutre de tes bêtises de rivalités. Pour le moment, je veux juste atteindre le sommet de cette foutue cascade.
Mètres, après mètres, mes amis et moi escaladons la chute d'eau. À la limite de la perte de conscience, je continue de grimper, mon corps agissant presque par lui-même. De toute manière, à ce train-là, arrêté, ça veut dire mourir, et je ne compte pas crever maintenant ! Dans ma tête, je peux l'entendre raisonner, cette phrase de mon idole, cet homme qui m'a poussé à avancer toujours plus loin, comme c'est drôle, quand on douille, ce genre de souvenir reviennent.
Et toi Marco, qu'est-ce que tu ferais à ma place ? Toi aussi, tu as connu la souffrance, une souffrance bien plus forte que celle qui m'afflige en ce moment même. Une souffrance qui t'a fait remettre tes idéaux en question.
" Adieu jours de débauche et de liberté entre les îles enchanteresses. "
Est-ce que pour moi aussi, les jours de débauches sont terminés ? Que se passera-t-il quand j'aurais fini d'escalader cette cascade ? Est-ce que je rejoindrais la mafia comme mon frère ? Est-ce que je me battrais sur le champ de bataille ? Qu'est-ce que me prépare l'avenir ?
Oui, pour une fois, j'irais contre tes idéaux. " Les élans patriotiques, je laisse ça aux humains ", moi, j'en suis un d'humain. Une fois cette cascade vaincue, je retrouverais mon frère, et protégerais mon pays. Les menaces, ce n'est pas ce qu'il manque après tout. Peut-être que je m'engagerais dans l'armée de l'air. Où deviendrait un genre de justicier masqué comme dans les comics américains ? J'en sais rien en vrai, mais je pense, qu'avec le poids de cette cascade sur le dos, je comprends enfin, qu'il faut que je me sépare de toi Marco, mes amis sont en dessous, ils ont besoin de mon aide, et mon pays en aura sûrement besoin dans le futur. Et quand j'aurais accompli mon but, je retournerais à mes jours de débauches et de liberté entre les iles enchanteresses, aux côtés d'une créature de rêve. À bientôt mon ami.
Ma main s'accroche à la roche. La sensation est différente d'avant, cette fois, je sens qu'il n'y a plus rien au-dessus. J'ai vaincu cette fichue cascade. Il ne reste plus rien, rien d'autre qu'une dernière poussée. La peau sur ma main est complètement arrachée, il me manque plusieurs ongles, et je n'ai jamais vu mon propre torse dans un tel état, je pisse le sang, c'est un miracle que je ne sois pas anémique. Mais j'ai vaincu.
- Aller les gars ! Sortez-vous les doigts ! Montrons-leur comme nous flamboyons malgré les tonnes d'eaux qui nous tombent dessus ! Embrasez-vous au point de la faire s'évaporer !
Le premier, à me rejoindre, c'est Akio. C'est également le seul auquel je ne tendrais pas la main, évidemment, il l'aurait refusé de toute manière.
Peu après, Haru, Haku, puis les autres.
Nous n'avons même pas le temps de prendre notre souffle, que l'autre enfoiré de bonze nous rejoint, il se marre bien.
- Bon ! Vous l'avez fait ! Je suis impressionné, vraiment ! Vous êtes tous prêt pour l'ultime épreuve. Je souhaite que vous ayez tous la force mentale pour y survivre. Certains d'entre vous risquent de devenir fous après celle-ci. Suivez-moi, rentrons au Temple. C'est là-bas que vous attends l'un des plus grands " trésors " du Japon.

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