Adieux, et retrouvailles

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Dans l'Arene, homme comme femme, ça n'a pas réellement d'importance, ils se foutent sur la tronche sans réellement de discriminations... Enfin, en théorie. En réalité, à cause de cette règle, il n'y a qu'une seule femme dans l'Arène, moi. Mes parents sont... De bons parents, réellement, ils se sont toujours occupés de moi avec un grand amour, je n'ai jamais manqué de rien. Mon père m'a enseigné très jeune, comment me battre, ou frapper... Mais le combat dans un dojo, c'est toujours un peu trop " gentil ". À force, je me suis lassée de cette ambiance bon enfant, et j'ai fugué. Pendant deux ans, j'ai erré çà et là, me faisant un nom dans différentes arènes illégales, et parmi les rues du Japon. On me surnommait " Tomoe Gozen ", en hommage à la légendaire dame du même nom, elle est un peu la Benkei féminine.

C'est il y a un an, après avoir foutu sur la tronche de Yakuza du quartier de Roppongi, que je fus repérée par un homme de l'Arène. Il m'a proposé de mettre ma force au service du divertissement, dans des combats dont la seule règle est : pas d'armes... Ou en tout cas, pas d'armes conventionnelles.

Là bas, je profitais des finances des lieux. Cet endroit était l'épicentre de toute la malice et la violence de notre pays. Le monde d'en haut était si lisse, si propre, il lui fallait un lieu ou viendrait dégouliner sa saleté, son vice. C'est endroit, c'était l'Arène. Les plus puissants hommes du monde s'y retrouvaient pour observer ces mises à mort, ces jeux du cirque, on se croirait de retour, à l'époque romaine. Et pour offrir des combats toujours plus grandioses, on m'offrait des moyens quasiment illimités.

" L'argent n'est pas un problème, nous voulons voir du spectacle. Offre nous ce que nous voulons, et tu auras tout ce que toi, tu désires."

Je n'avais pas le temps de réfléchir, que déjà, me voilà en train de bidouillé différents gadgets, des " jouets ". Ceux-ci me permettaient, à moi, une petite dame d'à peine dix-sept ans, de combattre à arme égale, contre des hommes aussi larges que des armoires, capable de briser à main nue, les os de leurs adversaires. Je devins rapidement la tête d'affiche. Tout aller pour le mieux.

Puis, il est arrivé.

Descendant de l'ascenseur qui menait jusqu'à la surface, accompagné de l'autre Occidental, un garçon qui devait avoir mon âge. Par tous les dieux, un vrai canon ! Si on m'avait dit qu'il était acteur, je l'aurais cru sur parole ! Son regard, lui, racontait une autre histoire, un subtil mélange de mélancolie et de rage, ce garçon n'était pas heureux d'être ici, il donnait l'impression de ne pas avoir eu le choix. Ou en tout cas, de n'avoir rien de mieux à faire.

Ce garçon mis fin à ma série de victoires dans un combat aussi rapide que son ascension au pouvoir.

Je me tenais face à lui, équipée de mes poings à pression, prête à combattre. Prête, c'est ce que je pensais. Une fois le signal du début du combat lancé, je n'ouïe que sa respiration, profonde, calme. Puis, je sentis le sable de l'Arène contre mon pantalon. Pourtant, pas la moindre douleur, pas le moindre impact. Mes jambes flageolées, l'Arène était aussi silencieuse qu'en un jour de commémoration. Il se tenait à la même place qu'avant que le combat ne débute. Il fit quelques pas, et me tendit la main, un léger sourire sur le visage, il faisait de son mieux pour faire bonne figure face à son adversaire. Mais son regard n'avait pas changé, et pourtant, il inspirait une telle force. Ce jour-là, je compris.

" C'est pour lui. Il est la raison de ma venue ici. "

Je tentais plusieurs fois de lever mon poing face à lui, de le combattre. À chaque fois, mon cœur échappa un battement, et m'empêchait de finir mon geste. Au final, combattante ou pas, les femmes, restent des femmes. L'amour sera toujours notre plus grande faiblesse, ou alors, peut être, était elle notre plus grande force ?

" Tu t'es barré de chez tes parents parce que tu t'faisais chier ? J'sais pas si c'est fort, si je dois respecter ta détermination, ou si je dois me moquer de toi pour te comporter comme une enfant... M'enfin, ça m'regarde pas. "

Depuis tout ce temps, je n'ai cessé de lui courir après. Honnêtement, il y a des fois, ou ça frôlait presque le harcèlement. Mais il ne m'en a jamais tenu rigueur, me repoussant avec le sourire, amusé. Ce sourire était devenu ma raison d'agir, je refusais de le revoir avec ce regard triste. Il fallait qu'il m'offre son sourire. Je savais qu'il n'avait pas toujours été ainsi, personne n'est ainsi par nature. Eikichi, je voulais qu'il me montre celui qu'il était avant.

Pourrais-je un jour le revoir ?

Le temps passe, et il ne bouge pas. Plusieurs heures se sont déjà écoulé, il n'en reste pas beaucoup. S'il ne se relève pas dans les deux heures qui suivent, je ne pourrai jamais revoir son sourire. Que ferais-je à partir de ce moment ? Eikichi, par pitié, réveille toi.

****

Derrière Eikichi, posé chacun sur une pierre respective, la peau de bête, ainsi qu'un rosaire bouddhiste.

- Reposez-vous, mes frères, je porterais votre chair, pour que vous puissiez enfin cesser vos combats.

Il avançait en direction du lac acide, y plongeant une main, comme s'il cherchait à en déterminer la nature. À peine le membre plongé, Eikichi se vit obligé de serrer les dents, quand il remonta le bras, il ne restait à la place de sa main, qu'un moignon fumant.

- Ça risque d'pas être marrant d'traverser c'truc là.

" A moins que je ne puisse vous y aider."

Une voix vint briser le silence de mort.

- Et vous êtes qui ?

Une femme d'une grande beauté se dessina sous ses yeux... Une vision inattendue en ces lieux.

De longs cheveux de la même couleur que les Sakura de son pays natal. Deux grands yeux de la même couleur, un voile, une tiare, une faux, et une robe aussi noire que les ailes d'un corbeau, une bien drôle de vision en ce lieu. Mais après tout, ce n'est pas la seule drôle de chose qu'il ait aperçue ici.

- Mori, enchantée, Monsieur Kudo, je vais vous demander de monter dans ma barque, je vous emmène voir la Dame Izanami, ainsi que ses proches qui désirent également vous voir.

Curieux, Eikichi suivait la dame. Après tout, il lui était plus simple de traverser ce lac sur une barque, qu'à la neige, surtout après l'effet qu'il a eu sur sa main, il était téméraire, pas idiot.

- Du coup, vous êtes quoi ? Une autre morte ? Un genre d'assistante d'Izanami ?

Un rire éclata, sa faux battant la surface placide du lac, elle se tourna vers son passager, amusé.

- Je suis une faucheuse en formation. Pour le moment en tout cas, bientôt, je compte rejoindre la surface pour me lancer dans le hip-hop !

" Pardon ? Elle est mal foutue celle-là. M'enfin, pas besoin d'argumenter, j'sens qu'c'est surtout plein de galères pour rien."

- J'ouïe dire qu'il ne vous reste que peu de temps avant de pouvoir rejoindre votre corps ? Ce que vous allez voir parmi les couloirs de la Dame de la mort risque de vous perturber, et de vous ralentir, mais je vous suggérerais de ne pas trop vous attarder. Comme je vous l'ai dit, le temps vous est compté.

" Qu'est-ce qu'elle me raconte celle-là ? Le temps m'est compté ? "

- Qu'est-ce que vous voulez dire par là ? Comment ça, je n'ai plus de temps à perdre ? Vous pourriez être plus cl-

- Nous sommes arrivés.

Coupant le jeune homme, la barque vint toucher la berge avant d'être tirée sur celle-ci.

- Vous pouvez descendre, je vais vous guider à travers les couloirs, rester proche, on s'y perd aisément.

À peine eu-t'elle prononcée ces mots, que la voilà partie. Et Eikichi comprit ce qu'elle entendait par " on s'y perds aisément ". Le manoir était un véritable labyrinthe. Les couloirs menaient parfois sur des portes qui menaient sur un mur. Certaines entrées n'étaient autre que des tableaux accrochés à ces mêmes murs. Des escaliers menaient sur des fenêtres, certains montaient pour atteindre l'étage d'en dessous. Ce lieu n'avaient à ses yeux, pas le moindre sens. Rien, ici n'étaient compréhensible pour lui, tant et si bien qu'il finit par avoir des vertiges rien qu'à l'idée de continuer de traverser cet interminable dédale.

- Ne vous arrêtez pas, nous sommes bientôt arrivés, lui dit la dame aux cheveux rose.

" Elle ment", pensa Eikichi, le trajet dura encore de longues minutes, et rien, absolument rien de ce qu'il traversait ne ressemblait à ce qu'ils avaient vus par le passé, ou n'annonçaient une quelconque fin dans ces ridicules couloirs. Il n'était rien ici, qui lui faisait croire qu'il allait être libéré de son calvaire.

- On arrive bientôt ? J'crois qu'j'vais gerber...

Finalement, son calvaire pris fin. Il traversa un miroir, puis, posa ses pieds dans une large pièce. Une des fameuses " salles du trônes ", si souvent aperçue dans des films.

- Le voilà enfin, le jeune homme qui mit mon domaine sens dessus, dessous. Il n'y a pas de quoi être fier, jeune mortel. Le monde de la mort n'est pas un domaine dans lequel n'importe qui peut faire n'importe quoi... Mais bon, je ne m'attendais pas à quelque chose d'autre. Vous êtes bien un Kudo, cela ne fait aucun doute. Vous lui ressemblez en tout point.

****

La fameuse déesse Izanami ? C'est pas comme ça que j'l'imaginais... Elle est plus... Enfin, un peu moins que... Pas tout à fait comme... Différente quoi.

- J'lui ressemble ? À qui ? De quoi tu parles ?

Elle sourit, pourquoi elle sourit ? Sa mâchoire pend en plus ! La moitié de son visage est pourri, littéralement, dans ce genre de cas, fait en sorte de ne pas avoir d'expression faciale, parce que là, c'est crade.

- C'est à moi que tu ressembles, mon chéri.

Mon chéri ? C'est quoi c'te voix, ça m'dit un truc... Vaguement, très vaguement, une voix que j'ai pas entendue depuis longtemps. T'es qui t-...

- Maman ?

Une femme me tend les bras. Son portrait craché. C'est pas possible. Qu'est-ce qu'elle ferait ici ? J'veux dire, j'sais bien qu'elle est forcément quelque part dans ce monde. Mais ici, spécifiquement ? Pourquoi ?

- On a des choses à se dire, toi et moi. Je t'ai observé tout au long de tes aventures... Et t'as fait pas mal de connerie... Mais avant, viens faire un câlin à ta maman.

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