Chapitre 25 Insipide
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- Bonjour.
- Ah non. Tu n’entres pas.
- Pardon ?
Les bras croisés, l’air embêté, Insipide n’a pas l’air de vouloir quitter mon pas de porte.
- J’ai dit : tu n’entres pas.
- Euh…
Je soupire.
- Tu ne fais pas bon ménage avec l’hypersensibilité.
Il rit, et le vide d’émotion que porte ce rire me glace jusqu’aux os.
- On peut parler, mais je n’ai rien à te dire.
- Tu as souhaité ma venue, sans quoi je ne serais pas là.
- Impossible.
- Si.
- Non.
- Si.
- NON ! Putain.
Je prends une grande inspiration et desserre mes poings. La trace de mes ongles s’est inscrite dans mes paumes.
- C’est vrai… Il m’arrive de souhaiter… une pause. Que tous ces sentiments, ces ressentis, ces émotions, ces voix qui chantent dans ma tête, ces personnages qui dansent… disparaissent.
Mais… c’est un souhait éphémère. - Mmm… Tu es sûre ? C’est lourd à porter, la saturation permanente de tous tes sens, tant physiques que mentaux. L’absence de silence. Les ressentis de douleurs, de désespoir, de leurs âmes souffrantes...
- Je…
- Les couleurs trop vibrantes qu’elles font mal aux yeux, les émotions trop fortes qui te submergent, les crises d’angoisse, l’agoraphobie, la claustrophobie, l’anxiété…
- Stop. Si je te laisse venir… tout ça… c’est fini ?
- Oui. Tout sera insipide.
- Une seconde… Donc… la beauté des émotions, les sentiments positifs, l’émerveillement, les couleurs magnifiques… les ressentis profonds, la compréhension des âmes… le sens de l’art…
- Eh oui. Tu seras libérée.
- Mais je ne veux pas. C’est peut-être fou, mais je l’aime, cette douleur. Je l’aime parce qu’elle ne vient pas seule. Elle s'accompagne de trop de beauté pour que j'y renonce volontairement. Ce serait comme choisir de devenir aveugle pour ne plus voir la laideur.
Il soupire.
- Tu es bien trop compliquée. J’aurais dû écouter Vide.
- Va le retrouver, tiens. Je n’ai pas besoin de toi. Et encore moins envie de t’avoir dans ma vie.
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