Chapitre 11

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Il me tardait d’être mercredi, de partir quelques jours avec ma mère et ma gamine, de nous éloigner de ce quotidien rythmé par les cafés du matin, les infusions du soir, les lettres et les énigmes. J’avais envie de respirer, de laisser le temps glisser aussi doucement qu’une barque poussée par le vent.

Je n’avais pas vu grandir Olympe. Elle avait déboulé dans ma vie comme ça, un soir de désespoir. Du haut de ses dix-sept ans, avec son sac à dos élimé et son vieux lecteur MP3. Le temps que j’ouvre les yeux sur ce qui elle était, son adolescence se barrait déjà.

En feuilletant les albums qu’elle m’avait laissés, j’avais entraperçu la petite fille intrépide qu’elle avait été avant de devenir cette jeune fille timide découverte sur le seuil de ma porte. Il m’avait fallu apprivoiser toutes ces années en l’espace de quelques semaines. Pourtant, le regret de ne pas avoir été présent à ses côtés me piquerait à jamais le coeur.

À l’aube de son anniversaire, je pensai à tous ceux qu’elle avait passés aux côtés de sa mère. Je l’imaginais, les yeux hypnotisés par les bougies plantés dans le gâteau comme autant des flammes d’espoir, le souffle au bord des lèvres, prête à formuler son vœu habituel : celui de retrouver un jour son père.

Ma décision était prise. Si mon monde devait s’écrouler, je voulais profiter un maximum de ces deux journées qui se profilaient et offrir à Olympe un anniversaire à la hauteur de ses espérances. Elle disposait de toute manière des mêmes indices que moi c’est-à dire pas grand-chose. C’est moi qui détenais l’atout majeur en conservant l’aveu de Rave. En tant que maitre du jeu, je décidai donc de reporter la partie finale de quelques jours.


**


Olympe était déjà levée. Quelque chose n’allait pas. Le regard perdu au fond de sa tasse, elle y faisait tournoyer une petite cuillère. Chose encore plus étrange puisque, comme moi, elle aimé son café, noir et corsé.

— Tout va bien ? lui demandai-je.

Elle tourna la tête dans ma direction. Pas ce sourire, pitié !

Était-ce l’idée de passer son premier anniversaire sans sa mère qui lui causait autant de douleur ? Je ne savais pas trop comment la réconforter. J’avais conscience que, dans certains cas, même les mots les plus doux ne pouvaient rien contre la douleur du moment.

Je m’assis près d’elle, silencieux, et posai ma main sur la sienne. Elle était gelée, comme l’avait été mon coeur ces dernières années.

— Olympe, finis-je par dire, je ne remplacerai jamais ta mère. Je ne te promets pas non plus d’être un père exemplaire mais je te promets de faire du mieux que je peux.

Elle m’adressa un regard qui me retourna le coeur. Il ressemblait à celui que m’avait lancé Rave avant de partir à cette putain de soirée.


**


À l’atelier, je finalisai le dernier cadeau d’Olympe. Avec le collier que je lui avais choisi – une fine chaine en or blanc sur lequel pendait un petit nœud marin torsadé – ce coffret de bois signifiait beaucoup pour moi. J’avais passé de nombreuses heures à creuser le bois pour former les nervures d’un tronc d’arbre. J’en avais passé autant à graver les trois plumes suspendues à l’une des branches.

Ces deux cadeaux représentaient à mes yeux le lien qui nous unirait toujours, Olympe, Rave et moi en dépit de l’absence, du vide ou de la mort.

J’appliquai une dernière couche de vernis et laissai sécher. Il ne me restait plus qu’à enfouir le précieux collier à l’intérieur et rentrer déposer ce cadeau sur la table de la cuisine, symbole d’une autre vie à trois.

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