Chapitre 6

2 minutes de lecture

Thomas leva les yeux, incrédule.

- Alors quand tu dis que ton histoire avec lui est personnelle, tu ne plaisantes pas !

Pablo sourit et reprit les photos une à une :

- Sur celle-ci, il est installé à son atelier devant une série d’épreuves avant cuisson. Là il est avec Suzanne Ramié, la propriétaire des lieux. Et ici…

Visiblement Pablo était ému et avait de la peine à poursuivre. Thomas prêta attention au cliché où l’on voyait une dame d’âge mûr accompagnée d’une jeune femme devant une bâtisse provençale. Une partie de la photo manquait à côté de la jeune femme, comme découpée.

- Ici, reprit Pablo, c’est Suzanne Ramié avec ma grand-mère, Dolorès Pérez. C’était une réfugiée de la guerre d’Espagne que Suzanne avait recueillie à Lyon, juste avant de monter l’atelier Madoura à Vallauris.

Abasourdi, Thomas tira tout haut la conclusion qui s’imposait :

- Picasso et cette Dolorès ont eu un bébé ?

- C’est ma mère, Cécilia Pérez. Elle est née en 1949 et ma grand-mère est morte en couches. Picasso était déjà reparti. D’après Suzanne, il n’a jamais su que ma grand-mère était enceinte ; elle a élevé ma mère comme sa fille.

- Mais c’est complètement dingue cette histoire de famille !

- Oui pour toi, car tu l’entends pour la première fois. Pour moi c’est une banalité. Mais chargée car je ne peux jamais en parler. C’est pourquoi je voulais te remercier de ne pas avoir publié l’empreinte que tu as trouvée dans le vase. J’avais vraiment besoin de digérer ces informations.

Thomas ressenti une certaine culpabilité. S’il n’avait pas parlé de sa découverte, ce n’était pas par bonté d’âme. Avec une empreinte identique découverte dans un vase phénicien du IVème siècle avant Jésus-Christ, le scandale aurait été incontrôlable !

Inconscient des doutes qui assaillaient son interlocuteur, Pablo poursuivit :

- Cet été, j’ai fouillé les archives familiales. J’ai découvert un courrier qui décrit la présence d’un autre céramiste à l’atelier Madoura à cette époque. Je pense que c’est lui l’auteur du Vase en forme de femme.

Pablo tendit un courrier en papier ancien à Thomas. Celui-ci le saisit délicatement et lut le passage que Pablo pointait du doigt.

La renommée de l’atelier devient internationale, nous accueillons depuis hier notre premier céramiste estonien ! Val est un jeune homme discret que j’ai trouvé en admiration devant Pablo à l’atelier. Il ne parle ni français ni espagnol, mais j’espère le convaincre de rester un peu chez nous. Tu sais comme cela me réjouit chaque fois que la famille s’agrandit.

Le courrier était signé « Ta Suzanne »

Thomas était subjugué par le récit du drame familial. Pablo expliquait :

- En fait, tout a été fait pour cacher l’existence de cette personne, je l’ai constaté dans le reste de la correspondance de Suzanne. Même la photo avec ma grand-mère a été découpée…

- Mais cela ne prouve rien, avança Thomas.

- Je sais. Mais je me dis que s’il y a eu désaccord artistique avec Picasso, il a pu marquer son territoire en plaçant une empreinte digitale dans le vase, tu vois ?

- Pourquoi pas…

- C’est ce que je me suis dit, cria Pablo, dont l’excitation était montée d’un cran. Et que devient un jeune homme étranger en colère, réfugié en France et sans le sou ?

- Je ne sais pas, répondit Thomas.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Jacquesb ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0