Chapitre 10
***Kirk POV
Nous sommes tous les trois assis, profitant de quelques minutes de calme, Uhura, le capitaine et moi venons de déballer trois bières et nous les sirotons. Nous refaisons le monde. Starfleet vient de nous envoyer la suite de leur note, pour continuer à tester leur théorie. La dernière en date ? Retirer le noyau cérébral des humains, au moment où ils deviennent parents. Cela dans le but de les rendre « neutres » et « libérés » du poids du vécu et du passé. Bones monte en pression, cela vient heurter ses valeurs.
« Sérieusement, Jim ? Allons. Tu ne serais pas James Kirk, si tes souvenirs étaient effacés. Starfleet a le droit d’imaginer de nouveaux concepts, mais en tant que CMO, je dis et je redis que nous n’allons pas tous les tester. Car au final, que reste-t-il ? De l'humain, des humains qui n'ont pas forcément demandé à venir au monde, qui n'ont pas demandé à en prendre plein la gueule. Des humains qui font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils sont ».
***
Le lieutenant Uhura vient de nous rapporter le contenu du message qu’elle a intercepté quelques minutes plus tôt. Apparemment, Starfleet a une mission pour nous. A la seconde où elle expose les données, le Dr Mccoy laisse échapper un grognement.
« Sérieux ? Non mais j’y crois pas. Ils peuvent pas nous lâcher la grappe, pour une fois. Soit ils nous demandent de tester des théories à la con, soit ils nous envoient à l’autre bout de la nébuleuse. »
Dr Mccoy qui râle, ça fait partie du décor, tout comme les portes métalliques qui se déverrouillent. Mr Spock entre, il a quelque chose dans ses mains. Et moi qui ne croyais jamais revoir cette créature. Je suis à deux doigts de m’étouffer de travers, en entendant le Dr Mccoy pousser une gueulante :
« Ah non, bordel, il manquait plus que ça ! »
« Merde, c’est bon, ça a été l’enfer, la dernière fois, avec ça à bord. C’est qui ? C’est Jones qui nous les a encore refilés ? J’vous préviens, je vais me le faire, cette fois. »
Personne n’arrive à en placer une. C’est là que je vois le lieutenant Uhura se lever, prendre l’adorable petite boule de poils et marcher vers le docteur :
« Tenez docteur. Prenez-le, caressez-le, il vous calmera les nerfs ! »
Je jette un coup d’œil à Bones, il est blême tellement il fulmine. Je fronce les sourcils en signe de désapprobation et je secoue la tête en direction de la jeune officier. Un léger « ttttt » est sensé lui faire prendre conscience de la situation. Je m’approche d’elle.
« Lieutenant, vous êtes dangereusement proche de l’insubordination ! »
Je lui adresse un léger reproche, avec un brin de fermeté dans la voix, et aussitôt j’ajoute :
« Mais vous avez raison ! »
Un soupir exaspéré de Bones ponctue mon petit sarcasme, mais je sais que j’arriverai à le dérider et à le calmer. Mr Spock a eu l’idée de ramener un petit compagnon de jeu pour les enfants, c’est tout à son honneur.
***
Une autre nuit stellaire est tombée sur l’Enterprise. Je débarrasse les cadavres de bouteilles et je marche vers l’infirmerie. Je déverrouille la porte, je glisse ma tête vers la gauche :
« Bones, je peux m’incruster ? »
Il hoche la tête avec un sourire.
« Mission accomplie. Demain je récupère le tribule et j’injecte le sérum. Il ne grossira pas et ne se reproduira pas ! »
C’est une bonne information.
« Demain nous boirons un verre à la santé de ce pauvre mâle qui ne se reproduira plus ! »
Cela le fait sourire. Mr Grincheux, c’est fini. Je le connais Bones, il retombe comme un soufflé. Bon, j’admets qu’il a souvent des raisons de râler, mais ne comptez pas sur moi pour le lui dire. En attendant, il attrape le tricordeur et nous sortons de l’infirmerie, pour nous diriger vers le quartier des enfants. Nous ouvrons les portes que nous avons basculées en mode silencieux et nous entrons. Dans l’obscurité de la pièce, pas un bruit. Les enfants dorment. Une douce lueur émane d’une veilleuse. Les enfants sont bien couverts, pas un petit pied n’est sorti de dessous les draps. Je m’approche de la table, il y a un morceau de papier avec quelques mots écrits dessus, probablement de la main de Tommy, car les plus jeunes enfants n’ont pas encore acquis toutes les subtilités de l’écriture. Sur le papier, un enfant a dessiné le tribule, avec ses poils bruns et hirsutes et quelques mots :
« Merci pour le tribule. On va être gentils ».
Je montre le papier à Bones, cela le fait sourire :
« Je ne pense pas qu’ils tiendront ce genre de promesse, mais c’est l’intention qui... »
Il ne finit pas sa phrase, je tourne la tête vers lui, je n’aime pas ce que je lis sur son visage.
« Jim, nous avons un problème, Mary ne bouge pas ! »
Il a pris Mary dans ses bras et a couru à l’infirmerie pendant que je restais avec les garçons.
***Mccoy POV
Je suis entré dans la pièce, tandis que Jim va voir Ray. Le tricordeur dans ma main, en un réflexe, je marche vers la petite Mary. Je saisis son épaule, la secoue doucement, mais elle ne répond pas. Je sens toute la chaleur qui émane de son petit corps. Je vois les données apparaître sur l’écran, ça ne me plaît pas du tout. Je ne perds pas une seconde, je la soulève de son lit et je file vers l’infirmerie où Christine Chapel vient aux devants de moi. Nous allongeons la fillette sur un des lits.
« Elle a une forte fièvre et ne répond pas.
***Kirk POV.
Le lendemain. Spock, Bones et moi sommes dans la salle de débriefing.
« Pour l’instant, je ne peux pas expliquer ce qui ne va pas. »
« Pourrait-il s’agir d’une conséquence de l’infection de Scotty? »
Bones secoue la tête.
« J’ai fait un prélèvement. Rien de probant. On dirait que quelque chose stagne. Je n’ai jamais vu une telle chose avant ! La fièvre est élevée et les médicaments ne sont pas super efficaces ! »
« Docteur, le diagnostic est impératif. Notre situation demeure préoccupante. Si Mary n’a, ne serait-ce qu’une fraction minuscule de son esprit encore possédé par Gorgan, cela pourrait être extrêmement dommage, voire fatal pour nous et tout l’équipage. Puis-je suggérer une fusion mentale avec l’esprit de Marie. Nous pourrions… »
« Une fusion mentale ? Triple buse. Et puis quoi encore ? »
La voix de Bones, comme une claque, vient stopper les arguments de Spock.
En proie à une colère noire, il repousse sa chaise. Il vient de claquer un coup de poing sur la table, du genre à s’exploser le poignet sur la table.
« Ça va pas la tête, non mais vous êtes marteau ? »
Je le vois tempêter sur place, brasser de l’air, remettre sa chaise à sa place, tandis qu’au même moment, les portes coulissantes s’ouvrent :
« Excusez-moi, j’ai entendu parler d’un marteau ? Vous voulez que j’aille chercher ma boîte à …. »
Le regard acéré que Bones lui lance le sèche sur place.
« Pourquoi pas la décérébrer, aussi, pendant qu’on y est ? Vous en avez d’autres des idées à la con, comme celle là ? Il est hors de question, vous m’entendez, hors de question... »
Scotty me fait signe, je me lève et je marche avec lui jusqu’à la porte.
« Capitaine, un message officiel de Starfleet, ils veulent une explication du retard, concernant la mission ! » Je dis à Scotty que je contacterais Star Fleet dès que la bataille sera finie.
Dans la salle derrière nous, la situation conflictuelle s’aggrave.
« Et Spock, ne me dites pas que c’est irrationnel, sinon, je vais vous anesthésier les cordes vocales ou le larynx. »
Bones est hors de lui et question boîte à outils, il n’est pas à prendre avec des pincettes, notre médecin chef officier. Bon sang, Mr Spock nous l’a bien mis en rogne et je me demande ce qui va sortir de cette confrontation. Je décide alors de faire ce que j’ai l’habitude de faire : faire cesser les hostilités entre mes deux compagnons de vaisseau et les ramener à la raison.
« Bones, du calme. Tu sais très bien que tu vas lui faire confiance. C’est bien toi qui m’a dit : cet homme est froid, mais pas froid à ce point là ! »
« Ouais, OK, vous marquez un point, capitaine. Mais on parle d’une petite fille, pas des poissons panés surgelés que Kahn a fourgué dans une torpille. C’est une petite fille, Jim, une petite fille, je ne laisserai pas... »
Puis il tourne le dos et marche jusqu’à la porte.
« Je retourne à l’infirmerie ! »
****POV d’Uhura
La petite Mary a le visage et le corps écarlate. C’est venu comme cela, sans prévenir... Nous sommes tous très inquiets ; le docteur Mccoy est d’une humeur massacrante, il relit toutes ces notes, me fait envoyer des dizaines de messages à Starfleet pour essayer d’avoir un début de piste, un bout de réponse. Nous ne l’avions jamais vu dans un tel état depuis… depuis le jour où on lui avait rapporté le corps du capitaine Kirk, étendu dans un sac mortuaire. Je n’avais jamais oublié ces instants où Scotty, effondré, m’avait désigné d’un signe de tête le caisson radioactif qui avait tué notre capitaine. Nous avons peur pour Mary, cette fièvre est si intense que la petite fille peut ne pas se relever. Nous ne pouvons rien faire, le docteur Mccoy se sent impuissant, et nous finissons par nous demander si la petite ne va pas mourir. Moi je suis d’avis qu’il faut tenter la fusion mentale, mais je comprends les réticences du docteur Mccoy. Je sais à quel point il est touché par tout ça. Et pourtant il en a vu de toutes les couleurs depuis qu’il est officier de Starfleet. Il affronte tout avec un détachement professionnel hors normes, mais je sais que rien ne le laisse indifférent. C’est un docteur rude mais attentionné qui fait toujours preuve de compassion et je le vois si préoccupé. Je pose gentiment ma main sur son bras, pour le réconforter. Je lui souris et je quitte l’infirmerie.
Un peu plus tard. Les enfants ont peur, ils sont tristes, ils viennent tous les jours à l’infirmerie pour voir Mary. Il n’y a pas beaucoup de moyen de les faire travailler, nous tentons de les distraire, Christine et moi leur avons appris à fabriquer des petites poupées de laine et Scotty leur a montré comment sculpter des petits animaux dans des cubes de polymères. Il leur a dit de ne pas s’en faire, il a une confiance totale dans la science du Dr Mccoy et il répète que ça va aller. Il y croit. Il a été le dernier patient du docteur et il est la preuve vivante que tout se guérit dans l’infirmerie du docteur Mccoy.
***Spock POV
Ce matin là, nous avons pu travailler un tout petit peu, je les soumets à des petits test que j’ai moi-même programmés sous un format que j’avais connu étant enfant : un mitraillage de questions et des réponses qu’on s’efforce de donner le plus rapidement possible. Je les entraîne à jouer la montre, à se dépasser. Chaque test est paramétré en fonction de chaque élève, à son niveau et des réponses données au test précédent. Mais ce qu’ils préfèrent, c’est s’occuper du tribule.
« Allons, les enfants, il suffit maintenant. Cette créature a assez mangé, ce n’est pas logique de le gaver. Ce n’est pas un canard. »
L’adorable petite créature poilue fournit un excellent sujet d’étude : son métabolisme, son anatomie. Autant vous dire que Nyota ne cesse de nous répéter qu’il est hors de question de le disséquer.
***Kirk POV.
Je suis allé à la salle des archives de l’Enterprise, j’ai ouvert le coffre qui contenait quelques vieux souvenirs de mes jeunes années. J’avais apporté un gant de base-ball et des balles. Ce gant est très spécial car il a appartenu à mon père. Bien sûr, je n’ai jamais pu jouer avec lui, mais j’ai fait un sacré paquet de parties avec mon frangin. Je suis sûr que les garçons aimeront passer un peu de temps à jouer. Nous avons de longs couloirs vides pour nous entraîner. Je préfère éviter certains endroits, la machinerie est bien trop précieuse pour supporter le moindre contact avec une balle de base-ball. Nous élisons domicile tous les cinq dans les couloirs du pont 5, à côté de mes quartiers. Je lance quelques balles et les garçons se relaient pour les attraper et me les renvoyer. Voilà qu’il me prend l’envie de mettre Tommy au défi de reculer d’une douzaine de pas pour attraper un missile.
***Vingt secondes plus tard, Tommy est encastré dans la paroi, un peu sonné. Il a tout donné, il n’a pas quitté la balle des yeux et l’a attrapée, avant de se fracasser contre le pan de mur du couloir dans un tintamarre ahurissant. En grimaçant et en cachant mes yeux avec ma main, je me précipite vers lui pour évaluer l’étendue des dégâts. Je lui tends la main pour l’aider à se relever. A part une petite bosse, il n’a rien mais le mur est défoncé. Le boucan a sorti Bones de l’infirmerie, il n’est pas seul. Mr Spock est à ses côtés. Évidemment il hausse un sourcil, extrêmement perplexe, tandis que Bones nous regarde, les bras croisés, une épaule appuyée contre l’autre cloison.
***Spock POV.
Je lance aux enfants un regard résolu avant de commencer :
« Jeunes gens, vous connaissez la pénalité pour avoir détruit l’équipement de Starfleet. Allez dans vos quartiers, vous y êtes confinés jusqu’au dîner ».
Et là, je vois le capitaine Kirk échanger un sourire avec les enfants, il lève les deux épaules et vient vers, l’air contrit :
« Mr Spock, je crains alors de devoir vous abandonner le commandement du vaisseau pour rejoindre mes quartiers, voyez-vous ! J’ai…. »
De toute évidence, notre capitaine a décidé de me compliquer la tâche. S’il ne prend pas au sérieux les mesures disciplinaires qu’un tel comportement appelle, je vais avoir du mal à faire entendre raison aux enfants.
« Je ne saisis pas, capitaine. Pouvez-vous vous expliquer ? »
« C’est ma faute si Tommy s’est encastré dans la paroi, c’est moi qui ai lancé la balle, un peu fortement, et Tommy a mis un point d’orgue à l’attraper ! » explique-t-il, en riant. Ce qui provoque la même réaction chez le docteur Mccoy. Je décide de les laisser à leur délire, non sans ajouter.
« Je commence à être soucieux de votre état mental, capitaine. Se livrer à de tels enfantillages dans un des couloirs de l’Enterprise. Je doute que cela sera du goût de Mr Scott. Par contre, docteur, je maintiens ce que j’ai dit, et je me tiens à votre disposition. Ne tardons pas trop ! ».

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