Deux grand prédateurs

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L’appartement de Camille et Jonas est exactement le genre d’endroit qu’Ariane aime commenter : plancher ancien, murs un peu bruts, affiches d’expos entassées en vrac, lampes art nouveau dont la lumière ambrée éclabousse les canapés. Ça sent la figue et la cire chaude, avec un fond de vin rouge trop aéré.

Lucy les a traînés là en disant « ça va vous détendre », mais Élias sent surtout la tension électrique courir le long de son dos. Ariane est assise à côté de lui sur le canapé mousse, sa robe prune s’ouvre à chaque croisement de jambe, révélant l’ivoire plein de sa cuisse et ce petit tanga en soie qu’elle a choisi uniquement pour le rendre fou.

Depuis qu’ils ont franchi la porte, son sexe ne s’est pas vraiment détendu. Il bande à s’en faire mal, confiné sous son jean, et il sait qu’Ariane le sent. Elle le regarde parfois avec un demi-sourire, mi-invitation mi-moqueur, qui lui donne envie de la saisir par les hanches et de la prendre là, sur ce foutu canapé.

Pas question qu’elle garde encore le dessus. Ce soir, c’est moi qui la tiens.

Pendant que Jonas parle musique et que Camille rit d’un trait d’auto-dérision, Élias glisse sa main sur la cuisse d’Ariane. Elle se raidit à peine, puis son souffle s’accélère. Ses doigts s’enfoncent dans le coussin, mais elle ne dit rien. Il continue, explore plus haut, frôle l’ourlet de sa robe, puis pousse sous la soie lisse.
Son pouce trouve la chaleur moite déjà accumulée. Elle ferme les yeux, ses lèvres s’entrouvrent.

— « Arrête… » souffle-t-elle, mais sa voix est trop basse, trop brisée pour être crédible.

Élias plante ses yeux dans les siens, avance un doigt. Il caresse son sexe brûlant, puis laisse remonter son pouce, suit la ligne de la raie, s’attarde juste un souffle trop près de son anus. Ariane se contracte si violemment qu’il croit qu’elle va gémir à voix haute. Ses ongles griffent son avant-bras, pas vraiment pour l’écarter — plutôt pour le retenir.

Lucy les regarde, menton posé sur ses doigts croisés, ses yeux rieurs pétillent. Elle prend une longue gorgée de son verre et glisse, faussement candide :

— « Vous deux, ça va ? On dirait un duo qui se parle par télépathie sexuelle. »

Camille éclate de rire, se penche pour murmurer à Jonas :

— « Regarde leurs mains, c’est à peine s’ils essaient de le cacher. »

Jonas hausse un sourcil, amusé :

— « Franchement, c’est un peu hypnotisant. Comme deux bêtes qui se flairent. »

Ariane rit, mais son rire est sec, trop haut. Ses doigts agrippent plus fort la cuisse d’Élias comme pour ancrer son propre corps. Lucy en rajoute, son sourire carnassier glisse de l’un à l’autre.

— « Sérieux, Ariane… si vous avez besoin d’une pièce fermée, je peux leur demander de libérer la salle de bain. »

Ariane lui décoche un regard incendiaire.

— « Lucy, ferme-la… »

— « Quoi ? Je précise rien. Je balance même pas les confidences que tu m’as déjà faites. Je sais me tenir. »

Un éclat trouble traverse le ventre d’Élias. Les confidences ? Il fixe Ariane, qui détourne les yeux, ses joues carmin. Un petit courant glacé le traverse — il devine qu’il ne sait pas tout, et ça excite un coin obscur de son esprit.

Camille, à demi-hilare, tape l’épaule de Jonas.

— « Ça me rassure, on n’est pas les seuls à être des malades. Mais vous deux, c’est quand même un art. »

Ariane rit, mais un peu sec, ses doigts viennent chercher ceux d’Élias, qu’elle serre fort — son ancrage pour ne pas partir en éclats. Lui se penche, murmure tout bas à son oreille, un sourire cruel à la bouche.

— « J’espère qu’ils ont une pièce fermée ici. Parce que si tu continues à mouiller comme ça, je vais pas attendre. »

Ariane ferme les yeux, prend une longue inspiration, puis les rouvre, son regard brille d’un mélange de défi et de trouble.

— « Va te faire foutre… » souffle-t-elle, la voix presque cassée.

Lucy observe la scène, son sourire plus tendre maintenant. Elle ne dit rien, mais elle voit tout.

Alors qu’ils se remettent à parler festival de rue, Ariane glisse sa main sur la cuisse d’Élias, remonte sans vergogne jusqu’à presser contre son sexe dur, le masse lentement à travers le jean.
Un râle muet monte dans la gorge d’Élias, il bascule légèrement la tête en arrière. Ses dents s’enfoncent dans sa lèvre pour ne pas laisser échapper un son.

— « Toujours aussi dur, Élias ? » murmure Ariane, un sourire cruel aux lèvres. « T’imagines si Lucy se retournait maintenant ? Elle verrait exactement comment tu brûles. »

Il la fixe, son regard d’acier devient presque noir.

— « Continue. Mais sache qu’au premier couloir vide, je te plaque contre le mur et je te fais supplier pour que ça s’arrête. »

Ariane pousse un petit rire nerveux, ses hanches roulent malgré elles. Sa main caresse encore, lentement, puis presse plus fort. Ses ongles laissent une ligne chaude contre sa cuisse.

Lucy les interrompt encore, un éclat amusé dans la voix :

— « Hey, pas trop de télépathie là-bas, vous me rendez jalouse. Ari, ça fait combien de temps que t’as pas respiré ? »

Ariane respire soudain, haletante, comme prise en faute, puis se tourne vers Lucy :

— « Suffisamment pour que je regrette de pas avoir pris un deuxième verre. »

Camille hoche la tête, un sourire complice :

— « C’est beau à voir, quand même. Vous êtes un petit show vivant. D’ailleurs, vendredi on passe au Château des Lys. Soirée masquée, seulement sur parrainage. Vous deux seriez des oeuvres d’art là-bas… »
Ariane lève un sourcil, fait mine de décliner, mais ses cuisses serrent la main d’Élias.

Camille glisse une carte ivoire entre les doigts d’Ariane — « Tiens, au cas où l’envie te chatouillerait. »

Lucy chuchote — « Le Chateau, c’est pas un bar. C’est un télescope tourné vers les pulsions. »

La discussion se calme doucement. L’alcool a un peu fléchi les rires, le dessert est terminé. Jonas propose un dernier fond de vin, que tout le monde refuse avec des gestes mous. Ariane ne lâche plus la main d’Élias. Ses doigts sont moites, mais elle le tient comme une corde de rappel.

Lucy se lève en étirant ses bras au-dessus de sa tête, un sourire encore accroché au coin des lèvres.

— « Je crois que c’est l’heure de laisser ces deux-là aller pécher leur rédemption ailleurs. »

— « Ou leur punition, » ajoute Camille en riant.

— « Ou les deux, » conclut Jonas, hilare.

Ariane attrape son manteau. Elle a du mal à marcher droit. Pas à cause du vin — à cause de la chaleur battante qu’Élias a laissée en elle.

Ils remercient leurs hôtes, les embrassent à demi, échangent des promesses de revoir l’expo. Puis, enfin, l’air frais du soir.

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