45. Retour sur Terre (partie 2)

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Mardi 6 novembre 2013

Je ne suis guère impatiente de retourner à la citadelle des scribes. Mais je suis pressée de quitter Kitanesbourg. Les relations diplomatiques commencent à être pesantes, et elles ne font pas avancer l’avènement de mon règne.

Mes courtisanes ont disparu. Siloë pénètre dans la suite impériale. Elle porte une capucine de fourrure rousse qui détonne avec le bleu de ses cheveux.

— Nous sommes prêts pour le départ.

— Où sont les filles ?

— Parties enfiler leur nouvelle tenue d’apparat. Tu veux un coup de main ?

— Oui, pour serrer mon plastron.

Elle passer derrière-moi et remarque :

— Tu as l’air tendu ?

— Chaque matin, je sens la victoire m’échapper. J’espère que nous ne prenons pas la mauvaise direction. Et puis, me faire tripoter à nouveau pas les scribes ne m’enchante pas beaucoup.

— Tu préfères quand c’est moi ?

Elle pouffe, alors je lui rétorque :

— T’es bête !

— Allez ! Six jours de route. En chemin, on pourra rentrer rassurer nos parents, non ?

— Pas bête.

— Et si Victor traîne du côté du lycée, on le chope ?

— Grave ! Tu crois qu’on peut emmener Sigurd avec nous avec les pilules ?

— Ce serait logique. Mais est-ce qu’il atterrirait bien dans ta chambre ?

— Va savoir. C’est pareil. Si je gagne, je pourrais faire venir mes parents au mariage.

— Grave ! T’invite les miens, aussi.

Elle revient devant moi, passe ses deux mains sur mes joues :

— T’es la meilleure, tu vas gagner.

Elle ouvre la porte, et les quatre femmes de ma garde rapprochée mettent un genou au sol. Elles portent des heaumes avec une fente verticale à chaque œil. Une arêtière protège le nez jusqu’au menton et des dreadlocks artificielles ornent leur casque jusque sur leurs épaules. Le design général du heaume donne l’allure de gros crânes noirs et intimidants. Le reste de l’armure est proche du corps, décorés d’angles acérés. Ainsi, leur poitrine reste mise en valeurs. À leur hanche se trouve une ceinture de crânes de petits animaux, plongés dans du métal fondu. Un pagne de fourrure protège leurs hanches et on discerne à peine leur peau délimité par leurs cuissardes d’acier. Elles portent chacune une épée à la hanche et une dague près du mollet.

— Magnifiques armures. Je comprends pourquoi vous me laissez la surprise.

— Comme elles passeront du temps près de toi et du coup de l’Empereur, la sélection a été rude. On a choisi les plus loyales. —Nous nous mettons en route, et Siloë ajoute dans un murmure — et les plus lesbiennes.

A voix basses, je questionne :

— Comment vous les avez testées ?

— Je les ai draguées.

J’écarquille les yeux.

— Tu les as toutes…

— Non, juste draguées, Léna. Aucune n’a eu le privilège de mes mains. Ne sois pas jalouse.

— Je ne suis pas jalouse. Mais si t’es bi, je veux bien le savoir.

Elle m’étreint et rit :

— T’es la seule des deux mondes réunis à qui je mettrai les doigts dans le jus.

— C’est poétique.

— Et tu peux courir pour que j’y mette la langue.

— T’es dégueu, sérieux !

— Ton copain empereur, par contre, s’il me chauffe avant votre mariage.

— Tu n’es plus ma pote !

Nous rions, puis gagnons le hall. Mes six courtisanes m’attendent, toujours avec la même jupe en fuseau, mais les épaules enveloppées dans un plastron ressemblant au mien avec un col de fourrure. Leur ventre reste nu, mais sous le nombril, mon emblème peint recouvre leur ancien tatouage de symboles.

Dans la cour, une marée humaine vêtue de noire m’espère. De nombreuses bannières de crânes à dreadlocks dominent la foule. Sur le haut des marches, Malika sourit fièrement de la surprise. Siloë me dit :

— Voici les supporters qui vont t’accompagner. Les huit femmes qui n’ont pas été retenues pour ta garde ont rejoint les rangs de Sigurd. Nous avons de la nourriture pour six jours, un aide cuisinier pour Jeannine, dix danseuses pour la grande représentation, des musiciens, et les rangs des supporters vont gonfler au fur et à mesure de notre approche de Varrokia.

Je pose une main sur l’épaule de Fantou, et une autre sur celle de Zélia. La foule est intimidante. Ils doivent être une centaine, avec des gueules de supporters prêts à taper ceux de l’équipe d’en face. Ça va être pire que des rencontres de footballers, dans les pubs de Varrokia.

— Ça va partir en couille, là-bas. Bon ! En route !

J’ai perdu l’habitude de chevaucher. Le soir venu, mes cuisses crient Alleluia lorsque Sigurd stoppe notre cohorte. Ma tente est montée rapidement, entre celle de Cendre et celle de Malika.

Mes quatre sentinelles personnelles se postent autour de l’entrée. Leur allure fait peur moi-même. Les fillettes emmènent nourritures et fourrures à l’intérieur. Je n’ai rien à faire. Malika me dit au sujet de ma garde rapprochée :

— J’ai organisé les tours de surveillance. Veux-tu qu’elles dorment dans votre tente.

— Je n’ai pas trop envie d’être reluquée dans ma tente.

— Je n’ai pas bien saisi le terme, mais j’ai compris non.

— C’est ça.

— Veux-tu que je fasse puiser de l’eau pour votre bain ?

— Non merci

— Bonne nuit Léna.

— Bonne nuit aussi.

Je m’isole avec Siloë et mes six servantes.

— J’avais oublié à quel point les journées étaient longues à dos de véloce. Zélia, aide-moi.

La nouvelle courtisane défait mon plastron, et je libère alors mes seins comprimés dans le bustier. Fantou m’admire et n’ayant pas eu l’occasion de lui dédier de mon temps ces derniers jours, je dis :

— Je propose qu’on fasse un dîner sous les fourrures et que je vous raconte une nouvelle histoire.

— Je suis curieuse, avoue Siloë.

Les fillettes s’empressent de se libérer des armures, puis se glissent une fois nues sous les épaisses fourrures. Ne voulant pas marquer mon privilège, je fais glisser mon tanga à mes chevilles avant de les rejoindre. Fantou s’installe dans mes bras. Je pose mon menton dans ses cheveux puis questionne :

— Vous connaissez le Roi Lion ?

Siloë hésite défait sa robe puis fais deux pas sur la fourrure. Je regarde sa culotte bleue et lui demande :

— C’est soirée privée, réservée aux tenues de soirée.

Elle se mort la langue puis baisse son sous-vêtement pour nous rejoindre.

— Hakuna matata, vicieuse.

Mala se colle contre elle, lorsqu’elle s’assoit. Je l’avertis :

— Tu vas raconter avec moi.

— Pas de souci, je connais par cœur.

Grignotant quelques viandes séchés et morceaux de pain, gobant quelques raisins sucrés, nous prenons notre temps. Je fais presque pleurer les filles à la mort de Mufasa. Et lorsqu’elles commencent à s’endormir, Siloë me charrie :

— Tu ferais une excellente Maman.

— Elle est mieux qu’une Maman, marmonne Fantou qui tombe de sommeil.

— Demain, il faudrait aller voir la mienne, dis-je.

— Je pense que la mienne aussi.

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