Premier chapitre
Tilelululeliiii Tilululeliiiiiiiiiiii.....
Mercredi, midi et demi, agitation fébrile,
Fourmilière effervescente de sortie de cours volatile,
Rumeurs et chaleurs
Flux chaotiques et battements de coeurs.
Il fait très beau, une jeune femme blonde assez grande, souriante, très fine, tient compagnie à sa pote, brune et ronde plus réservée.
Elle l’alpague en quittant le grand portail de l’école.
« tu manges chez moi ce midi, hein Oriane? »
« mais carrément, chez moi y a du monde et chez toi y a une grande cuisine avec personne »
« hehe cool, on verra ce qui traine dans le frigo, je sais pas trop »
« pas grave, t’as toujours des tas de trucs sympa mmmmh »
« haha mais c’est surtout que t’es pas difficile »
« trop pas, c’est toi qui est difficile, tu devrais voir chez moi, y a jamais rien ou c’est pas bon »
« mouais c’est parceque tu bouffes tout »
« heuuu, Victorine, t’es en train de me traiter de gloutonne là ? »
« … »
Une troisième élève passe en courant devant les deux demoiselles.
« hey, a demain Oriane, Victorine, bye les girls »
« tchao Maria, travailles bien »
« tu parles, en prépa on fait que ça, péniiiiiiiiiible, moi, je fais une pause, je passe voir mon mec »
« haha, profites, profites, mais sois sage hein »
« uiii uiiiii »
Les deux complices lorgnent Maria s’échapper en trottant pour tailler dans son dos, Oriane attaque d’emblée.
« mh celle-là, elle va jamais réussir je pense, toujours chez un mec ou un autre »
« uéé t’as trop raison, je sais pas combien elle s’en est tapés cette année »
« elle m’a parlé de trois au moins »
« je suis certaine que c’est plus »
« mouais pas impossible, vu le nombre de mecs qui la tchatchent, rien que dans la classe »
« mais c’est carrément abusééé quoi »
« mh fais pas ton offusquée hein, s’ils ne la draguent pas elle, c’est toi qu’ils viennent chercher »
« pffffff, pas vraiiiiiii, t’exagère »
« même pas, c’est quand que tu t’y mets toi, d’ailleurs
« je me mets ? mais mais mais à quoi ? »
« haha l'esquive à deux balles, aux mecs bien sûr »
« heu, héééé bééé, heu, quand tu auras un chéri, promis je m’y mets hehehe »
« genre… »
Pendant qu'Oriane lève les yeux au ciel, Victorine rabat sa besace de toile, dont la bandoulière de cuir se presse sur son débardeur beige, entre ses deux petits seins pointus, dont on devine facilement qu’ils n’ont pas de soutien.
Oriane porte quant à elle sur son dos un sac qui ne ressemble plus à rien, déposé sur son sweat, volontairement hyper large et foncé, pour tenter de masquer son trop plein de formes.
Victorine dépasse son amie de quelques centimètres, vêtues à l’opposé en haut elles sont jumelées sur le bas, pantalons amples en coton vert olive.
La blondinette appréciant l’ampleur pour tenter de donner un peu de volume à ses courbes, et Oriane recherchant plutôt à noyer la véracité de ses formes dans des flous d’étoffes.
Les deux étudiantes se connaissent depuis le Lycée, comme elles partagent des ambitions d’ingénieurerie, elles sont complices de cours, et papotages depuis un moment.
L’équilibre un peu cliché entre la blonde mince et lumineuse et la grosse brune taciturne leur colle une image péjorative, mais leur maturité en matière de ragots implique qu’elles passent outre toute réflexion à leur sujet.
L’une comme l’autre, vivant chez papa maman, en tant que travailleuses consciencieuses discrètes et toujours occupées, ne se sont jamais senties particulièrement investies dans l’ouverture aux prétendants masculins leur tournant autour.
Puisque bien sûr il y en a...
Et comme par hasard, Victorine est trois fois plus courtisée qu’Oriane.
Souvent, Oriane est jalousement courroucée du succès de sa copine, tandis que Victorine se plaint sans cesse d’être harcelée, …
Qu’elle en a marre, qu’ils sont collants, que c’est tous des cons,…
Mais, paradoxalement, peut être par un indicible instinct de plaire, elle ne tari pas en yeux doux.
Ce qui ne veut pas dire qu’Oriane n’apprécie pas les compliments, mais sa personnalité l’a engoncée dans son épaisse écorce au sens propre comme au figuré.
Pleine de principes et de complexes, elle est très peu encline à solliciter les autres, comme le fait Victorine, de sourires ou douces attentions.
Leur sens scientifique commun, mêlé à leur côté studieux, pas genre première de classe gnangnan, mais plutôt intello décalées, les ont aisément rapprochées.
Pour bosser comme papoter des heures, critiquer tout le monde ou bricoler, cuisiner comme festoyer.
Ce type de rapprochement à dix-huit ans favorise la confidence, l’intimité, permet de faire l’exutoire de ses pensées, doutes ou anxiétés par le partage, l’écoute, l’ouverture, la simplicité.
Voici les deux demoiselles arrivées à destination.
Une grande maison centrée sur un joli terrain protégé de grandes haies,
Un petit coin tranquille proche de la ville, ou les oiseaux chantent et les fleurs s’épanouissent.
Quelques buissons remplis de baies,
Une clameur pastorale qui s'immisce
« arrivées »
« ouaiiiiiiiis cool, à la bouffe! »
« goinfre! »
« tsss même pas vrai »
« bien sur que si, c’est tout ce qui t’intéresse »
« mé non, je m’intéresse à toi aussi princesse »
« mouais mouais mouais »
« mé siii ma vicvic chériechérie »
« faux, t’as même pas demandé ce que j’avais déniché de neuf »
« rhoooooo désolée, alors y a quoi dans ta cave secrète? »
« ha bah tu veux pas savoir alors bon tant pis hein »
« claaaaaaaackkkk »
Oriane, d’un coup sec non prémédité, claque vivement du plat de sa paume, les fesses de son amie, jusqu’à l'en faire basculer en avant.
« aiiiiiiiiiiiiil, mé t’es malade toi »
« hiihihihihiiiiiii »
« pff mouais ça te fais rire »
« mais trooooo, allez, montres tes arrivages »
Victorine, l’air courroucé, se masse les fesses et rajuste son pantalon puis devance Oriane pour se diriger vers un étroit escalier descendant au sous-sol.
En bas des marches, elle allume l’interrupteur qui illumine une véritable caverne d’Ali Baba.
Plusieurs établis, des centaines d’outils, des appareils en tout genre plus ou moins disloqués, ordinateurs, grille-pains, fauteuils, cafetières, appareils audios…
« regarde ça »
Victorine brandit fièrement un moule à gaufre électronique ultra sophistiqué.
« oh mais génial, tu penses qu’on peut le ravoir? »
« j’en sais absolument rien, mais on va tenter »
« mmmmmmh ouiiiiiiiiiii des gauuuuufres j’en veux »
« hé voilaaa, goinfre, goinfre, goinfre, prouvééééé »
« t’es conne »
« hahahahaahahaha, tiens regarde y a ça aussi »
« ha yes, pas mal, visseuse et sèche-cheveux ? t’en a pas déjà quatre de chaque ? »
« lol, si mais ceux si ont l’air mieux, alors y faut qu’on les répare, si tu répares le sèche-cheveux il est pour toi »
« hehe merci mais bon je me sèche jamais les cheveux »
« bah tu devrais parfois tu serais toute mimi »
« ouah, dis que je suis moche aussi »
« non tu es belle mais tu serais encore plus mimi »
« … »
« bon tu peux fouiller, je vais pisser vite fait et on se fait à grailler ? »
« okk »
La blondinette, technicienne en herbe, se dirige vers le fond de la pièce pour ouvrir la porte d’un petit local.
Oriane émerveillée, chipote à quelques appareils déposés de ci de là.
Comme sa copine, elle adore descendre dans cet atelier, le frère de Victorine a une trentaine d’années et travaille en tant que responsable SAV d’une grande chaine d’électroménager.
Ce qui est bon pour la casse, il le récupère pour tenter de réparer tant bien que mal et se retrouver avec du matériel gratuit.
Il a cependant ramené beaucoup trop de choses qui ne se réparent pas, ce qui fait que cette cave est un fouillis total d’épaves en tout genre.
« pschsssschhhsssschhhhhssssssss »
« heu Victorine, tu fermes jamais la porte quand tu fais pipi ? »
« hahahaha ah non chez moi je pisse comme je veux hein pis c’est pas comme si tu m’avais jamais vue »
« hehe mouais je vois, ou enfin, sur le coup j’entends, j’entends, tu as un très joli pipi »
« merci, merci, à la bouuuuuffe »
« goinfre »
« oulala mademoiselle se venge ? »
Oriane toise Victorine, mais se presse pour remonter l’escalier et cette fois découvrir le frigo avec des yeux encore plus brillants que pour le gaufrier.
« rholololooooo okkiiiii, on se fait un carbo aux champi double crème ? »
« mh bonne idée ( de goinfre hihihi) »
« allééé au boulot, oui je suis une méga goinfre et j’ai méga faim »
« et t’as pas trop chaud avec tes vingt-cinq gros pulls »
« j’ai que un sweat et un sous pull, mais oui j’ai chaud »
Menant parole au geste, Oriane retire d’emblée ses hauts trop larges et trop chauds pour se retrouver en t-shirt. Son vêtement, malgré son abusive largeur, moule parfaitement sa très imposante poitrine.
Victorine jette un discret coup d’œil à sa copine, un voile envieux assombri son visage un instant,
Le repas se prépare, bon enfant mais gourmand,
Les deux complices sont déjà expertes dans les épices,
Elles excellent dans l’art des délices,
Mais aussi propres et organisées,
Elles laissent place à un plan de travail immaculé.
« alors on bosse, ou on tente le gaufrier ? »
« a ton avis hihihihi, si Maria baise, nous on peut bien se tenter quelques gaufres non ? »
« hahaha, je suis d’accord, mais si ça marche pas au bout d’une heure, on révise quand même hein »
« allez, deal »
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