Que fait la police ? 

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   Les patrouilles du matin s’avèrent généralement calmes. Elles consistent à se rendre sur les sites ayant subi dégradations et casses durant la nuit. Il faut relever les témoignages du voisinage, noter les dénonciations, le mécontentement et les craintes des victimes. Ou bien tenir des permanences pour voir défiler le public qui croit encore en l’efficacité des forces de l’ordre, les imaginant prêtes à rendre justice dans l’instant. Ainsi que ceux qui viennent, réalistes, déposer une plainte pour que leur compagnie d’assurance veuille bien les rembourser des dommages occasionnés. Ils n’auront aucune nouvelle de l’enquête censée découler de leur passage. Les policiers saisissent leurs propos sur de lents ordinateurs obsolètes, perdant leur temps à n’être que des petites mains peu agiles. Premiers échelons de ce qui ne ressortira qu’en statistiques, dont la hiérarchie, sur injonction du ministère de tutelle, jouera dans un sens ou l’autre selon la proximité des élections. On fera peur, au bon moment, exposant une part de la réalité ou au contraire, on minorera tout pour suggérer une bienheureuse efficience. Grande estime portée à la population du pays, comme si ces adroites manipulations l’empêcheront d’être plus au fait de ce triste quotidien que leurs édiles.

   Les patrouilles du soir se révèlent souvent mouvementées. Des tapages nocturnes précèdent de peu les altercations, dont les protagonistes finissent invariablement par se rabibocher sur le dos des agents. Lorsque ce ne sont pas les témoins, ceux-là mêmes qui n’ont rien vu, qui s’opposent aux arrestations. De toute façon, une forte majorité d’entre elles se résout par la libération trop rapide des fauteurs de troubles à l’aurore. Après de fastidieux enregistrements des différentes dépositions, émaillées d’insultes et de crachats. La plus zélée des jeunes recrues, en moins de six mois, aura compris qu’elle ne défendra que de façon bien relative ses concitoyens. D’où un manque certain d’empressement lors des demandes d’interventions. Qu’il est difficile de garder la paix où règne l’impunité ! Les récidivistes éprouvent leur dixième rappel à la loi, comme une sévère sanction, une brimade insupportable. Pauvres concepts d’ordre et de sécurité !

   Durant leur période de formation, bien souvent les élèves se taisent, retenant remarques et exemples vécus pour eux-mêmes, lors des requêtes de retours d’expérience. Ils ont ressenti, en situation fort réelle, que le moindre contrôle d’identité tourne immanquablement au psychodrame, quel que soit le public concerné. Les professeurs, bien que presque tous cadres expérimentés ont du mal à conserver leur attention, et même de la crédibilité, s’ils exposent les fondamentaux de la mise en place d’une position d’autorité. Chacun l’admet nécessaire pour les autres, mais refuse de s’y plier. Vous feriez mieux de poursuivre les voleurs, plutôt que de me coller une contravention. C’est sûr que c’est plus facile et moins fatigant. Pourtant, quand des bolides vrombissent en bas de chez eux, tous se demandent où est la police.

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