A.2 Gwënaelle

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Gwënaelle se réveilla comme à son habitude aux abords de sept heures du matin. Elle quitta aussitôt son lit et alla se préparer avant de revenir toujours au pas de course jusqu’à son bureau. Il ne restait à Gwënaelle que quelques secondes de liberté et elle activa prestement son holoécran qui afficha en grand un portrait d’Honestie à côté de son orca. Gwënaelle ne l'admira qu’une seconde et fonça dans sa boîte de réception où un nouveau message était arrivé. Un hurlement de joie retentit dans la chambre quand elle vit apparaître le symbole de l’ordre des haïkadens, sa requête pour passer le test et devenir écuyère avait été acceptée. L’adolescente devait maintenant se rendre dans l'une des bases haïkaden pour son examen.

Main sur la bouche pour contenir son excitation, elle referma le courrier et le copia sur son holoCom rapidement avant de le supprimer. Du coin de l’oreille, elle entendit des pas dans le couloir. Elle eut juste le temps d'éteindre la fenêtre et de sauter hors de son bureau avant que la porte ne s’ouvre. Droite comme un piquet, elle salua d’une grande révérence.

— Bonjour Madame Dincer !

La femme qui venait d’entrer plissa les yeux et s’avança jusqu’à se trouver à un mètre de Gwënaelle. Elle l’inspecta attentivement, l'observa sous chaque couture à la recherche du plus menu défaut puis fit le tour de la chambre. À chaque pas, le son des ongles claquant contre sa montre retentissait coutre les murs jusqu’au moment où Dincer approcha le bureau. Elle s’arrêta net et, durant ce que Gwënaelle vécut comme d’interminables secondes, Dincer fixa la chaise avant de finalement la décaler d’un centimètre vers la gauche.

La noble argentée poussa un soupir intérieur et osa tourner la tête vers la matrone.

— Comment vous sentez-vous, mademoiselle Devos ?

— J’ai quelques courbatures dans les jambes, mais je suis prête pour la leçon de ce matin, Madame Dincer.

— Voilà ce qu’il se passe quand on fait la fête. Vous rappelez vous des sujets?

— Mathématiques et littérature, récita Gwënaelle certaine d'elle.

Dincer hocha du chef et lui fit geste d’avancer. Gwënaelle se dirigea vers sa salle de classe où l’attendait déjà un holoécran couvert d’équations. Pendant que l’adolescente se cassait la tête sur les premières questions, Dincer lui apporta son petit déjeuner. Malgré la faim qui la tiraillait, Gwënaelle prit garde à manger par tout petit bout avant de finalement commencer à savourer le thé. Aussitôt, elle se retourna vers sa surveillante.

— Ce n’est pas le thé ordinaire ?

— Votre palet est attentif. C’est un présent que nous avons reçu ce matin de la part de Jasper Gardner. Ce thé pousse uniquement dans le jardin des Weiss. Autant vous dire que la tasse que vous tenez entre vos doigts coûte le prix d’un skycraft.

Dincer pinça ses lèvres et pointa la tasse de l'index.

— Pourquoi l’avoir offert ? questionna-t-elle.

— La tradition veut que quand deux familles importantes se rencontrent, leur serviteur respectif échange aussi des cadeaux, répondit aussitôt Gwënaelle. Normalement, il est essentiel de n’offrir que ce que l’on servirait à ses maîtres pour montrer son appréciation de l’autre.

Dincer sourit légèrement et remplit une fois de plus la tasse de la jeune fille.

— Il semblerait que vos leçons commencent à rentrer. Vous isoler sur cette planète a été un très bon choix de la part de votre mère.

Gwënaelle acquiesça malgré le poids qui s’installa dans le creux de son estomac.

— Jasper Gardner, c’est le majordome des Weiss ? demanda Gwënaelle pour changer la conversation.

— Oui. Un homme d’un grand talent si ce n’était pour sa langue sournoise qui siffle tel celle du serpent. Prenez garde aux personnes comme lui, car on ne devine jamais ce qu’ils ont derrière la tête.

Gwënaelle continua d’écouter les leçons de sa professeure tout en complétant les équations durant plusieurs heures. Une fois terminé, Dincer lui donna un sujet de langue et la laissa pour aller préparer le repas du midi. Elle se dépêcha de le remplir et quitta sa chaise pour se rendre jusqu’à la cuisine où la femme s’affairait.

— Madame Dincer, j’ai fini. Puis-je aller utiliser mon holoCom quelques minutes.

— Quel est le nom de la planète capitale des mondes valag’fend ? demanda Dincer sans même se retourner.

— Feris !

— Combien de consuls siègent à la tête de la Confluence ?

— Cinq ! Un pour chacune des quatre races du traité de la spirale et un dernier pour représenter toutes les espèces mineures de la Confluence.

— Qu’elle est le résultat de sept fois la racine de douze ?

Cette fois, Gwënaelle ferma un œil et calcula le plus vite possible dans sa tête.

— Vingt-quatre virgule deux milles…

— Vous avez cinq minutes avant que le repas ne soit prés.

Sautant de joie, Gwënaelle se précipita jusque dans sa chambre et s'écrasa dans son lit. Elle fit apparaître l’écran de son holoCom et parcourut la liste des nobles soliens pour trouver celle qu’elle cherchait. Le profil de Vaillance s’afficha devant ces yeux, couvert des centaines de photos que la jeune fille avait prises. Les paupières de Gwënaelle tombèrent légèrement, aucun nouveau cliché n’avait été posté depuis hier et la noble aux cheveux de jais n’était même pas connectée. C’était d’autant plus étrange que Vaillance ajoutait de nouvelles photos presque toutes les heures en temps normal.

— Rencontrez-vous un problème, mademoiselle Devos ? demanda Dincer en entrant dans la chambre. Cherchiez-vous à contacter la jeune Weiss ?

Si Dincer n’était pas tombé loin de la réalité, Gwënaelle n’était pas près d’avouer à la matrone ses réelles intentions.

— Oui, je voulais remercier Vai… Mademoiselle Weiss pour la soirée d’hier, répondit l’adolescente, une goutte de sueur ruisselant de son front. Mais elle n’est pas disponible.

— Cela est d’autant plus étrange que je sais par son majordome qu’elle se lève sur le coup de dix heures en temps normal. Qu’importe, vous avez tout votre temps pour la recontacter. Elle lorgna sa montre et retroussa ses lèvres. Votre plat vous attend en bas, je vais devoir m’absenter une heure. J’ai laissé des exercices supplémentaires dans le bureau, terminez-les pour mon retour.

L’ombre d’un sourire traversa le visage de Gwënaelle qui acquiesça prestement. Sans bouger, elle observa Dincer sortir de la pièce et, à la seconde où la porte se referma, elle bondit tel un ressort. D’abord, elle tomba au pied de son lit et passa la main dessous pour en tirer un sac. Elle retira sa robe précipitamment et tira des vêtements de sport du sac dont elle se vêtit. Elle vérifia que tout ce dont elle avait besoin était toujours en place et prit une grande inspiration.

Désolée Vaillance, je t’appellerais à mon retour, songea-t-elle en regardant son holoCom.

Laissant l’appareil derrière, Gwënaelle courut à la fenêtre de sa chambre. De l’extérieure, on put voir l’adolescente grimper sur l’appuie de fenêtre et escalader tant bien que mal le mur jusqu’en bas. À peine toucha-t-elle le sol qu’elle s’élança à travers le jardin qui bordait la propriété des Devos. Bien que bien moins impressionnant que celui des Weiss, le dédale de haies était bien suffisant pour se perdre.

Gwënaelle avait pris des semaines à repérer chaque sentier, calculer les distances afin de trouver le chemin le plus optimisé jusqu’à son objectif, un trou dans la belle haie qui démarquait la fin de la propriété. Elle passa la première balise qu’elle avait placée et, en sentant les poils de son cou se hérisser, elle appuya sur son chronomètre. Il restait soixante secondes à l’adolescente pour s’échapper ou toutes ses préparations auront été inutiles. Dents serrées, elle donna tout ce qu’elle avait et sprinta à travers le jardin.

La dernière balise dépassée, elle vit le trou dans la haie apparaître ainsi que son chronomètre avait déjà dépassé les quarante secondes.

Aller ! Aller ! Pria-t-elle le ciel alors que ses cheveux se dressaient vers le ciel.

Gwëanelle sprinta jusqu’à n’en plus sentir ses membres et se jeta tel un missile dans la brèche. Le bouclier surgit juste derrière elle, coupa net quelques mèches de la fille qui se releva aussitôt. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, elle dut se retenir pour ne pas exulter de joie. Elle était sortie avant que le bouclier du domaine ne se referme, la partie la plus difficile de son petit plan était réussie.

Fière de sa petite évasion, l’adolescente se cacha et attendit que Dincer soit bien loin avant de partir en marchant jusqu’à la route pour retrouver le taxi qu’elle avait commandé. Elle sauta dedans et poussa un soupir de soulagement, à présent personne ne pourrait l’empêcher de partir.

— Où dois-je vous conduire, jeune demoiselle ? demanda le conducteur

— Base militaire de Sol IV, s’il vous plaît.

— La base militaire ? s’étonna le conducteur jusqu’à s’en retourner. Pourquoi faire ?

— Pour devenir une écuyère, évidemment !

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Quasar point :

Gwënaelle est originaire de Proxeron, le monde captital de la confluence et lieu où se trouve la plus grande base des haïkadens, l'Alspire.

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