Chapitre 7 : Premier Cours.

9 minutes de lecture

" Qui ne sait pas être serviteur ne pourrait être maître. "

Anton Tchekhov

Le jour suivant, Alex fut réveillée par un éclair qui, durant une fraction de seconde, le temps d’une pensée filant comme une comète, illumina toute sa chambre à travers les volets de bois. Elle se frotta les yeux et s’assit sur son lit.

Elle repensa alors au rêve qu’elle avait fait durant la nuit : toujours le même. Cependant cette fois-ci, pendant qu’elle courait, elle entendait une voix lui murmurer à l’oreille. Elle était incapable de décrire cette voix ni de déterminer ce qu’elle lui disait. Cependant, elle paraissait si réelle qu’elle s’était demandée si elle dormait vraiment et s’il n’y avait pas quelqu’un dans sa chambre.

Alex secoua la tête afin de chasser tout cela de son esprit. C’était tout à fait normal de faire des rêves étranges, ils sont là pour extérioriser ce qu’il se passe dans la journée. Cependant, il était tout de même peu courant de faire le même rêve durant plusieurs années. Depuis qu’elle avait huit ans, elle faisait des songe étranges mais ce n’était que depuis un an qu’elle faisait le même rêve chaque nuit.

C’est un Patenchon tout endormi qui surgit du passage. Il sauta sur le lit de la jeune fille, s’assit en face d’elle, et se mit à bâiller. Si Alex n’avait pas vu le farfadet, elle aurait presque cru que la journée d’hier n’était qu’un rêve.

- Tu as bien dormi ? demanda-elle à Patenchon.

Le sourire aux lèvres il répondit :

- Cela faisait des lustres que je n’avais pas aussi bien dormi !

La jeune fille sourit. Dehors, le tonnerre se fit entendre tel un coup de symbale qui venait se rajouter au bruit constant des tambours que représentait la pluie. Le farfadet sursauta.

- Tu n’aimes pas l’orage ? demanda Alex.

- Disons que je suis habitué au calme de ma bibliothèque.

Alex esquissa un petit sourire.

Par la suite, elle se leva et ouvrit grand ses volets. La vue donnée sur le devant de la maison. Du lierre débutait du bas de sa fenêtre et descendait sur le mur en pierre telle une chenille épaisse et velue. On apercevait la forêt s’étendre au loin, à perte de vue. Un petit village aux toits rouges et pointus, à environ une dizaine de minutes en voiture s’y était dissimulé.

Le ciel d’un gris sombre et lourd ne laissait pas paraître la moindre lueur de soleil. Seules de grosses gouttes qui ruisselaient et se baladaient, faisant une course sans fin le long des carreaux des fenêtres froides, tombaient des gros nuages qui eux grondaient régulièrement. Et on sentait dehors l’odeur d’une lourde pluie qui s’abattait sur la terre encore chaude. Alex souffla.

- Moi qui voulais rencontrer les minalak..., les kilami..., Malika... elle souffla et regarda le farfadet.

- Les laminaks ? suggéra-t-il amusé.

- C’est ça.

Elle reporta son regard par la fenêtre et quand le vent se fit plus fort et que quelques gouttes lui effleurèrent la peau, elle recula et la referma.

- Je crois bien que c’est loupé, continua-t-elle.

Le farfadet hocha la tête, un peu déçu lui aussi et lui proposa de lui donner quelques leçons concernant les créatures surnaturelles et bien évidement, Alex accepta. Puis la petite créature regagna la bibliothèque, laissant la jeune fille se changer.

Quand elle descendit à la cuisine, elle trouva ses sœurs en train de déjeuner.

- Salut, lui dit Emma pendant qu’Aglaé lui disait « coucou ».

- Salut, fit-elle doucement, où est maman ?

- Dans l’arrière-cuisine au téléphone, lui répondit sa grande sœur.

- Ça va devenir une habitude de téléphoner dans l’arrière-cuisine tous les matins ou quoi ? plaisanta Alex un sourire aux lèvres.

Emma la fusilla du regard et la jeune fille perdit immédiatement son sourire.

- A qui parle-t-elle ? demanda la petite brune.

Aglaé hocha la tête pour dire qu’elle ne le savait pas. Alex souffla, une fois de plus. Elle se chauffa un bol de lait, y rajouta une cuillère de cacao en poudre et y versa des céréales avant de s’assoir à table.

Elle avait à peine commencé à manger que sa mère arriva dans la cuisine, le téléphone à la main en s’exclamant :

- Bonjour les filles !

Visiblement, elle était de bonne humeur, contrairement à la veille. Seule Alex ne dit pas « Bonjour Maman ».

- Avec qui étais-tu au téléphone ? demanda Emma.

- Avec le directeur de votre nouvelle école Minty feuille de vigne.

Alex s’étouffa avec ses céréales et se mit à tousser. Tout le monde la regarda avec étonnement et Aglaé frappa son dos.

Super, le retour de l’école….

Voyant que la conversation s’orientait ensuite sur un sujet qui ne l’enchantait guère, elle débarrassa ses affaire.

- Bon, que voulez-vous faire aujourd’hui ?

- Je vais finir de déballer mes affaires dans ma chambre, déclara Emma en se levant.

- Moi j’aimerais bien jouer avec toi, maman, fit la cadette.

- À quoi veux-tu jouer ?

- Au Monopoly, répondit la fillette.

- Tu ne préfères pas jouer aux cartes ? demanda Marie.

- Non je veux jouer au Monopoly, déclara la petite blonde en râlant.

- Aglaé, la prévint Marie.

- Non ! MOI JE NAIME PAS LES CARTES, JE VEUX JOUER AU MONOPOLYYYYY ! se mit à crier la petite.

Suite aux caprices de la fillette, Marie haussa le ton :

- Aglaé !

- Non mais les cartes, j’adore aussi, céda-t-elle de peur de se faire punir.

Emma sourit. C’était toujours amusant de voir Aglaé céder par peur de se faire punir.

- Pourquoi lui demander si au final c’est toi qui choisit le jeu ? demanda innocemment Alex.

Marie la fusilla du regard. La jeune fille baissa la tête et alla ranger son bol dans le lave-vaisselle. Elle piqua, pour la même occasion, un petit pain et le cacha dans la poche de sa veste.

- Et toi Alexandra ? que veux-tu faire aujourd’hui ?

- Je pourrais aller dehors, proposa-t-elle avec un sourire forcé qui montrait toutes ses dents.

- J’espère que tu plaisante ?

Alex perdit son sourire. La pluie était le temps idéale pour aller dehors, mais ça, sa mère ne l’avait jamais compris. L’adolescente quittait la cuisine quand Marie demanda :

- Quelqu’un aurait vu mes chiffons pour la cuisine ? Il m’en manque trois.

Alex s’immobilisa et resta dos à sa mère.

- Tu les as peut-être jeté, suggéra Emma.

Alex pouffa discrètement et remonta à l’étage.

Elle convint avec Patenchon que celui-ci lui donnerait des leçons sur les créatures magiques. D’après lui, quelques manuels sur le monde surnaturel reposait tout en haut des étagères. Il lui avait assuré que derrières quelques livres, se cachaient des casiers secrets qui contenaient des ouvrages et des recueils sur le monde surnaturel et qu’un jour, elle pourrait les lire.

Alors Alexandra s’enferma dans la bibliothèque avec Patenchon et nota dans un carnet ce qu’il lui disait.

- D’abord il faut que tu saches que la magie est partout, commença Patenchon. Ce n’est pas parce que tu ne la vois pas, qu’elle n’existe pas. Dans toutes les histoires que tu peux lire, il y a une part de vérité. Il existe des créatures de toutes sortes. Certaines sont grandes comme les géants, d’autres petites, beaucoup sont des amies mais beaucoup d’autres sont des ennemies.

Alex qui s’était plongée dans ses notes, leva la tête intriguée.

- Ce que j’essaie de te dire, continua-t-il, c’est qu’il y a énormément de créatures des ténèbres descendants directement de la noirceur la plus profonde. C’est donc pour cette raison que tu dois être prudente. Et rassure-toi, il y a très peu de chance pour que tu en rencontres.

Il fit une pause, pour laisser à Alex le temps d’écrire.

- Je ne peux pas t’apprendre beaucoup de choses sur la magie en elle-même, mais je peux t’aider en ce qui concerne les créatures. As-tu des questions ?

- Comment fais-tu pour disparaitre comme tu l’as déjà fait ? demanda Alex. Pourquoi ressemblais-tu à une grosse bête avant que je te donne le porridge ? Et pourquoi tu...

- Calme-toi Alexandra, chaque chose en son temps, je vais t’expliquer.

Ils passèrent toute la matinée et une grande partie de l’après-midi dans la bibliothèque. Patenchon était très heureux d’apprendre à Alex ce qu’il savait et se révéla être un très bon professeur.

Alex en apprit beaucoup sur les farfadets. Ces créatures vivent dans des maisons et sont totalement dévoués à leur maître. Ils peuvent cependant se transformer en une hideuse créature si on se montre impolis avec eux et deviennent alors particulièrement mesquins.

La plupart des créatures sont capable de disparaître par leur seule volonté. D’après Patenchon, ce phénomène était dû à une question d’énergie, car la magie même se base sur les énergies. « Dans tout acte de magie il y a un échange d’énergie ». Il avait ajouté qu’il lui parlerait de cela en temps voulu.

Il lui avait même enseigné les méthodes de base permettant de se protéger si jamais elle rencontrait une créature qui n’appréciait guère les visites. La première était que le sel et le fer, étaient deux matières qui permettaient de tenir à distance toute créature magique n’ayant pas forme humaine.

Elle apprit aussi que forêts et bois, étaient les lieux les plus appréciées des créatures.

Alex était à la fois émerveillée et impressionnée. Comment avait-elle pu vivre jusqu’à maintenant sans se douter qu’il existait beaucoup plus que ce qu’on était capable de voir ?! Comment ne pas remarquer l’existence d’un autre monde alors que celui-ci se cachait sous ses yeux ?! C’était comme si elle avait la réponse d’une énigme, alors que celle-ci était déjà écrite mais seulement dans une autre langue.

- Alexandra, est-ce que tu m’écoutes ?

Alex sortit ainsi de ses pensées et leva la tête vers Patenchon.

- Désolée, j’avais la tête ailleurs.

- Je vois que tous cela te taraude, fit-il un petit sourire sur les lèvres.

Elle répondit, les yeux perdus dans le vide et l’air amusé :

- Ouais.

Elle regarda son ami.

- Mais c’est bien.

Sa voix n’était plus qu’un murmure et un grand sourire se trouvait sur son visage.

Ils discutèrent encore un bon moment jusqu’à ce que Patenchon déclare :

- Il va falloir que je m’absente à présent.

- Tu vas rendre visite aux laminaks ?! demanda Alex.

- Non, répondit tout simplement le farfadet. Je vais rendre visite à un vieil ami.

La jeune fille lâcha un faible soupir. Elle aurait tant aimé parler de ce monde merveilleux encore un peu.

Le farfadet lui promit qu’il ne partirait pas longtemps et qu’il reviendrait très vite. Et même si la jeune fille n’en croyait pas un mot elle n’essaya pas de le retenir.

Le farfadet lui fit un signe de tête avant de disparaître devant les yeux éthérés de la jeune fille. Décidément, elle n’arriverait jamais à s’y faire.

Alex resta assise à attendre, l’oreille attentive et le regard aux aguets au cas où le farfadet changerait d’avis et reviendrait. Elle attendit quelques minutes et écouta l’étrange silence qui régnait dans l’immense bibliothèque jusqu’à ce qu’elle juge que son ami était bien parti et qu’il ne reviendrait pas de sitôt.

Elle se leva et referma d’un geste brusque son journal, relevant ainsi une masse de poussière qui recouvrait jusqu’à présent la vieille couverture de cuir. Le bruit des pages jaunies s’entrechoquant résonna plusieurs secondes dans la vaste et silencieuse bibliothèque.

Alexandra se leva, mit son journal sous son bras et alla dans sa chambre afin de le ranger puis de descendre

En bas, Marie faisait un inventaire des objets contenus dans une armoire du salon avec Emma tandis qu’Aglaé, assise sur le canapé, faisait danser ses poupées au rythme des gouttes qui s’abattaient contre les vitres glacées.

Le reste de la journée passa très vite pour Alex. Elle s’était installée sur le canapé afin de regarder sa série préférée « classé top secret ».

Cette série racontait comment une jeune fille de seize ans tout à fait ordinaire avait un passé des plus mystérieux : Mêlant orpheline à la recherche de ses parents, un ancien agent secret grognon et têtu, de l’action, beaucoup de suspens et vous obtiendrez une Alexandra clouée sur le canapé avec des yeux qui pétillent.

Après le dîner, lorsqu’elle remonta dans sa chambre, Patenchon était revenu et l’attendait assit sur le grand tapis.

- Tu crois que demain nous pourrions voir les laminaks ? demanda-t-elle.

Le farfadet lui sourit et hocha la tête. Alors Alexandra, le sourire aux lèvres, se prépara pour aller dormir, hâte d’être à demain pour rencontrer les laminaks.


Merci d'avoir lu jusqu'ici, j'espère que ce chapitre vous a plu.

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