Les Monts De Cuivre - 12 -

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Après le départ de l'Intendant, Dokar s'approcha de la femme, toujours présente.

— Que s'est-il passé ?

— La Bête était là, près du puits ! J'ai crié, elle est partie, et l'eau a coulé !... Enfin je crois que ça c'est passé comme ça...

— Hum... Il s'agissait de la même créature que dans ton village ? Celle qui a tué plusieurs personnes de ton clan ?

Incertaine, elle hésita.

— Je ne l'avais pas vue, la dernière fois, mais ma fille, oui. C'est elle qui m'a racontée !

— Décris-moi cette bête que tu as vue...

Elle obéit. Le seigneur ordonna.

— Va chercher ta fille...

Dokar resta seul à côté du puits rempli d'eau. Il fixa la surface qui miroitait sous la clarté rougeâtre de cette matinée. Ulkir revint à ce moment-là. Il était accompagné de plusieurs personnes qui portaient des outres. Dokar leur laissa la place. La femme arriva aussi, avec une jeune fille.

— Voici Luvi.

Le seigneur d'Ikryl fixa l'adolescente.

— Décris-moi cette créature que tu as vue dans ton village.

Impressionnée et encore effrayée, elle répondit :

— Elle avait une tête énorme, une gueule effrayante, pleine de dents pointues, une langue fourchue. Elle était recouverte d'écailles ; ses pattes, elles avaient de grandes griffes. Ses yeux étaient rouges. Sa queue, elle était fourchue aussi. Voilà....

Dokar soupira.

— Vous pouvez partir.

Elles quittèrent les alentours du puits. Le jeune seigneur s'approcha d'Ulkir.

— Tâche de trouver d'autres récipients dans ce village. Il faut emporter le plus d'eau possible. Nous n'aurons peut-être plus d'autres occasions d'en trouver.

Ensuite, il s'éloigna et résolument, se dirigea vers l'habitation principale, dans le but, cette fois, de parler à Ovaïa.

Il trouva la jeune femme, assise devant la maison. Elle paraissait pensive.

— Ces cris que j'ai entendus, c'était quoi ? demanda-t-elle

Il la contempla, prit place à côté d'elle et répondit par une autre question :

— Ce Kurior, dont tu m'as parlé, celui que cette prophétesse contrôlait, et que tu as presque tué, est-ce qu'il s'agissait de la même créature qui a dépecé tous ces gens dans le village d'Abeth ?

— Pourquoi me demandes-tu ça ?

— Parce que je crois que tu ne m'as pas tout dit sur lui. Surtout, quel rapport il avait avec toi ? Je me fais peut-être des idées, mais j'ai l'impression qu'il nous suit. Ou plutôt qu'il te suit. Alors si tu m'en disais plus ?

Elle se troubla.

— Je ne sais pas grand-chose de plus. Je n'ai pas de réponses précises. Peut-être qu'il me suit. Si c'est le cas, j'en ignore la raison...

Il la regardait toujours.

— Il vient d'être vu et identifié, par une femme, près du puits. Celui-ci, étrangement était encore à sec, quand Ulkir l'a examiné ce matin à l'aube. À présent, il déborde d'eau.

De nouveau troublée, elle ne sut que dire. Dokar s'enquit encore :

— Tu m'as tout dit ?

Elle avoua :

— Pas tout à fait.

Elle raconta sa rencontre avec le dragon, près du totem. Quand elle eut terminé, Il rétorqua :

— Tout ceci est bien étrange. Il va falloir que tu sois prudente. Si l'une des personnes qui voyage avec nous, connaissait le rapport qu'il y a entre le Kurior et toi, tu serais en danger. Il pourrait t'accuser de sorcellerie.

Il se leva et conclut :

— Il va de soi que je ferai le maximum pour te protéger. Tu sais à quel point, toi et le bébé, vous m'êtes précieux. Je ne saurai trop te conseiller, de rester à l'écart de cette créature, si tu la voyais encore.

Il allait partir, mais Ovaïa l'interpella ainsi :

— Tu as conscience qu'aujourd'hui, c'est grâce à lui, si nous avons de l'eau.

— Oui. C'est pour cela que je ne vais pas le traquer, dans l'état actuel des choses, ne m'en demande pas plus.

Il s'éloigna d'elle. Ovaïa sut alors que sa situation, était en passe de se compliquer. Elle réfléchit rapidement, et prit la seule décision qu'elle pensait appropriée pour se protéger de tous ces gens : repartir seule.

Pendant ce temps, Abeth avait guidé Obro et Jolo, vers l'une des sources qu'il connaissait. Elle était tout près. Il ne leur fallut donc qu'une petite demi-heure pour s'y rendre. Sans surprise, Obro constata qu'elle était à sec. Il s'avança vers la petite rigole, dans laquelle l'eau aurait dû s'écouler, s'accroupit, y passa les doigts et demanda :

— C'était quand la dernière fois où tu y es venu ?

Abeth haussa les épaules et rétorqua :

— J'en sais rien, trois semaines... Un mois.

Jolo se taisait, mais il scrutait le chef des grottes jaunes, avec méfiance. Obro pivota vers Abeth et déclara sur un ton péremptoire :

— Cela fait des mois, à mon sens, que cette source ne donne plus rien.

Abeth répondit sur un ton égal :

— Ah ? Remarque, si tu le dis.

Obro l'attrapa par le collet, le rapprocha de lui et lui jeta :

— Tu te fiches de moi, cancrelat.

Jolo qui s'était avancé vers eux, remarqua, à cet instant qu'Abeth avait les mains libres. Il cria :

— Attention, il s'est détaché.

Hélas, l'avertissement arrivait trop tard. Abeth venait de donner un violent coup d'épaule à Obro. Il tenait dans sa main droite un objet que Jolo devinait tranchant. L'aide de camp de Dokar bascula en arrière. Abeth le frappa avec la pierre qu'il serrait entre les doigts. Tout s'était déroulé si vite, que Jolo n'eut pas le temps de réagir avant qu'Obro ne perde conscience et que le chef des grottes jaunes, d'un bond, saute sur la paroi montagneuse. Avec agilité, et en s'aidant des multiples prises de la roche, il grimpa. Jolo savait qu'il ne le rattraperait pas, il se concentra sur Obro, se pencha sur lui et remarqua avec soulagement qu'il reprenait lentement conscience. Jolo l'aida à se lever. Il remarqua une plaie sur sa tempe gauche, inquiet, il demanda :

— Cela ira ?

Obro commença à dire :

— Je...

Puis il s'exclama brusquement :

— Abeth ? Où est-il ?

— Il s'est enfui par là.

Il désigna la muraille au-dessus de la source. Obro poussa alors un juron sonore, puis l'affliction suivit, il dit :

— Qu'est-ce que je vais dire à Monseigneur ?

Jolo proposa :

— Nous pouvons essayer de le poursuivre.

Obro soupira :

— Je ne sais pas pour toi, mais en ce qui me concerne, je suis un assez piètre grimpeur.

Il décida :

— Retournons au village avouer notre faute au Seigneur Dokar. Lui dira ce qu'il faut faire.

Jolo ne put qu'aller dans ce sens. Ils s'élancèrent vers le village en courant...

C'est discrètement qu'Ovaïa avait quitté l'habitation puis le village. Elle emportait avec elle, quelques paquets du pain de voyage subtilisé des fontes de la selle de son beau-frère. Elle s'était aussi munie de quelques gourdes d'eau. Quand elle atteignit le chemin en lacet, qui se déroulait au sein des monts de cuivre, elle eut un pincement au cœur. Elle décida de l'oublie, Son pas s'accéléra.

Derrière elle, une silhouette rapide et furtive la suivait : il s'agissait du Kurior...

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