La Plaine de Cendre - 2 -
Plaine de Cendres - Frontière entre le pays d'Ikryl et le pays d'Oleko - Front de guerre
Lorac était venu réveiller Syvan au milieu de la nuit. Il lui avait dit ensuite :
— Ça bouge du côté des démons ! Je crois qu'ils ne vont pas tarder à attaquer nos lignes !
Aussitôt, le chevalier sauta hors de sa couche et se précipita sur son armure. Tout en la revêtant, avec l'aide de son jeune écuyer, réveillé tout aussi brusquement que lui, il exigea :
— Dis-moi en plus !
— Ils se massent sur la frontière en bataillons serrés. Apparemment, le général Ozerel a décidé d'envoyer tous ses malfaisants à l'assaut !
— À ton avis, quand vont-ils attaquer ?
— Au petit matin, sans nul doute...
Syvan soupira avant de s'exclamer :
— C'est bien notre chance !
Son écuyer lui passa ses jambières. Il le remercia et lui ordonna dans la foulée :
— Va seller mon cheval !
Il fila à toute vitesse hors de la tente. Syvan attrapa le baudrier contenant son épée, le passa autour de ses hanches, récupéra son bouclier et enfin quitta sa tente en compagnie de Lorac.
Volcan Oleko - Camp des armées démoniaques
Ozerel survolait ses troupes. La plupart étaient à pied. Ceux qui avaient l'avantage d'être pourvus d'ailes restaient en arrière. Quand le moment d'attaquer serait venu, il les enverrait en avant-garde, afin d'évaluer les forces adverses. Le général savait déjà que l'armée humaine n'était pas très étoffée. Il aurait les assaillir dès à présent, mais il ne voyait pas la nécessité de se précipiter. Lui-même s'éloigna du camp. Ses ailes puissantes l'emmenèrent plus loin encore que le camp, presque à la frontière du pays d'Ikryl. Là était le danger pour ses troupes, parce que le sortilège du nécromancien n'allait pas au-delà.
Son but n'était pas de traverser la frontière, ce qu'il souhaitait était plus simple. Il voulait capturer des hommes jeunes, solides, et surtout à l'esprit fort et équilibré. C'étaient les conditions indispensables d'un bon réceptacle pour le Nécromancien, pour y parvenir, l'offensive frontale était indispensable. De là, cela occuperait suffisamment le gros des troupes humaines, pour qu'il envoie un petit groupe de ses démons les plus habiles, derrière les lignes ennemies, afin de capturer les sujets dont Ozerel ou plutôt le mage, avait besoin.
Il n'en était pas encore là. Pour le moment, il devait maîtriser son impatience. Il rebroussa chemin et d'un vol rapide regagna le volcan Oleko.
Plaine de Cendres - Frontière entre le pays d'Ikryl et le pays d'Oleko - Front de guerre
Syvan avait arrêté son cheval sur la ligne de front. Il avait sorti des fontes de sa selle un instrument cylindrique, qu'il déplia. C'était une sorte de longue-vue qu'il tenait de son père. Il colla l'instrument sur son œil droit et examina les masses mouvantes de malfaisants, qui s'étaient dangereusement approchées de la frontière. Il nota aussi les volants qui restaient en arrière et dit sans cesser son observation :
— Tout ceci ne me dit rien qui vaille !
Il baissa sa longue-vue, fixa Lorac qui chevauchait à ses côtés :
— Nous ne résisterons pas à un assaut direct. lui assura-t-il.
— J'ai envoyé des cavaliers ratisser aux alentours afin de trouver des renforts, mais je ne me fais guère d'illusions, il n'y a plus guère d'hommes en âge de combattre par ici...
Syvan ne répondit pas, une seule pensée occupait son esprit : "J'aurai dû écouter Evalane !"
Manoir d'Ikryl - À ce moment-là
Ovaïa se redressa brusquement sur son lit, le cœur battant, l'effroi l'emprisonnait, son souffle était court. L'avertissement résonnait encore dans sa tête : "Hâte-toi, les hommes ont besoin de toi, rends-toi sur la frontière dès à présent !"
Brièvement, elle se dit : "Ce n'était qu'un rêve..."
Cependant très vite, elle réalisa que ce cauchemar fait de fureur, de sang, de corps broyés, prophétisait une réalité à venir. Alors, elle glissa hors de son lit, et laissant là son enfant qui dormait profondément, elle endossa une veste et quitta la pièce.
C'est à la porte de Dokar qu'elle alla frapper. Il lui sembla que celui-ci avait mis un temps infini à venir lui ouvrir lorsqu'enfin la porte s'entrebâilla. En reconnaissant la jeune femme, il s'exclama :
— Ovaïa ? Qu'est-ce que tu fais ici, au milieu de la nuit ?
— Nous devons partir tout de suite pour le front. Nos troupes sont en grand danger !
— Qu'est-ce que tu racontes ?
— La vérité, je t'en prie, crois-moi ! Les malfaisants vont attaquer au petit jour, nous devons y aller !
Éberlué, il la regardait, comme s'il s'était trouvé devant une démente, la jeune femme le remarqua. Cela l'agaça ! Elle haussa le ton :
— Je t'en prie, je sais ce que je dis, il faut y aller maintenant !
Elle se détourna soudain en décrétant :
— Fais ce que tu veux, moi je pars sur l'heure.
Elle s'éloigna sur ces mots, sous le regard interloqué de son beau-frère.
Soudain, il quitta sa chambre et la rattrapa avant qu'elle ne rentre chez elle. Il la saisit par le bras, sans brutalité mais fermement :
— Une minute Ovaïa, tu me réveilles au milieu de la nuit, en me racontant une fable incroyable et...
Elle le coupa :
— Ce n'est pas une fable... C'est un message que j'ai reçu... dans mes rêves !
La jeune femme secoua la tête. Le sentiment d'urgence qu'elle ressentait se télescopait avec sa soudaine colère envers son beau-frère, qui refusait de la croire. Puis elle réalisa qu'il ne pouvait en être autrement. Elle ne lui avait même jamais parlé des rêves récurrents qu'elle faisait depuis plusieurs jours. À personne d'ailleurs. Elle-même ne les avait pris au sérieux que récemment.
— C'est d'accord. accepta enfin Dokar
Stupéfaite, Ovaïa en resta sans voix, C'est elle qui le regarda bizarrement, il ajouta :
— Je vais donner les ordres nécessaires...
— Tu me crois ?
— Je ne sais pas, mais ce dont je suis sûr, c'est que tu es l'une des personnes les plus sensées que je connaisse, alors je vais te faire confiance.
Il conclut :
— Rendez-vous dans deux heures dans la cour !
— Pas plus tôt ?
— Il faut le temps de rassembler les hommes et le matériel...
Il retourna vers sa chambre sur ces mots. Ovaïa de son côté, se hâta de retourner dans la sienne.
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