Chapitre 42 - Partie 2

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  Je me redressai d'un coup, le corps tremblant de toutes parts, le visage ravagé de larmes et incapable de respirer. Les ténèbres m'enveloppaient, pourtant je perçus un mouvement à ma gauche. Je pivotai aussitôt en brandissant un poignard dans cette direction.

  –Lunixa ?

  Une faible lueur s'alluma alors que mes doigts se resserraient sur mon arme. Je reculai vivement. Quelqu'un se tenait là. Juste à côté de moi.

  –Lunixa, murmura-t-il d'une voix douce. C'est juste moi, Kalor.

  Ka… lor ?

  –Tout va bien, continua-t-il, tu n'as rien à craindre ; c'était juste un cauchemar. Regarde.

  La lumière s'éleva dans les airs et parcourut la pièce, éclairant tout ce qui se trouvait sur son passage. Un lit, une commode, une table de nuit...

  –Tu vois, tu es dans ta chambre, avec moi. Tout va bien.

  Avec lui. Avec… Kalor.

  Ce nom perça d'un coup l'effroi qui m'habitait et mes tremblements se décuplèrent. Je parvenais à peine à tenir mon arme tant ma main s'agitait.

  J'étais son épouse, mais je m'étais unie à Arès et il avait tué notre enfant. Un enfant que j'avais senti bouger en moi.

  Un violent haut-le-cœur me souleva l'estomac. Lâchant ma lame, je me précipitai hors du lit.

  –Dame Nature, Lunixa !

  Je tombai devant les toilettes juste avant de vomir, encore et encore. L'acidité de la bile me brûlait la gorge de plus en plus.

  –Par la Déesse...

  Une main sur posa sur moi, m'arrachant un violence spasme. Je me retournai aussitôt et l'écartai d'un revers. Les yeux de Kalor s'agrandirent.

  –Ma chérie ? C'est moi.

  –Ne... Ne me touche pas.

  Je m'éloignai de lui à reculons.

  –Ne me touche pas... S'il te plaît, ne me touche pas.

  Il resta un instant à me dévisager avant de se relever, surplombant totalement.

  –Je vais appeler le docteur. Ne bouge pas, ma chérie, je reviens tout de suite.

  Son corps disparut pour réapparaître un instant plus tard. Paniquée, je me collai aux boiseries et me recroquevillai sur moi-même.

  –C'est juste moi, Lunixa. Je suis simplement aller tirer le cordon de l'infirmerie. Tout va bien.

  Il tenta à nouveau de m'approcher, mais m'éloignai encore, cherchant à me fondre dans le mur.

  –Lunixa...

  Un pleine déchirante remonta de ma gorge à vif.

  –Non. Rien ne va, sanglotai-je. Je... Je ne l'ai pas repoussé et... et il l'a tué.

  Comment pouvais-je lui faire face à présent ? Je l'avais trompé et j'avais perdu le bébé.

  J'enfouis mon visage derrière mes mains.

  –Ma chérie, quoique tu penses avoir fait, ce n'était pas vrai. Ce n'était qu'un cauchemar ; rien n'était réel.

  –Non, non, non... Je les ai sentis. Je les ai vraiment sentis.

  Arès et l'enfant étaient tous les deux en moi.

  Sans m'en rendre compte, je passai la main sur mon ventre, à la recherche de son renflement. En vain. Il avait disparu. Mon ancien fiancé s'en était assuré.

  L'éclat de sa dague, alors qu'il la plongeait en moi, envahit mon esprit et une nouvelle vague de nausée me submergea. Je me traînai jusqu'au toilette et drainai derechef mon estomac de sa bile.

  Kalor essaya plusieurs fois d'en profiter pour me rejoindre, mais je ne continuai à m'éloigner au moindre de ses gestes.

  –Ne t'approche pas, répétais-je en boucle, entre deux haut-le-cœur.

  Lorsqu'il se décida finalement à arrêter, une douce chaleur se propagea dans la pièce. À travers mes larmes, je crus le voir esquisser un maigre sourire.

  –D'accord, mais je reste ici. Je ne t'abandonne pas.

  Je me penchai encore sur la cuvette pour vomir. Au même moment, une porte claqua et des bruits de pas explosèrent à mes oreilles. Tout mon corps se crispa.

  –Altesses ? lança un homme.

  –Dans la salle de bain ! répondit Kalor. Venez vite !

  Tressaillant, je m'écartai des toilettes.

  –Non... non... Ils ne doivent pas...

  Plusieurs personnes envahirent la pièce.

  –Il faut la mettre sur son lit pour que je l'examine, déclara un homme.

  –Elle ne veut pas qu'on l'approche, répliqua Kalor.

  –Oui. Non... Laissez-moi tranquille.

  Il se tourna vers les nouveaux arrivant, puis reporta son attention sur moi, un éclat dans le regard. Je secouai la tête.

  –Non, non, non... Ne t'approche...

  Je n'eus pas le temps de finir ma phrase qu'il fut sur moi. Un cri strident m'échappa. Je venais de coucher avec Arès ; il ne devait pas me toucher. J'étais souillée. Je ne méritais pas son aide, encore moins son amour.

  Kalor raffermit sa prise sur moi et me décolla du sol. Malgré mes gesticulations pour essayer de me libérer, son étreinte ne se desserra pas et il finit par m'allonger sur le matelas. Ce qu'il venait de se passer avec Arès se rejoua dans ma tête et je cessai brusquement de me débattre, pétrifiée par la peur.

  –Non. Je ne veux pas... Je ne veux plus. Laisse-moi... Laisse-moi tranquille. Je t'en prie...

  –C'est fini, Lunixa, c'est juste le médecin.

  Je n'arrivai plus du tout à respirer, comme si un amas de briques écrasait ma poitrine. Mon cœur menaçait d'en jaillir tant ses battements étaient anarchiques et violents. Ma chambre à Talviyyör et celle de mes enfants à Illiosimera, tout se mélangeait dans mon esprit. Arès allait revenir d'un instant à l'autre pour finir ce que nous avions commencé sous les yeux de Kalor.

  –Tenez-la.

  J'étais si terrifiée que je tressaillis en sentant des étaux se refermer sur mes membres.

  –Non... S'il vous plaît. Je ne veux...

  Quelque chose de piquant s'enfonça dans mon épaule. Mes pulsations eurent un soubresaut, puis leur rythme et leur puissance se calma. Dans un même temps, mes muscles se détendirent, mes poumons se gonflèrent, puis un voile se déploya devant mes yeux, troublant encore plus ce qui m'entourait.

  Plusieurs personnes soupirèrent de soulagement.

  –Que lui avez-vous administré ?

  –Un calmant, elle était en pleine crise de panique. Vous pouvez la lâcher maintenant.

  Les menottes à mes poignets et chevilles s'ouvrirent tandis qu'une brume envahissait mon esprit. Mes paupières se mirent à papillonner.

  –Est-ce la première fois qu'une telle crise lui arrive ?

  Qui parlait ? Je ne reconnaissais pas la voix.

  –Oui. Elle a souvent des terreurs nocturnes, mais j'arrive normalement à m'en occuper.

  Ce timbre, en revanche, m'était familier. L'entendre m'entraîna dans un cocon rassurant.

  –Y a-t-il autre chose que je devrais savoir ? reprit l'inconnu alors que quelqu'un m'obligeait à ouvrir les yeux en grand.

  Une silhouette floue apparut derrière un objet tout aussi trouble.

  –Elle a déjà vomi cette nuit après avoir été effrayé, vers une heure du matin.

  –Très bien.

  Un instrument froid glissa sur ma poitrine, un autre se posa ensuite sur mon bras et quelque chose l'enserra, puis on me fit ouvrir la bouche. Je me laissai faire sans réagir. J'avais juste sommeil... Tellement sommeil.

  Une pointe me piqua l'intérieur du coude.

  –Que faites-vous ?

  –Une prise de sang afin de m'assurer qu'elle n'a pas été empoisonnée. Elle ne semble pas avoir de symptôme, mais je préfère être sûr.

  –Moi aussi. Merci.

  Les sons devinrent de plus en plus confus autour de moi. Il y eut quelques cliquetis, puis un soupir.

  –Voilà, j'ai ce qu'il faut. Medsestra va rester dans le salon au cas où.

  –Puis-je dormir avec elle ou pas ?

  –Oui. Si elle a bien fait une crise de panique, votre présence pourrait la réconforter, même si elle pensait le contraire avant le calmant.

  Des pas s'éloignèrent, puis une porte claqua et le matelas s'affaissa à côté de moi. Une douce chaleur, la même que la salle de main, m'enveloppa aussitôt.

  –Ka... lor ?

  Un bras ferme se posa sur ma taille et m'attira contre un corps chaud.

  –Oui, je suis là.

  Sans comprendre pourquoi, je me remis à pleurer et à m'excuser.

  –Peu importe ce que tu penses avoir fait, je te pardonne Lunixa. Alors n'y songe plus et rendors-toi.

  –Je... Je ne veux pas te faire de mal, murmurai-je du bout des lèvres, au bord de l’inconscience.

  –Je sais, ma chérie. Je sais.

  Sa chaleur s'intensifia et je sombrais dans les bras de Morphée.

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