Le caveau

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Le caveau était sombre, éclairé juste par ma chandelle fumante et un conduit semblait s'enfoncer loin dans les entrailles de la terre, descendant en pente douce, au moins au début, la suite étant envahie par la nuit souterraine pleine de chuintements et de bruits dont je ne reconnaissais pas l'origine...

Mais comment suis-je arrivée là ? Je peine à me souvenir... Je sursaute. Quelque chose m'a frôlée... Je tends mon bout de chandelle devant moi espérant, ou pas, voir ce que c'est. Je fais un tour sur moi-même cherchant un indice, n'importe quoi pouvant m'indiquer où je suis et surtout comment sortir d'ici.

Stop.

Non seulement je ne me souviens pas comment je suis arrivée ici mais... je ne sais même pas... qui je suis... ni à quoi je ressemble...

Ne pas paniquer.

Je commence à trembler... d'effroi ? de froid ? Je n'en sais rien...

Réfléchissons... Je tiens dans mes petites mains gantées de fines dentelles blanches, avec de magnifiques bagues ouvragées, ornées de petites pierres colorées, un chandelier semble-t-il en argent avec ce qui devait être une longue bougie blanche, consumée jusqu'à la moitié. Sur mon corps est posé une splendide robe grenat en mousseline légère. A mon cou pend une fine chaîne, agrémentée d'une petite boule contenant un grelot. Je ne dois pas être pauvre si je tiens compte de ma tenue.

Je dénoue mes cheveux : ils sont longs et blonds. J'ai aussi la peau très blanche. Je ne peux en savoir plus sur mon physique...

Une soudaine bourrasque de vent chaud menace d'éteindre ma flamèche.

Tout sauf ça !

Petit rappel... J'ai peur du noir... Je ferme les yeux.

Pitié ! Je veux sortir d'ici ! Par n'importe quel moyen...

"- Viens à moi...

- Qui est là ?"

Plus rien. Aurais-je rêvé ? Nouvelle bourrasque. Cette fois-ci glaciale. Je frissonne. Derrière moi, il y a comme une paroi invisible... Je ne peux la traverser. Il n'y a qu'une seule issue ressemblante à une gueule profonde prête à m'avaler. Le sol froid est en terre battue. Je me décide à avancer vers l'endroit d'où semblait venir le vent... Peut-être me mènera-t-il vers l'extérieur...

Je marche... Depuis combien de temps déjà ? La pente douce s'est transformée en escalier que je descends, et descends et descends encore. Je vais finir par atteindre l'Enfer. Ma bougie va bientôt s'éteindre. Je vais mourir ici. Dans le noir. Seule. Sans savoir qui je suis. Ni comment je suis arrivée là. Encore moins pourquoi...

Clac. Clac.

Je ne suis plus sur un sol en terre battue. Il n'y a plus d'escalier. Devant moi s'étend un long couloir. J'aperçois au loin les lueurs de torches. Vite. Ma flamèche vacille. Je cours. Mes pieds, engoncés dans des chaussures à talons, me brûlent. Clac, clac, clac ! Le pas de ma course effrénée résonne sur ce carrelage noir, dans ce couloir noir, parsemé de colones noires. Du noir. Partout. Je finis par m'effondrer sur le sol. Vite. Je libère mes pieds de ces instruments de torture. Courir. La lumière se rapproche. Enfin. Ma chandelle meurt.

Mon coeur s'affole. Je me laisse aller sur le sol. Je ferme les yeux.

Inspirer. Expirer. Lentement.

Je les ouvre et rampe à tâtons vers les lumières qui ne semblent plus très loin. Le couloir s'est agrandi. Le sol sous mon corps chaud me glace les sangs. J'arrive dans une pièce ronde. Je me relève et époussette ma robe.

Au centre du cercle de colonnes noires, posé sur un immense autel circulaire... un cercueil.

Je m'approche, comme hypnotisée par ce que je vois. L'autel m'arrive à la taille et est d'une beauté à couper le souffle : il est sculpté et la finesse des détails est incroyable. Une scène apocalyptique y est décrite : on y voit le Diable sortant des Enfers, avec à ses pieds une multitude de corps meurtris, des hommes et des femmes semblant souffrir le martyr. Ils implorent le Ciel, qui n'a pas l'air de vouloir les entendre. Je souris malgré moi à cette image impie.

Je contourne l'autel. De l'autre côté est sculptée... Oh mon dieu... Je me sens rougir bien que cette scène... me fasse ressentir d'étranges émotions. Je ne comprends pas. Je vois pour la première fois des hommes nus : si j'en crois la finesse du sculpteur, ce que j'y aperçois ne peut-être que vrai. Je touche du bout des doigts ce qui doit être un... quoi déjà ? Oui. Un phallus. Je me passe la langue sur mes lèvres sèches. On y voit aussi des femmes nues, figées dans des expressions de béatitude, dans des positions improbables .

Le cerceuil est en bois sombre, ses poignées en or agrémenté de rubis étincelants. Sur le couvercle trône un crucifix en argent mais... inversé. Il est plaçé au centre d'une étoile, elle aussi inversée. L'ensemble est édifiant. Je suis attirée par ce cerceuil... Il est si beau... Je gravis les quatre marches pour l'atteindre. Il est là, posé sur un tapis rouge sang. J'effleure la croix : un frisson me parcourt, comme si je commettais une faute. C'est... enivrant...

Boum... Boum... Boum...

Un coeur qui bat ? Ou alors est-ce le sang qui tambourine à mes oreille ? Je m'assois à califourchon sur le cerceuil...

Pas très convenable pour une Lady...

Je ne sais pas d'où me vient cette phrase et je n'en ai cure. Le bois froid au contact de mes jambes chaude est un délice... Je pose mes deux mains sur l'étrange crucifix : il se met à tourner... Un déclic se fait entendre. Je descends de mon perchoir, curieuse. La tentation est trop forte : je veux savoir ce qu'il y a dans ce cerceuil, perdu au milieu de ses ténèbres. Je ne peux (ne veux ?) pas m'empêcher de l'ouvrir. J'ai au creux de mes hanches une sensation extrêment bizarre, inconfortable mais tellement chaude et délicieuse. Je ne comprends absolument pas ce qui se passe dans mon corps...

Le couvercle s'abat sur l'autel dans un bruit effroyable qui se répercute à l'infini dans le sombre couloir. Ce que j'y découvre est... splendide.

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