Chapitre 2

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Arrivé près de l’appartement de Cindy, j’étais davantage pris de fatigue que de désir. L’envie de la voir s’était mutée en lassitude de tout, et éreinté, je ne rêvais de rien d’autre qu’un bon clic-clac où j’aurais pu me pieuter. J’arrivai là-bas, avec mes bagages et ma tête de vagabond, attendant sagement que Cindy vienne m’ouvrir. Et elle vint, tout empressée et stressée à l’idée de me faire attendre. Quelle bonne femme ! Elle me faisait de grands sourires et de grands gestes pour m’indiquer qu’elle arrivait. Ensuite, elle s’intéressa à moi, là où d’autre aurait fait semblant, posant par politesse les questions de la vie courante. Cindy, elle, souhaitait vraiment savoir si j’avais fait bon voyage, si j’allais bien et si tout s’était bien passé et, une fois qu’elle avait ces informations en sa possession, elle ne s’embarrassait pas des détails. Oui, elle me coupa la parole et me fit signe de la suivre, toujours avec cette même fureur de vie. Elle gigotait ses grosses fesses devant moi, sans se soucier de son propre corps, elle me guidait jusque chez elle, meublant mon silence par d’inlassables phrases à propos de ceci ou cela. J’arrivais alors dans son foyer, un trente-cinq mètres carré bas de plafond, où le peu de meubles et d’objets qui décoraient le lieu semblait le remplir presque abondamment. Elle avait une salle de bain, un salon avec cuisine, et une chambre. Elle était fière d’avoir un T2 et vantait la chance d’avoir un si grand appartement au cœur même de Paris. Elle était d’autant plus fière du fait qu’elle travaillait à la billetterie d’un théâtre. Ça gagnait peu. Quelque 1800 euros net parce que c’était Paris. Là, elle payait seulement 1050 euros le loyer. L’hiver, elle évitait de se chauffer. L’été, elle crevait sous la canicule. Avec les charges, il lui restait à peine 600 euros pour vivre. À peine plus que le RSA. Quelle galère. C’était aussi pour ça qu’elle m’avait fait venir, parce qu’avec nos deux salaires, ça lui faciliterait la vie. Cindy n’avait pas d’enfants ni de mari. Toute sa vie, cette belle quinquagénaire, cette force de la nature, avait rêvé d’être humoriste. Chaque année, elle prenait son peu de congé pour se présenter à Avignon : sans succès. Le temps passait et elle persistait, encore et toujours. Elle aurait tant aimé faire du théâtre. Mais à défaut d’être sur les planches, elle gardait leurs accès en vendant des billets. Au fil des années, ses rêves s’amenuir, et son âme pleine de joie se noya peu à peu dans le vin. C’était d’ailleurs là une occasion d’ouvrir une bouteille. Ainsi, toute contente et tout sourire, elle se figea devant moi, une bouteille de rouge à la main, un sourire aux lèvres, puis me proposa de boire un coup. Moi, j’étais affalé sur son canapé, ma valise était juste à côté, pas encore déballée, et la fatigue continuait à me gagner. Seulement, je ne me voyais pas refuser. Alors je pris un verre, puis un deuxième. Elle se confia à moi, me parla de son ex taré qui la trompait et la faisait culpabiliser d’un rien, de son regret de ne pas avoir eu d’enfants, puis de sa fierté à avoir pensé à sa vie de femme avant sa vie de couple. Plus elle buvait, plus elle se dénudait devant moi, dévoilant peu à peu les cicatrises de son âme qu’elle me montrait avec ce subtil mélange de jovialité et de mélancolie. J’admirais tant ça, les cicatrises des femmes, si nombreuses, si fragiles, si esthétiques et pourtant si profondes. La nuit défilait à vive allure, et chacune des secondes qui passait, je les utilisais pour plonger mon regard dans celui de Cindy. Qu’elle était belle, ivre.

— Pourquoi tu me regardes comme ça ?

— Je te regarde comment ?

— Je ne sais pas, tu fixes mes yeux comme si j’avais lancé un sort.

— Ouais, je les trouve magnifiques.

— Oh, tu es un romantique Armand. J’imagine que je ne dois pas me vexer si tu ne regardes pas ailleurs en ce cas ?

— Comment ça ?

— Tu n’as ni maté mon cul ni maté mon décolleté.

— Qu’est-ce que t’en sais ?

— Pourquoi ? Tu m’as maté ?

— Peut-être bien.

— Tu sais ce que j’aime chez toi Armand ?

— Dis-moi ?

— C’est qu’on ne sait pas ce que tu penses, tu ne laisses rien paraitre. Ça te donne un côté mystérieux et je t’avoue que ça m’excite.

— Pourtant, si tu savais ce qu’il y avait dans ma tête tu serais déçu.

— Oh, tu penses, tu veux en parler ?

— Si tu veux.

— À quoi penses-tu alors ?

— Là, j’ai simplement envie de te baiser.

Elle s’esclaffa, puis, sans un mot, tout en me souriant, elle me prit par la main et m’emmena dans sa chambre. Toujours sans rien dire, gardant le même sourire, elle me jeta sur son lit. Elle dénuda alors son corps bien en chair et exhiba sa magnifique poitrine. Sa coupe au carré lui donnait un air cochon et toute cette mise en scène me fit soudain bander. Elle se mit sur moi et à travers mon pantalon, elle frotta son sexe aux miens tout en gémissant de manière presque exagérée. Soudain, voyant que ma queue ne durcirait pas correctement, elle reprit son sourire, se baissa jusqu’à mon pantalon et me l’enleva. Elle retira mon bas, puis se mis à me sucer avec l’expérience d’une femme de son âge habituée à faire plaisir aux hommes par manque d’amour. Et ça fonctionna, mon sexe était totalement droit. Ensuite, elle se mit sur moi et me chevaucha. Je ne me souviens que de la moiteur de la chambre et d’un tableau avec un chien qui me fixait étrangement. J’avais chaud et je me concentrai surtout à ne pas débander à cause de l’alcool. Malheureusement, tout me perturbait, le bruit du lit, le portait du chien, cette chienne en rut qui hurlait sans cesse. Finalement, même avec une mi-molle, je tins bon et Cindy eut son orgasme. On s’étala ensuite tous deux d’un côté du lit. Elle sur le ventre, moi sur le dos, la queue molle, les couilles pleines. Je ne savais pas à quoi pouvait penser Cindy. Moi, pas à grand-chose. Je fixais les différents éléments de déco qui jonchaient la chambre. Je me posais des questions sans aucun sens sur tel et tel objet, puis me mit à me faire des scénarios sans liens les uns des autres dans ma tête. Soudain, Cindy cassa le murmure de mes pensées et me demanda : « Tu peux aller dormir sur le canapé s’il te plait. » Je lui répondis alors que oui, pris mes affaires, déplia le canapé et me coucha. Cependant, le sommeille était parti et avec lui les joies de l’insomnie. Je fixais alors l’obscurité de la nuit et y vit, pour un instant seulement, tous les liens, tous les fils de mon existence qui m’avait mené à cet instant précis, à cet instant où moi, quarante ans, toujours enfants dans l’âme, m’étais retrouvé dans cette ville, sans amis ni travail, sans femme ni argent, loin des promesses que l’on m’avait promis gamin, loin des vies idéales que l’on m’avait vendues. Puis, je me mis à penser qu’il y avait pire que moi et cela m’apaisa un peu. Soudain, mon sexe banda de nouveau, alors je me branlai et une fois mon affaire terminée, je m’endormis, avec cette éternelle espérance d’un lendemain meilleur.

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